Ischémies mésentériques



Olivier Collange : Interne des Hôpitaux.
Benoît Veber : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Département d’anesthésie-réanimation, centre hospitalier universitaire de Rouen, hôpital Charles Nicolle, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France.


Résumé. – L’ischémie mésentérique aiguë est une urgence médicochirurgicale dont le pronostic encore trop péjoratif dépend de la précocité du diagnostic et d’une prise en charge thérapeutique adaptée. L’intestin grêle et le côlon représentent les viscères le plus fréquemment concernés. Les causes les plus fréquentes sont représentées par les embolies artérielles suivies par la thrombose athéromateuse aiguë.
De plus, toute situation de bas débit cardiaque sévère peut se compliquer d’une ischémie mésentérique non occlusive. L’évolution des lésions est rapide, en quelques heures, aboutissant à la constitution d’un infarctus mésentérique responsable d’une nécrose intestinale qui conditionne le pronostic vital. Son diagnostic en est difficile, la sémiologie clinique et biologique n’étant pas spécifique et l’étiologie variée.
Il repose sur l’artériographie mésentérique sélective qui est l’examen-clé ouvrant la voie à la radiologie vasculaire interventionnelle. La stratégie diagnostique et thérapeutique ne se conçoit aujourd’hui que dans le cadre d’une prise en charge multidisciplinaire associant, dans une même urgence, l’équipe d’anesthésieréanimation, de radiologie et de chirurgie vasculaire et/ou viscérale.


Mots-clés : urgence médicochirurgicale, prise en charge multidisciplinaire, artériographie mésentérique sélective, revascularisation par voie endoluminale, ischémie-reperfusion, diagnostic difficile, syndrome d’ischémie reperfusion, spasme vasculaire, d-lactates, mortalité élevée. ambulance Tunisie, taysir assistance.



Introduction
L’ischémie mésentérique se définit comme la résultante d’une inadéquation entre la consommation et l’apport d’oxygène dans le territoire des artères mésentériques et du tronc coeliaque. Elle représente une entité pathologique extrêmement disparate en termes de localisation, de physiopathologie, de formes cliniques et de pronostic. Ainsi, cette entité regroupe l’ischémie mésentérique aiguë, l’ischémie mésentérique chronique dont la traduction clinique essentielle est l’angor intestinal, le syndrome d’ischémie intestinale aiguë mésentérique défini comme la phase précoce et réversible de l’ischémie et la colite ischémique observée essentiellement après chirurgie de l’aorte. La difficulté du diagnostic clinique d’ischémie mésentérique aiguë retarde souvent la mise en oeuvre du traitement spécifique et favorise la survenue d’un infarctus intestinal constitué, qui compromet l’avenir fonctionnel digestif du patient et met rapidement en jeu le pronostic vital. Il s’agit heureusement d’une urgence intestinale rare dont la prévalence est estimée à 0,9 % des hospitalisations pour douleur abdominale [30] et à 0,4 % des laparotomies effectuées en urgence [69] pour syndrome douloureux abdominal. Néanmoins, la nécessité impérative d’un diagnostic précoce permettant la mise en route d’une stratégie thérapeutique étiologique urgente aboutissant à la revascularisation et au «sauvetage digestif » doit être soulignée. Cette stratégie reposant sur une prise en charge multidisciplinaire devrait permettre d’améliorer le pronostic et d’éviter l’évolution vers la défaillance multiviscérale puis le décès des formes trop souvent diagnostiquées tardivement.
La mortalité reste encore aujourd’hui considérable mais varie selon l’étiologie. Elle est proche de 30 % pour les ischémies veineuses, 50 % pour les embolies, 67 % pour les ischémies non occlusives et atteint 80 à 95 % dans les ischémies thrombotiques [55].
La morbidité est de même très élevée. Après quelques rappels généraux essentiellement d’anatomie et de physiopathologie, les problèmes posés par les différentes étiologies, le diagnostic et la stratégie thérapeutique seront abordés.

Anatomie
La vascularisation des viscères abdominaux est assurée par trois troncs artériels principaux : le tronc coeliaque, l’artère mésentérique supérieure et l’artère mésentérique inférieure. À ceux-ci s’ajoutent les branches viscérales intrapelviennes de l’artère iliaque interne qui assurent l’irrigation des organes pelviens et notamment du rectum.
Cette vascularisation est caractérisée par la fréquence des variations anatomiques et la richesse des anastomoses unissant chacun des troncs artériels (fig 1).

TRONCS PRINCIPAUX
Tronc coeliaque
Il naît de la face antérieure de l’aorte, en regard de T12-L1 et se divise en trois branches : l’artère hépatique, l’artère splénique et l’artère coronaire stomachique. Il assure la vascularisation des viscères sus-mésocoliques de l’abdomen.

Artère mésentérique supérieure
Elle naît de la face antérieure de l’aorte, 1 à 2 cm au-dessous du tronc coeliaque, en regard de L1. Ses branches collatérales sont variables en nombre, en calibre et en ordre d’émergence :
– des branches pancréatiques et duodénales naissant dans son segment rétropancréatique ;
– des branches jéjunales (quatre à six) et iléales (neuf à treize) naissant dans son segment intramésentérique ;
– des branches coliques (deux ou trois) destinées au côlon droit.
Elle se termine au voisinage du bord mésentérique de l’iléon et ses branches terminales s’anastomosent à plein canal avec les collatérales voisines. Elle assure la vascularisation de la totalité de l’intestin grêle et de la moitié droite du côlon.
Artère mésentérique inférieure
Elle naît de la face antérogauche de l’aorte abdominale en regard de L3.
Elle fournit des artères coliques (deux ou trois) destinées au côlon gauche. Elle se poursuit par l’artère rectale supérieure dont les branches terminales assurent la vascularisation du rectum.
Branches terminales
Les branches terminales de ces différentes artères forment, dans la paroi des viscères creux un réseau très développé qui comporte un plexus sous-séreux duquel naissent des branches qui traversent les couches musculaires pour former un réseau sous-muqueux particulièrement abondant. Ce réseau donne naissance aux artères de la muqueuse avec, au niveau de chaque villosité intestinale, une artériole centrale qui se ramifie et irrigue tous les éléments.

ANASTOMOSES
Les anastomoses entre ces trois systèmes sont très riches et peuvent acquérir un développement considérable lorsqu’une lésion sténosante provoque un défaut d’apport au niveau d’un territoire.
Ces anastomoses peuvent se développer soit à partir des collatérales artérielles normales, soit à partir de reliquats artériels embryonnaires.
Anastomoses entre le tronc coeliaque et l’artère mésentérique supérieure
– Arcades pancréaticoduodénales de Rio Branco.
– Anastomoses intrapancréatiques.
– Anastomoses entre l’artère hépatique droite née de la mésentérique supérieure et l’artère hépatique du tronc coeliaque.
– Arcades de Bühler et de Kirk, reliquats embryonnaires.
Anastomoses entre l’artère mésentérique supérieure et l’artère mésentérique inférieure
– Arcade de Riolan : entre l’artère colique supérieure gauche et droite.
– Arcade de Drummond.
– Arcade de Villemin.
Autres anastomoses
– Hautes : artères intercostales, diaphragmatiques, mammaires internes.
– Basses : entre les branches de l’iliaque interne et de la mésentérique inférieure par l’intermédiaire des artères honteuses internes et hypogastriques.

CIRCULATION VEINEUSE
Le retour veineux de l’intestin grêle et du côlon s’effectue par le système porte, comportant notamment les veines mésentériques supérieure et inférieure.Le flux veineux portal draine l’ensemble du territoire vascularisé par tous les vaisseaux splanchniques en dehors du territoire de l’artère hépatique.C’est donc le flux veineux hépatique qui représente la somme des flux hépatosplanchniques.

Physiopathologie
PHYSIOLOGIE NORMALE
Flux splanchnique [27, 61]
Le volume sanguin splanchnique représente 30 % du volume sanguin total. En moyenne, 25 % du débit cardiaque est attribué au territoire splanchnique, ce qui correspond à 60 mL/min par 100 g de tissu. Le débit splanchnique peut atteindre 35 % du débit cardiaque en période postprandiale et descendre jusqu’à 10 % dans certaines conditions physiologiques (effort musculaire). Les trois quarts du débit splanchnique sont attribués à l’intestin grêle et un quart au côlon. Au niveau tissulaire, 60 à 80 % du flux vascularise la muqueuse intestinale, le reste étant destiné à la sous-muqueuse et à la musculeuse.
Consommation et extraction d’oxygène
Le territoire splanchnique consomme approximativement 20 à 35 % de la consommation en oxygène totale du corps. En cas d’hypoxie, l’extraction tissulaire d’oxygène peut augmenter considérablement [37].
Régulation du flux splanchnique
La régulation intrinsèque comprend le contrôle métabolique (vasodilatation en cas de besoins métaboliques),
associé au contrôle myogénique ou autorégulation (vasoconstriction en réponse à une augmentation de la pression artérielle). Cette autorégulation est moins efficace que celles observables au niveau cérébral comme au niveau rénal. Elle devient plus efficiente en période postprandiale [61].
La régulation extrinsèque comprend l’action vasoconstrictrice du système sympathique et l’action des substances vasoactives médiées par les récepteurs adrénergiques alpha et bêta. Les variations hémodynamiques systémiques participent au contrôle du flux splanchnique.
Système intestinal d’échangeur à contre-courant et « effet écrémage » (fig 2) [37]
Ce système est nécessaire à la réalisation d’un gradient de concentration hydroélectrique le long de la villosité pour faciliter l’absorption des nutriments.
Pour chaque villosité, le système comprend une artériole centrale, une arborisation capillaire au sommet de la villosité qui redescend le long de l’artériole pour confluer dans les veinules. Cette proximité entre l’artériole et le lit capillaire favorise la diffusion de l’oxygène.
Il en résulte une diminution de la PaO2 au sommet de la villosité.
L’ « effet écrémage » (plasma skimming) est dû à la configuration anatomique du réseau capillaire dans les villosités intestinales : les branches capillaires quittent l’artériole à angle droit. Cette disposition favorise la stagnation des érythrocytes qui auront tendance à rester dans l’artériole. Il en résulte une diminution de l’hématocrite dans le lit capillaire et donc une diminution de l’apport en oxygène.
Ces deux particularités anatomiques des villosités intestinales concourent à leur plus grande sensibilité à l’ischémie lors de la survenue d’une hypoperfusion splanchnique ou d’un bas débit cardiaque.

PHYSIOPATHOLOGIE : ISCHÉMIE MÉSENTÉRIQUE
Adaptation de la circulation splanchnique à une défaillance hémodynamique [53]
En l’absence de défaillance hémodynamique, la diminution de la pression artérielle systémique entraîne :
– une vasoconstriction artérielle splanchnique qui induit une diminution du débit sanguin splanchnique au profit des territoires « nobles » comprenant principalement le coeur et le cerveau ; cette réduction des apports en oxygène est compensée au niveau digestif par une augmentation de l’extraction tissulaire en oxygène et par une redistribution préférentielle du flux splanchnique vers la muqueuse au détriment de la sous-muqueuse et de la musculeuse ;
– une vasoconstriction veineuse qui réduit la séquestration sanguine contenue dans le lit splanchnique ; il en résulte une « autotransfusion » vers le secteur systémique.
Ces deux mécanismes ont pour but de maintenir une volémie et une pression de perfusion adéquates dans le secteur systémique, et correspondent à des phénomènes d’adaptation vitaux.
Lors d’une défaillance hémodynamique, la situation est moins simple : ce mécanisme d’adaptation peut dépasser ses objectifs en réalisant une vasoconstriction génératrice d’une authentique ischémie tissulaire dans le territoire splanchnique. Ainsi, des ischémies pancréatiques, hépatiques, vésiculaires, mésentériques ou coliques ont pu être rapportées.
De façon très schématique :
– après 15 minutes d’ischémie artérielle apparaît une ischémie du sommet des villosités ; une étude récente [31] a montré que cette lésion précoce était probablement due à une apoptôse (ou mort cellulaire programmée) induite par l’ischémie plutôt qu’une véritable nécrose ; mais qu’il s’agisse d’une apoptôse ou d’une nécrose, les conséquences tissulaires sont les mêmes (cf infra) ;
– entre 0 et 6 heures, on considère que les lésions sont encore réversibles ; la nécrose tissulaire n’est pas transmurale ;
– la limite de temps après laquelle les lésions sont considérées comme définitives est vague, elle va de 12 à 24 heures [42] ; celle-ci n’a pas fait l’objet d’une évaluation clinique précise rapportée dans la littérature médicale ; une lésion définitive se caractérise par une atteinte des trois couches tissulaires et aboutira aux perforations digestives.
Syndrome d’ischémie reperfusion [62, 70]
Parks, en 1986,
a mis en évidence dans une étude expérimentale que les lésions intestinales observées après 3 heures d’ischémie et 1 heure de reperfusion sont beaucoup plus importantes que celles observées après 4 heures d’ischémie [52].Ainsi, la reperfusion de tissus ischémiés accentue les lésions microvasculaires et parenchymateuses par la production en grande quantité de radicaux libres. L’ischémie aboutit à la formation d’hypoxanthine qui sera oxydée en radicaux libres grâce à la xanthine déshydrogénase en présence d’oxygène lors de la reperfusion (fig 3).
Les radicaux libres (H2O2, O2 -, Fe3+) sont des molécules instables ayant un fort pouvoir réactif : ils vont céder leur électron libre surnuméraire en désorganisant la structure moléculaire des lipides membranaires et des protéines cellulaires.
Les conséquences locales de cette destruction cellulaire sont un oedème avec une augmentation de la perméabilité tissulaire, une activation des enzymes inflammatoires et des polynucléaires neutrophiles. Après une courte période d’ischémie, les effets néfastes de la reperfusion dépassent ceux de l’ischémie. Quand l’ischémie perdure, ses effets deviennent prédominants et, à terme, la reperfusion d’un tissu infarci n’influence plus le pronostic lésionnel.
Défaillance multiviscérale [21, 65]
Depuis les premières descriptions de défaillance multiviscérale (DMV) dans les années 1970, de nombreux concepts ont mis en cause le tube digestif comme étant le « moteur » de ce syndrome.
Néanmoins, la relation directe entre l’hypoperfusion de la muqueuse digestive et la DMV est difficile à mettre en évidence. Les hypothèses physiopathologiques actuellement admises sont les suivantes.
Hyperperméabilité intestinale et translocation
Lorsque la muqueuse digestive lésée devient perméable, des bactéries ou leurs endotoxines peuvent passer de la lumière intestinale vers le système porte ou le système lymphatique. Ainsi, 30 % des autopsies faites chez des malades décédés de DMV et qui avaient des bactériémies positives ne retrouvent pas de foyer infectieux [24]. De même, dans un modèle de choc hémorragique chez le rat, un collapsus de 2 heures induit 50 % de bactériémies positives et 87 % d’endotoxinémie [58].
Translocation et DMV [2]
Il existe plusieurs étapes entre la dysfonction de la barrière digestive et l’activation systémique incontrôlée de l’inflammation. Initialement, les micro-organismes et/ou les toxines diffusent ou sont activement transportés de la lumière digestive à la sousmuqueuse.Secondairement, ces micro-organismes ou toxines activent les cellules du système immunitaire de proximité comprenant les cellules de Kupffer, les macrophages et les cellules des ganglions lymphatiques.Puis, ces cellules relarguent de nombreux médiateurs de l’inflammation comme notamment les cytokines, le NO ou le facteur d’activation plaquettaire (PAF : platelet activating factor). Enfin, les médiateurs de l’inflammation attirent et activent les polynucléaires neutrophiles (PNN) qui sont eux-mêmes générateurs de radicaux libres [6].
Les polynucléaires activés essaiment dans l’ensemble de l’organisme et jouent un rôle de « boutefeux » inflammatoires systémiques expliquant l’atteinte viscérale à distance de l’agression initiale et le décalage possible dans le temps entre la défaillance circulatoire et la survenue d’une DMV.
Enfin, l’activation des PNN et du système inflammatoire peut survenir sans qu’il existe de bactériémies ou même de foyer infectieux. Cette situation correspond au syndrome de réponse inflammatoire systémique (SIRS).


Étiologie des ischémies mésentériques




La grande diversité des mécanismes pathogéniques des ischémies mésentériques est abordée dans ce chapitre.
Afin de garder une disposition claire, les causes rares sont regroupées dans un paragraphe.
L’ischémie mésentérique compliquant la chirurgie de l’aorte est abordée dans le paragraphe intitulé « ischémie colique ».
 Enfin, l’implication dans la genèse des ischémies mésentériques des médicaments et notamment des catécholamines est évoquée en fin de chapitre.

ISCHÉMIES MÉSENTÉRIQUES ARTÉRIELLES
Embolies
L’embolie de l’artère mésentérique supérieure est l’embolie viscérale la plus fréquente, probablement du fait de l’implantation oblique de l’artère sur l’aorte. La fréquence de cette étiologie est variable selon les séries. Ainsi, pour Inderbitzi et al, 50 à 60 % des ischémies mésentériques artérielles (IMA) sont d’origine embolique [32] alors que Taylor et Moneta ne retrouvent cette étiologie que dans 29 % des cas [63].
L’embolie artérielle peut, par ordre décroissant d’importance :
– provenir du coeur gauche : par atteintes valvulaires, par passage ou par réduction d’arythmies rapides ou secondaire à un infarctus transmural associé à un thrombus intracavitaire ;
– provenir de l’aorte : caillot d’un anévrisme, migration d’une plaque d’athérome ulcérée, lésion intimale traumatique ;
– être d’origine iatrogène : dans les suites de la chirurgie aortique, du cathétérisme artériel pour angiographie ou pour angioplastie transluminale ;
– provenir du coeur droit par embolie paradoxale (communication interauriculaire).
Thrombose aiguë
On lui attribue 23 % des IMA [63].
L’athérome est de loin l’étiologie la plus fréquente des thromboses aiguës. Pour provoquer un tableau d’IMA, en plus de la présence de sténoses serrées sur au moins deux des trois axes artériels digestifs, il faut un facteur déclenchant correspondant le plus souvent à un bas débit ou un état de choc quel qu’il soit. Ainsi, un infarctus du myocarde, un trouble du rythme rapide ou une déshydratation intense sont souvent retrouvés dans les jours ou les heures qui précèdent la survenue d’une IMA.
Il est important de noter que l’athérome vasculaire digestif est constamment associé aux autres localisations de la maladie athéromateuse. Un bilan coronarien et des vaisseaux du cou est donc impératif au décours de l’épisode d’IMA (mais, il ne doit en aucun cas retarder la prise en charge de celui-ci). L’extension d’une thrombose aortique, d’un anévrisme aortique et la thrombose d’une prothèse aortique ou aorticodigestive sont d’autres causes possibles.
Ischémie intestinale non occlusive
Le vasospasme splanchnique est responsable de 20 à 30 % des IMA [3]. Il s’agit d’une ischémie digestive survenant en l’absence de lésion vasculaire anatomique. Si, dans 27 % des cas, aucune cause n’est identifiée [22], chez tous les autres patients une défaillance circulatoire marquée peut être retrouvée. L’étiologie non occlusive est suspectée dans les situations suivantes :
– infarctus du myocarde récent, insuffisance cardiaque ;
– hypovolémie : choc septique, hémorragique ou dans les suites d’une hémodialyse ;
– en période postopératoire, après une circulation extracorporelle par exemple.
La vasoconstriction splanchnique est une réponse précoce, neuroendocrine, à une réduction globale de l’oxygénation tissulaire dont la finalité est de privilégier la vascularisation des organes vitaux. Dans certaines circonstances, encore inexpliquées, ce mécanisme de compensation du choc dépasse les limites de tolérance à l’ischémie du tube digestif et entraîne une ischémie intestinale qui pérennise et entretient la défaillance circulatoire (cf Physiopathologie).
Ischémie mésentérique chronique
C’est le stade qui peut précéder l’IMA de nature thrombotique.
Ainsi, une étude a montré que 27 % des patients qui attendaient d’être opérés pour une ischémie mésentérique chronique (IMC) avaient développé au préalable un tableau d’ischémie aiguë [11]. La maladie athéromateuse est responsable de 95 % des IMC.
Par ailleurs, l’incidence des sténoses artérielles digestives dans la population générale est relativement faible. Les constatations sur autopsie confirment cette notion, évaluant leur fréquence chez le sujet de plus de 60 ans de 3,4 à 10,8 % en fonction du tronc artériel concerné [20].

THROMBOSE VEINEUSE MÉSENTÉRIQUE
Elle représente 5 à 15% des IMA[56, 63].
La mortalité y est probablement moins élevée que pour les autres formes d’ischémie digestive et avoisine les 34 %.
On distingue trois types d’ischémie veineuse :
– les thromboses primitives (30 % des thromboses veineuses mésentériques [TVM]) correspondant à des états d’hypercoagulabilité par :

– déficit en antithrombine 3, en protéine C ou S ;
– grossesse ;
– syndromes myéloprolifératifs ;
– les oestroprogestatifs qui ont pu être mis en cause ;
– les thromboses secondaires (60 % des TVM) correspondent à la formation d’un thrombus par diminution du flux mésentérique et portal puis développement centrifuge de celui-ci jusqu’à l’occlusion des vaisseaux intramuraux :
– hypertension portale ;
– sclérothérapie endoscopique ;
– pancréatite ;
– chirurgie digestive, traumatisme abdominal ;
– les thromboses idiopathiques (10 %).

CAUSES RARES [35]
– Causes mécaniques : dissection artérielle, compression du ligament arqué, cancer du sigmoïde, embolie tumorale, neurofibromatose, fibrose rétropéritonéale, étranglement herniaire, volvulus intestinal.
– Causes hématologiques : thrombocytose, amylose, coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), polyglobulie, drépanocytose.
– Causes endocriniennes : diabète.
– Causes infectieuses : appendicite, abcès abdominaux et pelviens, cholécystite, angiocholite.
– Vascularites : maladie de Buerger, lupus érythémateux disséminé, périartérite noueuse, maladie de Takayashu, maladie de Behçet, maladie de Crohn.
– Traumatisme : choc direct, désinsertion mésentérique ou secondaire à des brûlures [34].
– Causes iatrogènes : endoscopie digestive par distension de l’intestin et écrasement des vaisseaux, thrombose veineuse après sclérothérapie de varices oesophagiennes, dialyse péritonéale, cathétérisme artériel.
– Causes diverses : maladie de Hambourg, lésion fibrodysplasique de l’intima, embolie tumorale d’un myxome cardiaque ou d’un sarcome aortique. La cocaïne par voie intraveineuse a une action vasoconstrictrice propre sur les artères digestives en plus de son caractère arythmogène et générateur d’infarctus du myocarde.

CAUSES MÉDICAMENTEUSES
Catécholamines [43]
Le traitement des états de choc comprend souvent la prescription de catécholamines. Leurs effets pharmacodynamiques et leur action sur les récepteurs adrénergiques sont de mieux en mieux connus.
Cependant, l’action de ces drogues vasoactives sur la vascularisation splanchnique reste discutée.
– Dopamine : elle pourrait augmenter le flux splanchnique en diminuant les résistances vasculaires mésentériques. Utilisée chez des malades en choc septique, elle augmenterait le flux splanchnique mais ne modifie pas le point isoélectrique (pHi) gastrique [42]. À doses « rénales » (< 5 mg/kg/min), certaines études ont montré une vasoconstriction mésentérique, d’autres une augmentation du flux splanchnique. Ainsi, selon les études, les effets de la dopamine restent controversés puisqu’elle pourrait augmenter ou diminuer le flux mésentérique sans élévation du pHi gastrique ou être associée à une baisse de celui-ci [41, 42].
– Dobutamine : plusieurs études expérimentales et cliniques plaident pour une augmentation du flux gastrique associée à une élévation du pHi gastrique, traduisant une meilleure oxygénation de la muqueuse intestinale [29, 54]. Cet effet persisterait lors de l’association à la noradrénaline ou à l’adrénaline [38].
– Dopexamine : les données expérimentales démontrent que la dopexamine augmenterait le flux splanchnique [40]. Cependant, les études sur les effets de la dopexamine chez des malades en choc septique sont encore trop rares pour conclure.
– Noradrénaline : stimulant fortement les récepteurs alphaadrénergiques, elle devrait entraîner une vasoconstriction mésentérique. Pourtant, de nombreuses études ont montré qu’en augmentant la pression de perfusion systémique, la noradrénaline améliorerait l’oxygénation splanchnique [57, 69].
– Adrénaline : ses effets sur la vascularisation digestive sont controversés. Des données récentes semblent indiquer que l’adrénaline diminuerait plus le flux splanchnique que l’association noradrénaline-dobutamine [39, 44].
Autres médicaments [35]
Les médicaments suivants ont pu être impliqués dans la survenue d’un vasospasme mésentérique : les digitaliques, le propranolol, l’ergotamine et le méthysergide (qui peut induire une vasoconstriction rénale, carotidienne, rétinienne ou mésentérique), les diurétiques employés chez des malades hypovolémiques et la ciclosporine.

Diagnostic des ischémies mésentériques



À la phase initiale, les signes cliniques d’ischémie mésentérique sont frustes et peu spécifiques. Après quelques heures d’évolution, les complications ou les répercussions systémiques sont au premier plan. Cette évolution peut égarer le clinicien, risquant ainsi de retarder la prise en charge spécifique.

CLINIQUE
Selon le territoire
Parmi les trois troncs artériels à visée intestinale, l’artère mésentérique supérieure est de loin celle qui est le plus souvent responsable d’une ischémie. Cette nette prépondérance fait que l’on confond souvent « ischémie mésentérique » avec « ischémie mésentérique supérieure ». Il faut donc distinguer l’ischémie mésentérique supérieure, l’ischémie mésentérique inférieure réalisant la colite ischémique et le syndrome du tronc coeliaque [13].
Ce dernier correspond à une compression du vaisseau par le ligament arqué. Ce syndrome rare touche plus volontiers les femmes et associe des douleurs abdominales chroniques avec d’autres signes digestifs non spécifiques : nausées (classiquement déclenchées par la vue des aliments), vomissements, diarrhées, anorexie. Cependant, pour devenir symptomatique, l’insuffisance circulatoire coeliaque doit être accompagnée d’une atteinte vasculaire dans au moins l’un des deux autres territoires digestifs.
Selon l’étiologie
Ischémie mésentérique aiguë par occlusion artérielle
C’est le tableau clinique le plus classique. L’apparition de douleurs abdominales brutales en quelques heures ou insidieusement sur plusieurs jours est très évocatrice chez un malade artéritique et/ou cardiaque.
L’étiologie embolique est suspectée devant l’apparition brutale des douleurs abdominales en dehors de toute prise alimentaire associée à une cardiopathie emboligène.
La thrombose aiguë se caractérise par une installation plus graduelle avec, à l’anamnèse, une notion de nausées ou de troubles du transit.
Parfois, l’auscultation retrouve un souffle vasculaire abdominal. Dans les deux cas, l’examen peut retrouver un abdomen météorisé, avec au début, une exagération des bruits digestifs puis un silence «sépulcral ».
La recherche de sang dans les selles, notamment à la bandelette, est positive chez la majorité des malades. Initialement, l’abdomen peut être souple puis, quand l’ischémie progresse, des signes d’irritation péritonéale apparaissent.L’apyrexie, l’hypo- ou l’hyperthermie sont possibles. L’état de choc, quand il survient, est d’abord de nature hypovolémique par transsudation liquidienne dans la lumière digestive.
Un profil septique voire une défaillance multiviscérale peuvent compliquer le tableau clinique. Tous les cas de figures sont possibles, de l’état de choc encore compensé à la grande défaillance circulatoire d’emblée.
Ischémie mésentérique non occlusive
Le diagnostic est souvent retardé car il s’agit d’un tableau clinique venant compliquer une autre pathologie (déshydratation, hypovolémie) ou un traitement médicamenteux (catécholamines, digitaliques…). Cependant, l’association de douleurs abdominales intenses avec des nausées, des vomissements, une diarrhée doit alerter le clinicien et faire évoquer le diagnostic.
Thrombose veineuse mésentérique [56]
Tous les symptômes de l’IMA aiguë (douleurs abdominales, nausées, vomissements, diarrhées sanglantes ou non) peuvent se retrouver dans la thrombose veineuse, mais en général avec une installation plus insidieuse et avec une intensité moindre. L’association de ces signes à une hématémèse par rupture de varices oesophagiennes est possible et vient compliquer l’évolution.
Ischémie mésentérique chronique [36]
On considère que, pour devenir symptomatique, une sténose artérielle digestive doit intéresser au moins deux des trois axes artériels digestifs. L’obstruction des trois artères digestives peut être totalement asymptomatique par le développement des anastomoses vasculaires. Cependant, une thrombose évoluée et asymptomatique peut décompenser rapidement lors de perturbations hémodynamiques (état de choc, insuffisance cardiaque…) ou lors de l’introduction de drogues vasoactives.
Les formes symptomatiques regroupent :
– l’angor intestinal qui correspond à la claudication intermittente du tube digestif ; celle-ci est caractérisée par la triade douleurs épigastriques postprandiales précoces pouvant être calmée par la prise de trinitrine, restriction volontaire de l’alimentation et amaigrissement ; la diarrhée n’est observée que chez moins de 20 % des patients [36] ;
– le syndrome de malabsorption est rare ; pour ce syndrome, l’origine vasculaire représente l’étiologie la moins fréquente ;
– symptômes atypiques :
– symptômes gastroduodénaux : ulcère ischémique, gastroparésie ischémique ;
– atteintes hépatobiliaires : cholécystite gangreneuse alithiasique, cytolyse hépatique ;
– atteintes coliques dont la gravité va de la colopathie passagère à la colite ulcéreuse chronique.
Le terrain vasculaire est constamment retrouvé mais le souffle épigastrique n’est présent que de façon inconstante.
Selon la gravité ou selon la durée d’évolution [55]
Syndrome d’ischémie aiguë mésentérique
Le syndrome d’ischémie aiguë mésentérique (SIAM) se définit comme le stade d’ischémie aiguë qui précède la nécrose intestinale.
Ce stade, dont la durée n’excède pas 30 à 60 minutes, est réversible [33]. Il se caractérise par la possibilité d’un traitement conservateur dont l’objectif principal est la restauration du flux splanchnique. L’évolution se fait en deux temps. Une phase très précoce marquée par l’hyperpéristaltisme. L’intestin est pâle, spasmé et prend un aspect d’ « intestin de poulet ». Ultérieurement, il se dilate et devient atone. Cette seconde phase correspond à la souffrance de la muqueuse digestive constituant des lésions encore réversibles. Sur le plan clinique, c’est le syndrome abdominal qui est au premier plan. La douleur abdominale est plus ou moins associée à des diarrhées, des nausées ou des vomissements. Parfois, le début est insidieux et le malade ne se plaint que d’embarras gastrique. L’abdomen est sensible mais non météorisé et surtout ne présente pas de défense. L’auscultation peut percevoir une exagération des bruits hydroaériques. Les touchers pelviens ne révèlent aucune anomalie. Enfin, l’état général est le plus souvent conservé.
L’examen clinique de cet abdomen « non chirurgical » ne doit pas rassurer le clinicien. En l’absence d’une thérapeutique adaptée, le tableau clinique évolue inéluctablement vers l’infarctus mésentérique. C’est précisément à ce stade encore précoce qu’une stratégie diagnostique adaptée doit être mise en oeuvre.
Infarctus mésentérique
Il se caractérise par des lésions d’ischémie irréversible avec nécrose (anses oedématiées, immobiles, verdâtres avec un mésentère hémorragique) nécessitant toujours une résection intestinale. Il concerne essentiellement le grêle et le mésentère, mais peut s’étendre au côlon et parfois aux viscères pleins.
Sur le plan clinique, le syndrome abdominal est le plus souvent associé à des signes de défaillance systémique. Les douleurs sont continues, classiquement accompagnées de diarrhées sanglantes suivies d’un tableau d’iléus avec arrêt des matières et des gaz.
L’examen retrouve un abdomen tendu, silencieux à l’auscultation. Une défense apparaît. L’évolution se fait rapidement vers la constitution d’un choc septique.

DIAGNOSTIC PARACLINIQUE
Radiologie [60]
L’examen-clé est l’artériographie, qui peut en outre avoir des applications thérapeutiques.
Abdomen sans préparation
Il est faiblement contributif et peut être normal. On recherchera :
– des calcifications de l’aorte abdominale et de ses branches ;
– des niveaux hydroaériques évoquant un syndrome occlusif ;
– la présence de clartés anormales : exagération de l’aérogrélie, air intrapariétal, aérobilie ou aéroportie de pronostic sombre, pneumopéritoine signant une perforation digestive ;
– une grisaille diffuse en faveur d’un épanchement intrapéritonéal.
Échodoppler
Il permet d’identifier les thromboses veineuses et les sténoses très serrées de l’AMS. Cependant, cet examen qui est opérateurdépendant, n’a probablement que peu de place dans le diagnostic de l’ischémie mésentérique aiguë artérielle. En ce qui concerne les ischémies mésentériques chroniques, un examen négatif permet de chercher une autre cause aux douleurs abdominales, un examen positif impose l’artériographie [51]. De plus, cet examen permet d’étudier la vascularisation splanchnique en période postprandiale [46], permettant de démasquer une insuffisance splanchnique d’ « effort ».
Artériographie
C’est l’examen-clé, à obtenir en urgence devant toute suspicion d’ischémie mésentérique car elle seule permet de poser de manière formelle le diagnostic. Elle permet de préciser l’étiologie et éventuellement de réaliser un geste thérapeutique.
Technique : elle est réalisée de préférence par voie fémorale selon la technique de Seldinger. Des clichés de face et de profil sont nécessaires avant de réaliser le cathétérisme sélectif puis l’aortographie.
Résultats : l’embole est visualisé par un arrêt cupuliforme siégeant au niveau d’une division artérielle. La thrombose aiguë se traduit par une oblitération ostiale ou juxtaostiale avec opacification retardée des artères mésentériques périphériques. Des plaques athéromateuses de l’aorte, des artères iliaques et des autres artères viscérales sont souvent associées.
Tomodensitométrie abdominale
Le scanner spiralé avec injection intraveineuse de produit de contraste est l’examen le plus performant. C’est, avec l’échodoppler, l’examen de référence pour le diagnostic et le suivi des thromboses veineuses portales ou mésentériques. La tomodensitométrie présente deux avantages par rapport à l’échodoppler :
– la possibilité d’injection de produits de contraste ;
– l’absence de gêne par la pneumatisation digestive.
Le scanner permet une exploration complète de la cavité abdominale, qu’il s’agisse des organes pleins, des viscères creux ou du péritoine. Il représente un élément essentiel pour le diagnostic différentiel (pancréatite, cholécystite, tumeur digestive…). Par ailleurs, un épaississement des parois intestinales signe la souffrance digestive et l’aéroportie traduit une lésion évoluée de l’intestin.
Imagerie par résonance magnétique (IRM)
Il semblerait que l’IRM soit un examen intéressant en donnant une bonne corrélation entre les images et le degré d’ischémie mésentérique [64]. Cependant les études sur ce sujet sont peu nombreuses et la réalisation pratique d’une IRM en urgence pour un syndrome abdominal aigu semble difficile.
Au total, deux situations :
-l’ischémie artérielle pour laquelle l’examen indispensable à demander en urgence est l’artériographie sélective ;
- l’ischémie veineuse où échodoppler et angioscanner spiralé font le diagnostic.

Diagnostic biologique
Examens standards
Ils ne fournissent que des éléments d’orientations peu spécifiques.
L’intrication du tableau avec un état de choc (responsable ou secondaire à l’ischémie mésentérique) ou avec une péritonite peut égarer le clinicien.
Numération-formule sanguine (NFS) :
– une hyperleucocytose supérieure à 15 ´ 109 L–1 est souvent retrouvée en l’absence de péritonite ;
– une hémoconcentration secondaire à une déshydratation par séquestration liquidienne est possible.
Coagulation : des troubles de la coagulation (CIVD) sont possibles dans les formes évoluées.
Ionogramme sanguin et gaz du sang artériel :
– acidose métabolique avec hyperlactatémie que l’on retrouve dans 30 à 45 % des cas ; son incidence augmente avec l’importance des lésions [59] ;
– hyperphosphorémie initiale, normalisation puis hypophosphorémie rendant ce dosage peu fiable ;
– hyperamylasémie en dehors de toute pathologie pancréatique ;
– hyperurémie possible ;
– augmentation des lacticodéshydrogénases (LDH), des aspartates aminotransférases (ASAT), alanines aminotransférases (ALAT) et des créatines phosphokinases (CPK) totaux classique mais non spécifique et non constante.
Examens spécifiques
En général, ils ne sont pas disponibles en routine, ce qui limite pour le moment leur intérêt clinique.
Au total : une hyperleucocytose associée à une acidose lactique et éventuellement à une hyperphosphorémie doivent faire évoquer le diagnostic.

– Dosage de l’isoenzyme CPK-BB [23, 26] : une valeur supérieure à 20 ng/mL fait le diagnostic. La sensibilité de cet examen est de 63 % et sa spécificité de 100 %. L’élévation des isoenzymes CPK-BB se fait dans les 12 premières heures, alors que les autres isoenzymes n’augmentent que dans les 12 heures qui suivent. Mais cette augmentation n’est que « semi-précoce » puisqu’à la 12e heure, les lésions ischémiques sont déjà définitives.
– Dosage du d-lactate [28, 48] : une valeur supérieure à 20 mg/mL fait le diagnostic avec une sensibilité de 90 % et une spécificité de 87 %.
De plus, les d-lactates augmentent seulement 2 heures après l’ischémie digestive, ce qui en ferait l’examen diagnostique le plus précoce et en particulier dans les 6 premières heures où les lésions ischémiques sont encore réversibles. Le d-lactate est un isomère dextrogyre du lactate produit uniquement par la fermentation bactérienne et n’est pratiquement pas métabolisé lors du passage hépatique, contrairement à toutes les enzymes de la lyse cellulaire qui ne sont détectables dans le sang qu’après avoir saturé le système d’épuration hépatique. Son élévation systémique témoignerait donc de l’augmentation de la perméabilité épithéliale lors de l’ischémie de la muqueuse digestive. Le développement de ce dosage dans la pratique quotidienne semblerait donc intéressant.
Autres moyens diagnostiques
Endoscopies : la fibroscopie oeso-gastro-duodénale peut orienter vers une thrombose veineuse mésentérique en montrant d’autres signes d’hypertension portale comme des varices oesophagiennes.
L’endoscopie de l’intestin grêle n’est possible qu’à travers une stomie et a un intérêt dans le suivi de la vitalité digestive en postopératoire. La colonoscopie est l’examen capital des ischémies coliques mais n’a aucun intérêt pour les autres ischémies digestives.
Tonométrie et mesure de pH intramuqueux :
– tonométrie gastrique : elle aurait un intérêt dans le diagnostic et le suivi des états de choc [29, 38, 39] ; elle semble aussi pouvoir mettre en évidence un phénomène de vol vasculaire, du tronc coeliaque vers l’artère mésentérique supérieure dans le cadre d’une ischémie mésentérique chronique (baisse du pHi gastrique postprandial par diminution de la perfusion gastroduodénale au profit de la perfusion de la mésentérique supérieure) [10] ;
– tonométrie iléale : le pHi iléal donne les mêmes informations que le pHi gastrique mais sa réalisation est plus complexe ;
– tonométrie colique : elle a été développée avec de bons résultats par certaines équipes pour le suivi postopératoire de la chirurgie de l’aorte, à la recherche des premiers signes d’ischémie colique [7].
Laparoscopie : elle permet l’examen externe de l’intestin mais pas celui de la muqueuse et n’a donc pas d’utilité dans le diagnostic précoce des ischémies. Elle ne doit ni remplacer ni retarder la réalisation d’une artériographie. Par ailleurs, la réalisation d’une laparoscopie avec insufflation de CO2 dans la cavité abdominale peut être contre-indiquée chez un malade en état de choc.
Ponction-lavage péritonéale : elle permet de déceler la présence de bactéries ou de lipopolysaccharides ainsi que de fragments alimentaires et son aspect sérohématique peut orienter vers une thrombose veineuse mésentérique.
Enfin, certaines techniques de laser-doppler ou d’échographie endoluminale permettraient d’apprécier la vitalité de la muqueuse digestive.

Traitement des ischémies mésentériques



Le traitement
 de l’ischémie mésentériquefait appel à une prise en charge multidisciplinaire associant les équipes d’anesthésieréanimation, de radiologie et de chirurgie [12].
Il s’agit d’une urgence vitale dont le diagnostic, bien que difficile, doit permettre une prise en charge précoce garant d’un pronostic moins péjoratif. Cette prise en charge thérapeutique associe d’une part un volet symptomatique basé sur la réanimation volémique, cardiocirculatoire et hydroélectrolytique et d’autre part un volet étiologique faisant appel à des techniques de désobstruction vasculaire endoluminale mécanique ou pharmacologique et/ou à des techniques chirurgicales de revascularisation ou de résection digestive. Le médecin anesthésiste-réanimateur joue un rôle central pour la coordination de cette stratégie thérapeutique médicochirurgicale. Le traitement doit résoudre simultanément les problèmes vasculaires et le problème intestinal engendré par l’ischémie mésentérique quelle qu’en soit l’étiologie.

RÉANIMATION
Elle est primordiale et doit permettre au patient d’aborder dans les meilleures conditions les différentes étapes diagnostiques et thérapeutiques. Elle est poursuivie pendant et après tout geste chirurgical.
Elle comporte plusieurs volets qui doivent être gérés de façon simultanée.La réanimation de la défaillance hémodynamique a pour objectif de maintenir une perfusion tissulaire et notamment mésentérique la plus satisfaisante possible.
 Elle vise ainsi à prévenir ou à corriger tout état de choc en maintenant une normovolémie et un équilibre hydroélectrolytique adéquat.L’existence fréquente d’un troisième secteur digestif parfois très important impose donc uneexpansion volémiqueadaptée à l’aide de solutés macromoléculaires et/ou cristalloïdes,
la restauration d’une volémie efficace étantun objectif prioritaire et précoce de la réanimation symptomatique. Secondairement, et le plus souvent après documentation par échocardiographie ou cathétérisme droit, l’emploi d’agents inotropes positifspermet de traiter une éventuelle défaillance cardiaque associée ou responsable de l’hypoperfusion mésentérique.L’utilisation de catécholamines vasoconstrictrices telles que l’adrénaline ou la noradrénaline est parfois nécessaire notamment dans les états de choc septique ou dans les SIRS induits par l’ischémie mésentérique, pour maintenir une pression artérielle compatible avec une pression de perfusion tissulaire satisfaisante.
  L’action spécifique de ces agents vasoconstricteurs sur la perfusion mésentérique est discutée. Néanmoins, l’obtention d’une pression artérielle compatible avec une oxygénation tissulaire satisfaisante est essentielle.Dans ce contexte, l’adjonction de dobutamine pourrait améliorer la perfusion splanchnique, cette catécholamine associant un effet inotrope marqué à une vasodilatation artérielle notable par stimulation des récepteurs bêta 1 et 2 [39, 50].La réanimation hydroélectrolytique et la correction des anomalies de l’équilibre acidobasique doivent être optimisées et sont guidées par les bilans biologiques. La survenue d’une insuffisance rénaleaiguë fréquente, mais de mauvais pronostic sur ce terrain, nécessite une stratégie spécifique qui passe le plus souvent à la phase initiale par la correction de toute hypovolémie. Elle peut relever secondairement d’une dialyse qui sera au mieux sur ce terrain instable réalisée par une hémodiafiltration veinoveineuse continue.
De même, le traitement d’une acidose métabolique d’origine lactique nécessite avant tout la restauration et le maintien d’un statut hémodynamique satisfaisant.
Toute défaillance ventilatoire, qu’elle porte sur la mécanique ventilatoire ou sur une défaillance de l’échangeur avec hypoxie, doit être rapidement prise en compte et justifie une assistance ventilatoire plus ou moins prolongée. Une ventilation artificielle de type hypercapnie permissive avec une limitation des pressions de plateau pourra être mise en oeuvre en cas de survenue d’un syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) [1].
Le syndrome occlusif et la distension abdominale justifient l’aspiration gastrique continue, au moins à la phase initiale.
La nutrition artificielle par voie parentérale sera débutée après stabilisation du patient à la 24e ou 48e heure et en cas d’impossibilité d’utiliser la voie entérale comme c’est le cas notamment en cas de résection digestive proximale.
Dans toutes les autres situations, l’alimentation entérale précoce chez les patients agressés serait associée à une diminution de la mortalité et de la morbidité [5, 16].
Une antibiothérapie à large spectre couvrant les bacilles à Gram négatif, les entérocoques et les anaérobies de la flore digestive doit encadrer tout geste chirurgical sur le tube digestif et être prescrite en cas de tableau compatible avec un choc septique à point de départ abdominal, dès la période préopératoire.
En cas de phénomènes thrombotiques ou emboliques, la prévention de l’extension ou de la récidive de la thrombose passe par la prescription d’héparine par voie veineuse en continu. Une surveillance étroite de la coagulation est alors nécessaire (temps de céphaline activé, héparinémie) pour éviter les accidents hémorragiques dans cette période périopératoire. Un traitement anticoagulant est particulièrement indiqué en cas de thrombose veineuse mésentérique documentée, mais les antivitamines K ou les héparines de bas poids moléculaires ne sont pas logiques lors de cette phase initiale du fait de leur faible maniabilité.
Un traitement visant à prévenir les conséquences de la reperfusion par l’administration d’antiradicalaires, de vasodilatateurs ou de spasmolytiques peut être associé. Cependant, ce type de thérapeutique n’a pas fait la preuve de son efficacité.
Le traitement médical ne se conçoit isolément qu’en l’absence de signes généraux de gravité et de signes locaux d’irritation péritonéale.
Il doit s’accompagner d’une documentation artériographique précise débouchant éventuellement sur un geste thérapeutique de radiologie interventionnelle.
Ainsi, le vasospasme représente un élément déterminant de l’ischémie non occlusive. Le cathétérisme percutané permet sa documentation et l’injection sélective de médicaments vasodilatateurs comme la papavérine.
Le protocole d’administration pourrait être un bolus de 1 mg/kg relayé 20 minutes plus tard par une perfusion continue de 0,5 à 1 mg/kg/h qui traite et prévient la récidive du vasospasme [18, 19]. La prostacycline a été de même utilisée comme alternative à la chirurgie. L’amélioration clinique et la présence d’une bonne vascularisation d’aval justifient la poursuite du traitement en réanimation chirurgicale durant 24 heures, jusqu’à un nouveau contrôle angiographique qui confirmera la levée du spasme vasculaire malgré l’arrêt de la papavérine.L’instillation lors du cathétérisme d’agents thrombolytiques in situ a été proposée pour la prise en charge de patients particulièrement fragiles à très haut risque chirurgical et présentant une ischémie artérielle d’origine embolique de moins de 10 heures, en l’absence de nécrose digestive [49, 67].Enfin, des techniques d’angioplastie transluminale percutanée ont été tentées avec succès chez des patients présentant une occlusion proximale subtotale de l’artère mésentérique supérieure, permettant d’obtenir une disparition de l’angor mésentérique associée à une réduction du gradient de pression aortomésentérique [66].
Ces techniques sont malgré tout grevées d’une fréquence élevée de spasmes vasculaires et de récidives thrombotiques.
Cette stratégie médicoradiologique doit constamment être réévaluée pour éviter tout retard chirurgical, toute aggravation clinique ou absence d’opacification du lit d’aval sous traitement médical imposant la laparotomie pour tenter de lever l’obstacle artériel.

 CHIRURGIE VASCULAIRE EN URGENCE
Elle est au mieux réalisée après un bilan artériographique qui permet de préciser le type de lésion en cause. Mais souvent, la gravité clinique et la symptomatologie péritonéale imposent la laparotomie diagnostique et thérapeutique en urgence. Lorsqu’il est possible, un geste de revascularisation est salvateur dans la plupart des étiologies occlusives artérielles.Cependant, l’altération de l’état général et la constitution de lésions viscérales irréversibles contreindiquent cette intervention dans la moitié des cas [17].
Ce traitement chirurgical reste la base de la prise en charge thérapeutique.Ainsi, une enquête réalisée par l’association française de chirurgie en 1996 recense 391 observations d’ischémies mésentériques [22].Parmi cellesci, 64 % ont justifié une résection intestinale, 26 % une laparotomie purement exploratrice et 9 % une revascularisation mésentérique essentiellement en cas d’embolie.
L’abord chirurgical est le plus souvent réalisé par laparotomie médiane.
L’inspection abdominale permet de confirmer le diagnostic et évalue la topographie et la sévérité des lésions.Le pouls de l’artère mésentérique supérieure est systématiquement recherché. Son absence suggère une thrombose, sa disparition uniquement distale évoque une origine embolique. Cette dernière situation peut justifier une désobstruction endoluminale par sonde de Fogarty après artériotomie distale ou proximale. Les thromboses peuvent bénéficier d’une thromboendartériectomie simple mais relèvent le plus souvent d’une chirurgie vasculaire spécialisée avec réimplantation ou pontage aortomésentérique [18]. Les techniques de revascularisation des artères digestives sont actuellement bien codifiées [55].
La restauration d’un pouls mésentérique et la recoloration associée à la présence d’un péristaltisme du tractus digestif sont des critères peropératoires d’efficacité du geste de revascularisation.
La décision d’une résection digestive et l’appréciation de son étendue nécessitent une évaluation de la vitalité du tube digestif.
En plus des arguments cliniques, la récupération d’un flux vasculaire par méthode doppler au bord antimésentérique et le test à la fluorescéine peuvent aider le chirurgien à fixer l’étendue de la résection digestive. Seul ce dernier test présenterait une bonne fiabilité pour prédire le retour ad integrum de l’intestin grêle ischémié [15].Un rétablissement de continuité en un seul temps est contre-indiqué en cas de sepsis intrapéritonéal.Les deux extrémités sont alors extériorisées en une double stomie permettant la surveillance postopératoire de la muqueuse, y compris parfois par endoscopie. L’importance des résections réalisées pourra conduire secondairement à un syndrome de grêle court, dont la mortalité reste élevée.C’est pourquoi, de façon à tenter de préserver une surface d’absorption digestive suffisante lors des atteintes étendues, supérieures à 1,50 m, seules sont
réséquées les portions intestinales qui présentent une nécrose transpariétale. En conséquence, des segments à vitalité douteuse mais susceptibles de récupérer sont fréquemment laissés en place.
Ils justifient une reprise chirurgicale de principe vers la 24e heure. Il en est de même pour les fermetures temporaires des deux extrémités de portions de grêle abandonnées en intra-abdominal.
Sur le plan pratique, les indications chirurgicales peuvent être schématisées de la façon suivante :
– en l’absence de lésions ischémiques irréversibles de l’intestin, la revascularisation mésentérique isolée est indiquée permettant de récupérer une viabilité intestinale normale ;
– en cas d’infarctus constitué :
– si les lésions sont limitées, une résection intestinale isolée avec rétablissement immédiat de la continuité est suffisante ;
– si les lésions sont limitées et coexistent avec des zones d’ischémie non transmurale, la revascularisation mésentérique s’impose pour récupérer le maximum d’intestin viable ; elle sera associée à la résection du segment infarci ; une réintervention précoce pour surveiller l’état du grêle réintégré doit être discutée ;
– si les lésions sont étendues à l’ensemble du grêle, voire du côlon, une laparotomie diagnostique est le plus souvent justifiée ; une décision de résection digestive étendue pourra parfois
être prise en fonction de l’état du patient et après concertation médicochirurgicale, étant donné les progrès dans la prise en charge médicale de ces patients.
L’infarcissement mésentérique d’origine veineuse justifie avant tout un traitement anticoagulant par l’héparine intraveineuse (50 UI/kg en bolus puis 500 UI/kg/j pour une héparinémie entre 0,3 et 0,6 UI/mL). Ce type de lésion est moins souvent du ressort de la chirurgie mais quand elle est nécessaire, la résection intestinale répond aux mêmes règles que celles précédemment rappelées pour les accidents ischémiques artériels.

RÉSULTATS
La mortalité de l’infarctus mésentérique reste effroyablement élevée allant de 60 à 90 % en fonction des séries. Le caractère le plus souvent tardif du diagnostic est un facteur majeur rentrant en compte dans ce mauvais pronostic. Malgré les progrès de la réanimation au cours de la dernière décennie, le taux de mortalité n’a pas sensiblement évolué [25]. Les facteurs qui influencent la mortalité comprennent [14, 22] :
– l’âge des patients ;
– l’existence d’un collapsus peropératoire ;
– l’étendue des lésions intestinales ;
– l’existence d’une perforation intestinale ;
– l’existence d’antécédents de chirurgie cardiovasculaire ;
– l’étiologie de l’infarctus, l’infarcissement veineux ayant semble-til, un meilleur pronostic avec une mortalité moindre.

Conclusion
L’ischémie mésentérique, quelle qu’en soit l’étiologie, présente un pronostic souvent très sombre et directement lié au degré d’infarcissement intestinal. La difficulté du diagnostic doit être soulignée. Il repose essentiellement sur l’artériographie mésentérique sélective mais parfois aussi sur la laparotomie exploratrice précoce. Dans ce cadre, l’intérêt diagnostique potentiel d’un marqueur biologique sensible et spécifique, comme le seraient les d-lactates, mérite toute notre attention et probablement des évaluations complémentaires. La physiopathologie de l’ischémie mésentérique est de mieux en mieux connue et pourrait déboucher dans un avenir proche sur la mise au point de nouvelles thérapeutiques adjuvantes permettant notamment de traiter ou de prévenir la survenue des lésions tissulaires induites par la séquence ischémie-reperfusion. Le syndrome d’ischémie intestinale aiguë, stade de début où les lésions intestinales sont encore réversibles, réunit les conditions pour un pronostic beaucoup plus favorable mais ne représente encore qu’une trop faible proportion des patients. Il incite à une stratégie diagnostique agressive permettant un diagnostic beaucoup plus précoce et donc une amélioration du pronostic vital.
L’ensemble de cette stratégie diagnostique et thérapeutique ne se conçoit que dans le cadre d’une prise en charge multidisciplinaire réalisée à proximité immédiate d’un plateau technique complet.

Points importants
1. L’ischémie mésentérique est une urgence médicochirurgicale dont la prise en charge multidisciplinaire associe au mieux les radiologues, les anesthésistes-réanimateurs et les chirurgiens.
2. La vascularisation mésentérique combine deux systèmes circulatoires :
- un système macrocirculatoire composé par un réseau anastomotique riche, permettant de limiter les conséquences d’une occlusion artérielles sélective ;
- une microcirculation villositaire qui, pour faciliter l’absorption des nutriments, se fait à contre-courant, et favorise l’ischémie de la muqueuse digestive lors d’un bas débit.
3. Les lésions de perforation du tube digestif apparaissent après un laps de temps court, estimé à 6 heures, justifiant une prise en charge urgente.
4. L’étiologie le plus souvent retrouvée est l’embolie artérielle.
L’ischémie colique après chirurgie de l’aorte est une complication rare mais dont le pronostic reste réservé.
5. Le diagnostic en est difficile et ne doit pas être posé au stade tardif de nécrose digestive et de péritonite. La clinique n’apporte aucun élément spécifique, imposant la réalisation d’examens complémentaires qui orientent le diagnostic : l’artériographie mésentérique sélective avant tout, l’angioscanner quand une thrombose veineuse est suspectée et la coloscopie pour les ischémies coliques.
6. Les marqueurs biologiques sont peu contributifs à ce jour. Le développement de marqueurs précoces de l’ischémie mésentérique sont encore du domaine de la recherche.
7. La séquence ischémie-reperfusion mésentérique est une des explications proposées dans la genèse et/ou l’entretien des défaillances multiviscérales, notamment par l’activation des PNN.
8. Le traitement fait appel à la mise en oeuvre concomitante d’une réanimation symptomatique et de techniques de revascularisation endoluminale mécanique ou pharmacologique associées ou non à une revascularisation chirurgicale.

Références
[1] Amato MB, Barbas CS, Medeiros DM, Magaldi RB, Schettino GP, Lorenzi-Filho G et al. Effect of a protectiveventilation strategy on mortality in the acute respiratory distress syndrome. N Engl J Med 1998 ; 338 : 347-354
[2] Aranow JS, Fink MP. Determinants of intestinal barrier failure in critical illness. Br J Anaesth 1996 ; 77 : 71-81
[3] BassiounyHS.Nonocclusivemesenteric ischemia.Surg Clin North Am 1997 ; 77 : 317-326
[4] Bast TJ, Van Der Biezen JJ, Schrepenisse J, Eikelboom BC. Ischaemic disease of the colon and rectum after surgery for abdominal aortic aneurysm: A prospective study of the incidenceandrisk factors. Eur J Vasc Surg1990;4:253-257
[5] Berger R, Adams L. Nutritional support in the critical care setting. Chest 1989 ; 96 : 139-150
[6] Biffl WL, Moore EE. Splanchnic ischemia/reperfusion and multiple organ failure. Br J Anaesth 1996 ; 77 : 59-70
[7] Björk M, Bergqvist D, Troëng T. Incidence and clinical presentation of bowel ischemia after aortoiliac surgery -2930 operations from a population- based registry in Sweden. Eur J Vasc Endovasc Surg 1996 ; 12 : 139-144
[8] BjörkM,HedbergB. Early detection ofmajorcomplications after abdominal aortic surgery: predictive value of sigmoid colon and gastric intramucosal pH monitoring. Br J Surg 1994; 81 : 25-30
[9] Björk M, Troëng T, Bergqvist D. Risk factors for intestinal ischemia after aortoiliac surgery: a combined cohort casecontrol study of 2824 operations. Eur J Vasc Endovasc Surg 1997 ; 13 : 531-539
[10] Boley S, Brandt L, Veith F, Veith FJ, Kosches D, Sales C. A newprovocative test for chronic mesenteric ischemia.AmJ Gastroenterol 1991 ; 86 : 888-891
[11] Bower TC, Gloviczki P. Non-invasive diagnosis of intestinal ischemia. In : Barret A éd. Artériopathies digestives. Enseignementpost- universitaire.95econgrèsfrancaisdechirurgie, Paris, 1993 : 31-36
[12] Bradbury AW, Brittenden J, MacBride K, Ruckley CV. Mesenteric ischaemia: a multidisciplinary approach. Br J Surg 1995 ; 82 : 1446-1459
[13] Brech FR. Celiac artery compression syndrome. Surg Clin North Am 1997 ; 77 : 409-424
[14] Brunet C, Sielezne FFI, Thirion X, Thomas P, Berthet B, Rosset E. Infarctus mésentérique : critères diagnostiques et prédictifs de gravité. Incidences thérapeutiques. Étude prospective multifactorielle d’une série de61cas. Chirurgie 1996 ; 121 : 96-100
[15] Bulkley GB, Zuidema GD, Hamilton SR, O’Mara CS, Klacsmann PG, Horn SD. Intra-operative determination of small intestinal viability following ischemic injury. Ann Surg 1981 ; 193 : 628-637
[16] Christman JW, McCain RW. A sensible approach to the nutritional support of mechanically ventilated critically ill patients. Intensive Care Med 1993 ; 19 : 129-136
[17] Clavien PA. Diagnosis and management of mesenteric infarction. Br J Surg 1990 ; 77 : 601-603
[18] Clavien PA, Muller C, Harder F. Treatment of mesenteric infarction. Br J Surg 1987 ; 74 : 500-503
[19] Cohen Solal JL, Hajj G, Damien G. Ischémie aiguë artérielle mésentérique. J Chir 1993 ; 130 : 465-466
[20] Croft RJ, Menon GP, Marston A. Does intestinal angina exist? A critical study of obstructed visceral artery. Br J Surg 1981 ; 68 : 316-318
[21] Deitch EA. Multiple organ failure. Ann Surg 1992 ; 216 : 117-134
[22] Ducerf C, Adeleine P. L’ischémie intestinale aiguë. Rapport AFC1996.In : Ducerf C, LaurianCéd. Pathologie vasculaire du tube digestif. Paris : Arnette-Blackwell, 1996 : 41-70
[23] FriedMW,MurthyUK,Hassig SR,WooJ, Oates RP. Creatine kinase isoenzymes in the diagnosis of the intestinal infarction. Dig Dis Sci 1991 ; 36 : 1589-1593
[24] Goris RJ, Beokhorst PA, Nuytinck KS. Multiple organ failure: generalized autodestructive inflammation. Arch Surg 1985 ; 120 : 1109-1115
[25] GoudetP,TahanH,SobhA,GougardP,
Bernard A, Viard H. Les infarctus intestinaux.Uneréévaluationdesfacteurspronostiques de mortalité postopératoire. Ann Chir1995 ; 49 : 607-612
[26] GraeberGM,
Cafferty PJ,
ReardonMJ,CurleyCP,Ackerman NB,HarmonJW.Changesinserumtotal creatinephosphokinase (CPK) and its isoenzymes caused by experimental ligation of the superior mesenteric artery. Ann Surg 1981 ; 193 : 499-505
[27] Granger DN, Richardson PD, Kvietys PR, Mortillaro NA. Intestinal blood flow. Gastroenterology1980;78: 837-863
[28] Gunel E, Caglayan O, Caglayan F. Serum D-lactate levels as apredictor of intestinal ischemia-reperfusion injury. Pediatr Surg Int 1998 ; 14 : 59-61
[29] Gutierrez G, Clark C, Brown SD. Effect of dobutamine on oxygen consumption and gastric mucosal pH in septic patients. Am J Respir Crit Care Med 1994 ; 150 : 324-329
[30] Hay JM. Épidémiologie des douleurs abdominales aiguës. Étude prospective de l’ARC et l’AURC. In : Actualités digestives médico-chirurgicales. Paris : Masson, 1990 : 103-107
[31] Ikeda H, SuzukiM,Suzuki Y, KoikeM,Tamura J,TongJ et al. Apoptosis is a majormodeof cell death caused by ischemia andischemia/reperfusion injury to the rat intestinal epithelium. Gut 1998 ; 42 : 530-537
[32] Indebitzi R, Wagner HE, Seiler C, Stinermann P, Gertsch P. Acute mesenteric ischemia. Eur J Surg 1992 ; 158 : 123-126
[33] Kieny R, Cinqualbre J. Les ischémies intestinales aiguës. Paris : Expansion scientifique française, 1979
[34] Kowal-Vern A, McGill V, Gamelli RL. Ischemic necrotic bowel disease in thermal injury. Arch Surg 1997 ; 132 : 440-443
[35] Krupski WC, Selzman CH, Whitehill TA. Unusual causes of mesenteric ischemia. Surg Clin North Am 1997 ; 77 : 471-502
[36] Lacombe M. Insuffisance artérielle chronique du territoire mésentérique. Encycl Méd Chir (Éditions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris). 9-047-A-20, Gastroentérologie 1997 : 1-8
[37] Landow L, Andersen LW. Splanchnic ischemia and its role inmultipleorganfailure.Acta AnaesthesiolScand1994;38: 626-639
[38] Levy B, Bollaert PE, Charpentier C, Lucchelli JP, Sadoune LO, Nace L et al. Dobutamine improves the adequacy of gastric mucosal perfusion in epinephrine treated septic shock. Crit Care Med 1997 ; 25 : 1649-1654
[39] Levy B, Bollaert PE, Charpentier C, Nace L, Audibert G, Bauer P et al.Comparison of norepinephrineand dobutamineto
epinephrine forhemodynamics,lactatemetabolism, andgastrictonometricvariables in septic shock.Intensive Care Med 1997 ; 23 : 282-287
[40] Lund N, De Asla RJ, Cladis F. Dopexamine hydrochloride in septic shock: effects on oxygen delivery and oxygenation of gut, liver and muscle. J Trauma 1995 ; 38 : 767-775
[41] Marik PE, Mohedin J. The contrasting effects of dopamine and norepinephrine on systemic and splanchnic oxygen utilization in hyperdynamic sepsis. JAMA 1994 ; 272 : 1354-1357
[42] Maynard ND, Bihari DJ, Dalton RN. Increasing splanchnic blood flow in the critical ill. Chest 1997 ; 108 : 1648-1654
[43] Meier-Hellmann A, Reinhart K. Influence of catecholamines on regional perfusion and tissue oxygenation in septic shock patients. In : Reinhart K, Eyrich K, Sprung C eds. Sepsis. Current perspectives in pathophysiology and therapy. Berlin : Springer-Verlag, 1994 ; 274-291
[44] Meier-Hellmann A, Reinhart K, Bredle DL. Epinephrine impairs splanchnic perfusion in septic shock. Crit Care Med 1997 ; 25 : 399-404
[45] MeissnerMH
,JohansenKH.Coloninfarction afterruptured abdominalaorticaneurysm.ArchSurg1992;127:979-985
[46] Moneta GL, Taylor DC, Helton WS, Mulholland MW, Strandness DE. Duplex ultrasound measurment of postprandial intestinal blood flow:
effect of meal composition. Gastroenterology 1988 ; 95 : 1294-1301
[47] Moore SW. Resection of the abdominal aorta with defect replaced by homologous graft. Surg Gynecol Obstet 1954 ; 99 : 745-755
[48] Murray MJ, Gonze MD, Nowak LR, Cobb CF. Serum D-Lactate levels as an aid to diagnosing acute intestinal ischemia. Am J Surg 1994 ; 167 : 575-578
[49] Nathan N, Wintringer P, Bregeon Y, Cassat C, Leblanche A, BoulangerJP et al.Thrombolyseintra-artérielled’uneischémie aiguë mésentérique. Ann Fr Anesth Réanim 1995 ; 14 : 33-36
[50] Nevière R, Mathieu D, Chagnon JL, Lebleu N, Wattel F. The contrasting effects of dobutamine and dopamine on gastric mucosal perfusion in septicpatients.AmJ Respir Crit Care Med 1996 ; 154 : 1684-1688
[51] Nicoloff AD, WilliamsonWK,Moneta GL, Taylor LM, Porter JM. Dupplex ultrasonography in evaluation of splanchnic artery stenosis. Surg Clin North Am 1997 ; 77 : 339-354
[52] Parks DA, Granger DN. Contributions of ischemia and reperfusion tomucosallesion formation.AmJ Physiol1986; 250 : G749-G753
[53] ReillyPM,BulkleyGB.Vasoactivemediatorsandsplanchnic perfusion. Crit Care Med 1993 ; 21 (suppl) : S55-S68
[54] Reinelt H, Radermacher P, Fischer G. Effects of a dobutamine-induced increase in splanchnic bloodflowon hepatic metabolic activity in patients in septic shock. Anesthesiology 1997 ; 86 : 818-824
[55] Reys P, Doerfler JP. Tactiques et techniques chirurgicales devant un infarctus mésentérique. Encycl Méd Chir (Éditions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales-Chirurgie vasculaire, 43-105, Techniques chirurgicales-Appareil digestif, 40-492, 1995 : 1-18
[56] Rhee RY, Glovicczki P. Mesenteric venous thrombosis. Surg Clin North Am 1997 ; 77 : 327-338
[57] RuokonenE, Takala J, Kari A,SaxenH, Mertsola J,HansenEJ. Regional blood flow and oxygen transport in septic shock. Crit Care Med 1993 ; 21 : 1296-1303
[58] Rusch BF, Sori AJ, Murphy TF, Smith S, Flanagan JJ, Machiedo GW. Endotoxemia and bacteremia during hemorrhagic shock. The link between trauma and sepsis? Ann Surg 1988 ; 207 : 549-554
[59] Schmutz G, Mathieu D, Batelier J, Regent D, Bruel JM, Bret P. Pathologie ischémique de l’intestin grêle et du côlon. EncyclMédChir (Éditions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris), 33-340-D-10, Radiodiagnostic-Appareil digestif, 1989 : 1-18
[60] Sitges-Serra A,MasX, Roqueta F, Figueras J, Sanz F. Mesenteric infarction: an analysis of 83 patients with prognosic studies in 44 cases undergoing a massive small-bowel resection. Br J Surg 1988 ; 75 : 544-548
[61] Takala J. Determinants of splanchnic blood flow. Br J Anaesth 1996 ; 77 : 50-58
[62] Tamion F, Richard V, Lyoumi S, Daveau M, Beaumarchand G, Leroy J et al. Gut ischemia and mesenteric synthesis of inflammatory cytokines after hemorrhagic or endotoxic shock. Am J Physiol 1997 ; 273 : G314-G321
[63] Taylor LM, Moneta LM. L’ischémie intestinale. Ann Chir Vasc 1991 ; 5 : 403-406
[64] TemesRT,KautenRJ,SchwartzMZ.Nuclearmagneticresonance as a non invasive method of diagnosing intestinal ischemia: technique and preliminary results. J Pediatr Surg 1991 ; 26 : 775-779
[65] Vallet B, Lebuffe G. The role of the gut in multiple organ failure. In : Vincent JL ed. Yearbook of intensive care and emergency medecine. Berlin : Springer-Verlag, 1999 : 539-546
[66] Van Deinse WH, Zawacki JK, Phillips D. Treatment of acute mesenteric ischemia by percutaneous transluminal angioplasty. Gastroenterology 1986 ; 91 : 475-478
[67] Vujic I, Stanley J, Gobien RP. Treatment of acute embolus of the superior mesenteric artery by topical infusion of streptokinase. Cardiovasc Intervent Radiol 1984 ; 7 : 94-96
[68] Williams LF. Mesenteric ischemia. The acute abdomen. Surg Clin North Am 1988 ; 68 : 331-353
[69] Zhang H,
Smail N,
Cabral A,
Rogiers P,
Vincent JL.
Effects of norepinephrineonregionalbloodflowandoxygenextraction capabilities during endotoxic shock. Am J Respir Crit Care Med 1997 ; 155 : 1965-1971
[70] Zimmerman BJ, Granger DN. Reperfusion injury. Surg Clin North Am 1992 ; 72 : 65-83

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire