Biologie
Dans les péritonites extrahospitalières, les examens biologiques sont essentiellement utilisés pour évaluer le retentissement de l’infection. Chez les patients âgés, la fréquence de leucopénie (< 2000/mm3) paraît accrue par rapport aux sujets jeunes. [28] Dans les infections nosocomiales et postopératoires, les examens biologiques sont généralement décevants. Ainsi, une hyperleucocytose (> 12000/mm3) n’est observée que dans 60 % des cas de péritonite postopératoire, [34] mais ce signe est banal en postopératoire. Les autres examens biologiques ne permettent en général pas de s’orienter vers le diagnostic avant le stade de défaillance viscérale. Le bilan biologique permet d’évaluer les besoins de réanimation et est utilisé comme bilan préopératoire.
Enfin, la mesure des concentrations de certains marqueurs de l’inflammation (protéine C réactive, procalcitonine...) a été proposée comme élément du diagnostic par certains auteurs.
Ces éléments sont pour l’instant l’objet d’évaluation en clinique.
Iconographie
Dans les infections extrahospitalières, le cliché d’abdomen sans préparation (ASP), l’échographie abdominale et/ou la tomodensitométrie confirment le diagnostic et orientent le geste opératoire. La tomodensitométrie est généralement réservée aux situations complexes ou en cas de doute diagnostique. Dans les formes sévères, la tomodensitométrie ne doit être envisagée que si l’examen ne retarde pas l’intervention.
Dans les infections nosocomiales ou postopératoires, l’ASP est d’une rentabilité faible, concordant avec la clinique dans seulement 15 à 50 % des cas. [39] La recherche de collections ou d’abcès intra-abdominaux (sous-phréniques, pariétocoliques, culde- sac de Douglas) est le principal objet de l’échographie abdominale et de la tomodensitométrie (Tableau 3, Fig. 2). Dans le contexte d’une infection postopératoire, ces examens peuvent guider la décision opératoire, par exemple en cas d’augmentation de volume d’une collection. Un examen échographique ou tomodensitométrique « normal » n’élimine pas pour autant le diagnostic. De manière à documenter une perforation digestive inapparente à l’échographie ou à la tomodensitométrie, les auteurs proposent le recours à des examens radiographiques digestifs avec un produit de contraste non baryté (gastrografine) à la recherche d’une fuite extraluminale. Cependant, les résultats de cette opacification n’ont de valeur que lorsqu’ils identifient l’extravasation du produit de contraste. En cas de suspicion d’une complication postopératoire dans les 3 premiers jours après une intervention de chirurgie digestive, la décision de reprise chirurgicale peut être prise sans iconographie devant un tableau clinique de dégradation inexpliquée. [40] Au-delà du 3e jour, la reprise doit être encadrée par des examens iconographiques, au premier chef desquels la tomodensitométrie. [40]
Particularités microbiologiques
Les examens habituellement pratiqués sont les hémocultures et la culture de liquide péritonéal prélevé pendant l’intervention. [41]Une à deux hémocultures sont prélevées avant la mise en route de l’antibiothérapie.
Les péritonites sont rarement bactériémiques, des hémocultures positives n’étant rapportées que pour 10 à 15 % des patients. [10, 12] Dans les infections postopératoires, une bactériémie à germes « digestifs » peut être un élément d’orientation vers le diagnostic. [33]
Les prélèvements microbiologiques du liquide péritonéal sont indispensables à double titre : ils permettent d’une part d’adapter précisément le traitement antibiotique, et d’autre part ils permettent d’obtenir un reflet épidémiologique de la flore digestive des patients. [41] Les prélèvements du liquide péritonéal imposent de limiter tout contact avec l’air pour préserver la croissance des anaérobies.
L’échantillon doit être placé dans un milieu de transport pour anaérobie. Un examen microscopique direct et une mise en culture à la recherche des bactériesaérobies et anaérobies strictes et de levures avec réalisation d’un antibiogramme doivent être effectués.La sélection de l’antibiothérapie probabiliste est orientée par l’examen direct du liquide péritonéal, puis le traitement est adapté secondairement en fonction des résultats de l’antibiogramme. [41]
Chez les patients opérés et ayant bénéficié d’un drainage externe (lame, drain), il est inutile de mettre en culture les drainages ouverts car leurs résultats sont très difficiles à interpréter. [41] Il est impossible de faire la part entre la flore cutanée, la flore de l’environnement et les germes issus du drainage proprement dit.
Infections communautaires
La microbiologie des infections intra-abdominales communautaires est bien connue.Il s’agit le plus souvent d’infectionspolymicrobiennes impliquant des germes aérobies (entérobactéries, streptocoques et entérocoques)
et des germes anaérobies (Bacteroides, Fusobacterium, Clostridium etc.) (Tableau 5). D’autres bacilles à Gram négatif peuvent également être retrouvés dans 5 à 10 % des prélèvements tels que Pseudomonas aeruginosa ou Enterobacter spp., surtout après une antibiothérapie. [42]
Infections nosocomiales
Les études épidémiologiques ont le plus souvent regroupé les patients atteints d’infection nosocomiale et d’infection postopératoire, partant du principe que la flore intestinale était modifiée chez le patient hospitalisé ou soumis à une antibiothérapie depuis plusieurs jours. Dans une étude récente comparant près de 250 patients atteints d’une infection nosocomiale et 750 patients atteints d’une infection communautaire, nous avons montré une similitude dans les populations bactériennes isolées, tant en type de bactéries qu’en profil de sensibilité. [43]
Infections postopératoires
Dans les péritonites postopératoires, l’écologie microbienne est modifiée.
Ainsi, des espèces bactériennes comme Pseudomonas aeruginosa, Enterobacter spp., entérocoques multirésistants et Candida spp.
peuvent être retrouvées avec une fréquence accrue. De même, des souches telles que Enterobacter, Serratia, Citrobacter, Morganella, Acinetobacter et Pseudomonas peuvent être mises en évidence. [10-12]
Ces souches sont généralement résistantes aux antibiotiques habituels à l’exception des carbapénèmes et du céfépime.
Il est à noter la fréquence accrue des infections à Staphylococcus aureus résistantes à la méticilline. [12]Sawyer confirme ces résultats et ne retrouve, chez des patients de réanimation en état septique majeur, que 17 % de Escherichia coli et 7 % de Bacteroides fragilis. [44] Les infections monomicrobiennes (entérocoques, Candida, staphylocoques à coagulase négative) sont plus rares.
Infections tertiaires
Lors de reprises chirurgicales de patients atteints de formes tertiaires, soit les prélèvements microbiologiques sont stériles, soit leurs cultures ne conduisent qu’à l’identification de germes considérés comme peu pathogènes (entérocoques, staphylocoques à coagulase négative, Candida, etc.). [2, 45]
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