Anesthésie pour endoscopie digestive






Taysir Assistance.TNFrédérique Servin : Praticien hospitalier, service d’anesthésie-réanimation chirurgicale, hôpital Bichat, 46, rue Henri-Huchard, 75877 Paris cedex 18, France.




Résumé. – La réalisation d’endoscopies digestives (oeso-gastro-duodénoscopies, endoscopies des voies biliaires, coloscopies) requiert fréquemment, mais pas toujours, une anesthésie qui doit respecter des règles de sécurité clairement définies pour assurer l’obligation de résultats que l’on est en droit d’attendre d’actes le plus souvent diagnostiques et ambulatoires. Deux agents principaux se partagent actuellement les faveurs des praticiens : le midazolam et le propofol. Le risque de somnolence résiduelle après des doses importantes ou répétées de benzodiazépines amène à potentialiser, si nécessaire, la sédation par l’administration titrée de morphiniques de durée d’action brève. En dehors de cas particuliers, le contrôle des voies aériennes n’est pas indispensable, mais le risque principal est la dépression respiratoire, source d’hypoxémie et de troubles cardiaques, qui est dépistée par une surveillance clinique attentive, et tardivement par l’oxymétrie de pouls.
L’administration d’oxygène s’impose souvent.

Mots-clés : endoscopie digestive, coloscopie, sédation, revue générale. Position de la question

ENDOSCOPIES DIGESTIVES EN FRANCE EN 1999
L’enquête « 3 jours » d’anesthésie en France [44] a montré que les endoscopies digestives représentaient en nombre d’actes 15 % de l’ensemble des actes d’anesthésie en France, soit plus de 1 million d’anesthésies, ce qui justifie l’intérêt qu’elles suscitent, joint au fait que ces anesthésies présentent quelques spécificités. Si la plupart des endoscopies basses se font actuellement en présence d’un anesthésiste, cette présence est très variable pour les actes d’endoscopies hautes. La très grande majorité des endoscopies hautes sont des actes diagnostiques ou thérapeutiques (sclérose de varices oesophagiennes), simples et de courte durée, et peuvent être pratiquées sans anesthésie, alors que les cholangiopancréatographies rétrogrades ou les échoendoscopies requièrent une anesthésie.





QU’ATTEND-ON DE L’ANESTHÉSISTE ?

L’endoscopie digestive, qu’elle soit diagnostique ou thérapeutique, haute ou basse, est un acte vécu comme désagréable par les patients qui l’envisagent souvent avec appréhension, ce d’autant qu’il peut être appelé à se répéter. Cette appréhension va entraîner une exacerbation du vécu douloureux, facteur d’agitation, et qui peut rendre l’acte techniquement très difficile. L’anesthésiste est donc sollicité par l’endoscopiste qui espère un patient calme et coopérant, voire immobile, ou par le patient qui souhaite ne garder aucun souvenir de cet épisode. Aucun de ces intervenants ne se préoccupe réellement des conséquences inéluctables de l’acte anesthésique, qu’il s’agisse de la dépression respiratoire, du nécessaire contrôle des voies aériennes, ou de la sédation résiduelle, mais ces conséquences vont en fait constituer les bases de la discussion sur la nécessité d’une sédation médicamenteuse et la profondeur souhaitable de l’anesthésie. En effet, très souvent, on n’attend pas de l’anesthésiste une « vraie anesthésie », inquiétante par son cortège fantasmatique de dangers, mais une « sédation », rassurante car de tonalité plus « écologique ». Qu’en est-il en fait ? Comme le fait fort justement remarquer Wansbrough [66] : « L’utilisation imprécise de termes techniques dans la littérature médicale peut engendrer des malentendus qui ont des conséquences délétères dans la pratique de notre profession. L’usage du terme « sédation » dans la littérature anesthésique s’est tellement banalisé qu’il est devenu du jargon. »

En fait, ce terme cherche à définir un état de calme et d’indifférence à l’environnement, obtenu le plus souvent par des moyens pharmacologiques et qui n’auraient pas sur la ventilation et la protection des voies aériennes les effets délétères de l’anesthésie, puisque aussi bien le passage de la sédation vers l’anesthésie profonde est défini par les mesures d’assistance ventilatoire et de protection des voies aériennes. Les anesthésistes n’étant le plus souvent pas sollicités pour assurer l’hypnose ou la sophrologie, il leur faut assurer la « sédation » par l’administration de benzodiazépines ou d’anesthésiques généraux à doses « sédatives », associés ou non à des analgésiques centraux. L’étude de la pharmacologie de ces agents nous montre hélas qu’aujourd’hui la sédation sans dépression respiratoire est une chimère et qu’il va falloir composer avec les effets indésirables de ces agents pour définir le compromis le moins dangereux. C’est en cela que la sédation pharmacologique est bien un acte d’anesthésie.

L’ANESTHÉSIE PEUT-ELLE TOUJOURS ÊTRE RÉALISÉE EN AMBULATOIRE ?
A priori, l’endoscopie digestive est un acte ambulatoire. Elle peut être pratiquée sur des patients hospitalisés dans des services de médecine. La prudence veut que l’on exige dans ce cas un niveau de récupération complète à la sortie de salle de réveil et avant le retour dans un service d’origine où le patient est confié à un personnel peu habitué à la surveillance de sujets qui viennent d’être anesthésiés.

Cet « à priori » n’est cependant pas un dogme, et dans certains cas, une hospitalisation la nuit précédant l’endoscopie ou la nuit qui la suit, voire les deux, est indispensable. Le plus souvent, cette situation peut être prévue.

L’acte est incompatible avec la sortie rapide
C’est le cas de certaines endoscopies interventionnelles : résection de volumineux polypes, endoscopies interventionnelles sur les voies biliaires...
Ces situations, où la décision d’hospitalisation est du ressort de l’endoscopiste, ne sont en général pas génératrices de conflits.

L’état du patient ne permet pas un acte ambulatoire
Dans ce cas, la discussion peut être plus délicate et l’anesthésiste, qui reste seul juge, peut chercher le secours de référentiels pour étayer sa décision. L’éligibilité d’un patient à l’anesthésie ambulatoire dépend de critères évolutifs selon les habitudes locales ou nationales et l’expérience de la structure d’accueil.
Les recommandations de la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) concernant l’anesthésie ambulatoire [61] précisent que la sélection des patients obéit aux critères sociaux et médicaux suivants.
– Critères sociaux.
– Compréhension suffisante de ce qui est proposé.
– Aptitude à observer les prescriptions médicales.
– Conditions d’hygiène et de logement au moins équivalentes à celles qu’offre une hospitalisation.
– Disponibilité d’une personne, responsable et valide, pour raccompagner le patient et rester la nuit suivante auprès de lui.
– Éloignement de moins de 1 heure d’une structure de soins adaptée à l’acte.
– Accès rapide à un téléphone.
– Critères médicaux.
– L’anesthésie du patient ambulatoire s’adresse préférentiellement à des sujets ASA 1 ou 2.
– Des patients ASA 3 peuvent être acceptés, sous certaines réserves :
– pathologie stabilisée sous traitement adapté ;
– interférence de l’intervention, avec la pathologie ou son traitement, considérée comme négligeable ;
– accord préalable entre anesthésiste et endoscopiste. Enfin, seul l’anesthésiste peut autoriser la sortie de la salle de surveillance postinterventionnelle (SSPI). L’autorisation de départ au domicile peut être donnée, soit par l’anesthésiste, soit par l’endoscopiste, mais un accord préalable doit être conclu. Cette décision est prise après vérification de l’aptitude du patient à rejoindre son domicile, et un document comprenant les instructions postopératoires et les prescriptions, ainsi que les noms des médecins (anesthésiste et endoscopiste) et le numéro de téléphone accessible pendant la nuit suivante est remis, après explications, au patient ou à la personne qui l’accompagne.

En Amérique du Nord, où les actes ambulatoires sont beaucoup plus fréquents qu’en France, les critères pour récuser le caractère ambulatoire d’un acte ont également été précisés [6].
– Critères sociaux.
Outre des critères proches de ceux de la SFAR, le refus du patient est ici explicitement noté.
– Critères médicaux.
– Patients ASA 3 ou ASA 4 instables.
– Risque reconnu d’hyperthermie maligne.
– Traitement par les inhibiteurs de la mono-amine-oxydase (IMAO).
– Obésité morbide et/ou syndrome d’apnées du sommeil.
– Toxicomanie.
On voit bien que toutes les situations n’ont pu être imaginées dans ces recommandations et que parfois une décision de bon sens dans une ambiance sereine peut seule apporter au patient une prestation optimale.

Enfin, une difficulté inattendue ou une complication pendant ou au décours de l’acte d’endoscopie ou d’anesthésie peut remettre en question son caractère ambulatoire. Le patient aura été dûment informé au préalable de cette éventualité, qui entraîne une hospitalisation non programmée.


Fibroscopies oeso-gastro-duodénales


L’ANESTHÉSIE EST-ELLE NÉCESSAIRE ?
En dehors des échoendoscopies, de la cholangiographie rétrograde et de certaines endoscopies interventionnelles, les rares indications « médicales » de l’anesthésie pour endoscopie haute concernent des patients pour lesquels aucune coopération n’est possible du fait, soit de perturbations des fonctions supérieures, soit d’une anxiété pathologique. Le plus souvent, l’indication de l’anesthésie est portée par le gastroentérologue [64] qui veut éviter que l’endoscopie diagnostique haute soit rendue techniquement difficile, incomplète, voire impossible, par l’appréhension du patient devant un acte vécu comme désagréable, parfois même insupportable. Cette position médicale « a priori » explique les différences majeures dans la fréquence de la sédation d’un pays à l’autre, de plus de 90 % en Grande-Bretagne [25] ou aux États-Unis [7], à moins de 10 % dans d’autres pays. Avec un taux de 37 % [55], la France se situe à un niveau intermédiaire.

La tolérance à l’endoscopie haute est très variable. Certains patients tolèrent parfaitement cet examen, et dans l’enquête nationale réalisée en 1996, 77 % des patients qui n’avaient pas reçu de sédation étaient prêts à subir de nouveau l’examen dans les mêmes conditions [54].

Dans certains cas cependant, l’endoscopie n’est acceptée et possible qu’avec une anesthésie. Dans l’enquête française [54], 21 % des patients qui n’avaient reçu aucune sédation refusaient de refaire l’examen dans les mêmes conditions. Ce chiffre ne donne qu’une valeur indicative car les patients concernés étaient inclus par le gastroentérologue dans un sous-groupe de patients pour lesquels la sédation n’avait pas été jugée utile, sans qu’eux-mêmes aient le plus souvent exprimé une opinion.

Existe-t-il des facteurs prédictifs d’intolérance sur lesquels l’indication appropriée d’une sédation pourrait être fondée ? Le jeune âge, le sexe féminin, la consommation chronique de sédatifs ou de tabac sont autant de facteurs associés à une moins bonne tolérance [32]. La pertinence de ces critères n’a cependant pas été évaluée de façon prospective. Il semble d’autre part y avoir une bonne relation entre le réflexe de vomissements et la tolérance de l’examen [16]. L’apparition d’endoscopes plus fins, passés par le nez et non par la bouche, semble pouvoir améliorer la tolérance à la fibroscopie gastrique [9, 17]. L’ambiance dans la salle d’endoscopie (bruit, musique...) ne semble pas influencer la tolérance à l’examen, ni le degré d’anxiété du patient [63]. Il faut enfin souligner qu’intolérance à l’examen ne signifie pas obligatoirement acceptation d’une anesthésie avec ses contraintes (déplacement supplémentaire pour la consultation préanesthésique, interdiction de conduire, nécessité d’être accompagné, arrêt de travail).

En pratique, le moyen le plus pertinent et sûrement le plus éthique est certainement de laisser le malade choisir après l’avoir informé des avantages et des inconvénients de chaque possibilité. Cann [18] a montré que lorsque l’on laissait choisir les modalités d’examen aux patients, les taux d’acceptation de l’acte étaient très élevés. Dans son travail, 36 % des patients optaient d’emblée pour une sédation, et parmi les 64 % qui n’avaient pas choisi de sédation, plus de 90 % étaient prêts à refaire l’examen dans les mêmes conditions, ce qui, au total, leur permettait d’obtenir un taux de satisfaction de 93,6 %.

Si l’on prend comme référence cette approche, on peut raisonnablement estimer que la demande de sédation pour une endoscopie haute devrait se situer aux environs de 42 %.

Enfin, dans certaines situations, l’anesthésie telle qu’elle est habituellement pratiquée au cours des endoscopies digestives hautes, c’est-à-dire l’administration intraveineuse d’une benzodiazépine ou de propofol sans contrôle des voies aériennes, mais sans rechercher à proprement parler la perte de connaissance, peut être dangereuse. C’est le cas en particulier des fibroscopies gastriques en urgence pour bilan diagnostique d’une hématémèse.

La fréquence des inhalations de sang lors d’hématémèses actives sévères peut atteindre 25 % [45]. Les agents sédatifs administrés au cours de ces endoscopies ont tous un effet dépressif sur les réflexes glottiques, et de ce fait leur usage augmente le risque d’inhalation.

Dans ce contexte, le recours à une anesthésie, s’il est nécessaire du fait du manque de coopération du patient, implique une intubation endotrachéale. Il est à noter par ailleurs que l’hypoxémie est fréquente au cours des endoscopies hautes pratiquées en urgence, même en l’absence de toute sédation [71].

QUELS SONT LES IMPÉRATIFS DE L’ANESTHÉSIE ?
Dès lors qu’un médecin anesthésiste est sollicité pour participer à l’activité d’endoscopie digestive, les modalités de l’anesthésie doivent clairement suivre le décret du 5 décembre 1994, ainsi que les recommandations de la SFAR concernant l’anesthésie du patient ambulatoire [4, 61].

Ceci signifie d’abord que le patient doit bénéficier d’une consultation préanesthésique « plusieurs jours avant l’examen », complétée dans les heures qui précèdent l’acte d’une visite préanesthésique. La fibroscopie oeso-gastro-duodénale ne justifie pas en elle-même d’examens complémentaires spécifiques. L’anesthésiste saura se méfier des pathologies susceptibles d’induire des désordres hydroélectrolytiques ou une hypovolémie (sténose du pylore, dysphagies...). L’incidence de la cirrhose est importante et les troubles de l’hémostase qui l’accompagnent doivent rendre prudents lors de l’oxygénothérapie par voie nasale, et être signalés à l’endoscopiste car ils contre-indiquent pratiquement les biopsies.

Chaque fois que possible, en particulier si une biopsie est envisagée, il faut tenter d’améliorer l’hémostase de ces patients.
L’existence de troubles de l’oxygénation artérielle au cours des endoscopies digestives hautes est bien documentée [1, 24, 28, 32, 37, 53]. Elle est à l’origine de la plupart des troubles du rythme cardiaque qui ont été décrits au cours de cet examen [43, 53, 70], et même des accidents graves incluant la mort décrits dans une enquête anglaise de 1995 [13].
Elle est le plus souvent attribuée à l’obstruction du pharynx par l’endoscope, et semble d’autant plus fréquente que celui-ci est de calibre important [24, 43]. L’apparition des échoendoscopes a remis d’actualité ce risque qui avait été minimisé par la diminution du calibre des endoscopes traditionnels. Des études chez l’animal ont par ailleurs montré que des troubles de la mécanique diaphragmatique apparaissent lors d’une distension de l’oesophage [27]. Ainsi, le mécanisme de la dépression respiratoire au cours des endoscopies digestives hautes n’est-il peut-être pas univoque. Par ailleurs, l’application pharyngée d’un anesthésique local peut entraîner une hypotonie des muscles de la région qui persiste après la fin de l’examen, et contribuer à l’obstruction des voies aériennes [46]. Les benzodiazépines, et en particulier le midazolam, ont des effets myorelaxants, et leur administration entraîne un relâchement des structures pharyngolaryngées, à l’origine d’apnées obstructives de survenue plus tardive que celle des apnées de type central, contemporaines du pic d’action du produit [48]. Il n’est donc pas conseillé d’associer l’application pharyngée d’un anesthésique local à l’administration d’une benzodiazépine [19].

L’administration intraveineuse de benzodiazépines, de même que celle des agents anesthésiques intraveineux, entraîne une dépression respiratoire [2, 30]. Au cours des endoscopies hautes, le recours à l’administration de midazolam entraîne une désaturation artérielle en oxygène plus importante que lorsque aucun agent n’est utilisé [11, 53]. Les sujets âgés, dont la sensibilité aux benzodiazépines est par ailleurs accrue, semblent particulièrement exposés à cette complication [28, 38]. De même, l’administration de midazolam peut aggraver une encéphalopathie infraclinique fréquente chez le cirrhotique [8].

L’administration d’oxygène par l’intermédiaire d’une sonde nasale permet dans la plupart des cas de corriger l’hypoxémie [10, 51]. Chez les sujets insuffisants respiratoires ou porteurs d’une coronaropathie ou d’une cardiopathie ischémique, de même que chez les sujets âgés et chez les cirrhotiques, il paraît donc souhaitable d’administrer de l’oxygène par voie nasale au cours des endoscopies digestives hautes, et de surveiller de façon continue la saturation artérielle en oxygène. L’oxygène doit être apporté en face de la glotte, soit par une sonde qui franchit les choanes, soit par un ajutage latéral sur le cale-dents. En effet, la mise en place de l’endoscope, en refoulant le palais mou, ferme les choanes et empêche l’oxygène administré par de simples « lunettes » de parvenir à destination.

Ces précautions permettent vraisemblablement de diminuer la fréquence des troubles du rythme parfois sévères et des accidents ischémiques décrits au cours de ces examens.
L’administration d’un agent anesthésique, même en dose unique, impose une surveillance après la fin de l’acte dans une structure conçue pour cet usage, pourvue en matériel adapté et en personnel compétent [4]. Il ne peut en aucun cas s’agir d’une surveillance par un proche du patient dans le couloir d’accès à la salle d’endoscopie.
Les modalités de sortie du patient sont celles de rigueur pour tous les actes d’anesthésie ambulatoire [61] ; en particulier, la sortie du patient, contrôlée par l’anesthésiste, requiert un accompagnant responsable.

QUEL AGENT, À QUELLE DOSE, PAR QUELLE VOIE ?
Les impératifs d’un examen pratiqué le plus souvent en ambulatoire sans accès aux voies aériennes restreignent le choix aux benzodiazépines et aux agents anesthésiques intraveineux d’action rapide et brève. En fait, dans la littérature, deux produits se partagent la faveur des auteurs : le midazolam et le propofol [14, 57].
La dose de midazolam suffisante pour permettre à l’endoscopie de se dérouler dans le calme est variable selon les individus. Elle peut être très faible, de 0,5 à 1 mg en intraveineux. Chez des sujets âgés ou débilités, de telles doses sont susceptibles d’induire des apnées [12]. C’est dire l’intérêt de procéder par titration, en gardant en mémoire le fait qu’avec le midazolam, le maximum de l’action demande plusieurs minutes, et qu’il faut donc attendre suffisamment avant d’injecter une dose supplémentaire. La fin de l’action, après une dose unique de midazolam, se faisant sur la distribution du produit à partir du compartiment central, la récupération complète des fonctions supérieures n’est pas plus courte qu’après une dose unique de diazépam et peut requérir entre 1 et 2 heures [14, 57]. Lorsque l’examen se prolonge (échoendoscopie), une dose unique de midazolam peut être insuffisante, et des réinjections de benzodiazépines font courir le risque d’une sédation résiduelle importante qui empêcherait la sortie. Le protocole anesthésique choisi se rapproche alors de celui proposé pour les endoscopies des voies biliaires (cf infra). Les troubles mnésiques engendrés par les benzodiazépines sont à prendre en considération.

Le propofol a également été préconisé pour l’anesthésie des endoscopies digestives hautes [29, 50], à la dose moyenne de 1 mg/kg.
Il procure un réveil plus rapide et de meilleure qualité que le midazolam [20, 23]. La récupération mnésique est plus rapide avec le propofol qu’avec le midazolam, permettant au patient de retenir plus vite les consignes après l’acte [23]. Le propofol induit une hypoxémie aussi sévère que celle observée avec le midazolam [50].

Quel que soit l’agent retenu, il est important de tenir compte, dans l’estimation des doses nécessaires à l’endoscopie d’un patient donné, des traitements au long cours auxquels ce patient peut être soumis et qui retardent l’élimination et augmentent l’action des agents utilisés pour l’anesthésie. Il s’agit en particulier des antagonistes H2 [58] et du propranolol, par la réduction du débit sanguin hépatique.

SCLÉROSE DE VARICES OESOPHAGIENNES :
QUELQUES SPÉCIFICITÉS
La sclérose de varices oesophagiennes est un acte d’endoscopie interventionnelle le plus souvent pratiqué en urgence ou en semiurgence.
La présence de sang dans l’estomac, associée parfois à une encéphalopathie métabolique débutante, augmente de façon importante le risque d’inhalation. Dans l’immense majorité des cas, la sclérose des varices oesophagiennes se fait en dehors de la présence d’un anesthésiste.

Comme toutes les endoscopies interventionnelles, la sclérose de varices oesophagiennes expose à un risque accru de bactériémies [41, 60] par rapport à l’endoscopie diagnostique. Elle concerne presque toujours des patients cirrhotiques, particulièrement sensibles aux infections streptococciques. Une antibioprophylaxie par l’amoxicilline, éventuellement associée à un inhibiteur des bêtalactamases, peut donc être indiquée, ce d’autant qu’elle correspond bien à la flore commensale du carrefour aérodigestif.

OESOPHAGOSCOPIES SUR TUBE RIGIDE
L’oesophagoscopie sur tube rigide est un geste dangereux car une perforation oesophagienne est toujours à craindre lors d’un spasme ou d’un effort de toux du patient. C’est pourquoi elle exige une anesthésie profonde, associée le plus souvent à une intubation endotrachéale. Cet acte est fréquemment pratiqué au cours de panendoscopies oto-rhino-laryngologiques (ORL). On peut en rapprocher les dilatations oesophagiennes et les insertions de prothèses pour cancer oesophagien inextirpable. Le bilan préopératoire doit dans ces cas comporter une fibroscopie trachéobronchique qui estime l’envahissement de ces structures et, associée à un bilan fonctionnel respiratoire, tente d’évaluer la possibilité d’une extubation, prothèse en place.

GASTROSTOMIES PAR VOIE ENDOSCOPIQUE
L’endoscopie peut être utilisée pour mettre en place une sonde de gastrostomie chez les patients souffrant de troubles de déglutition.
La nécessité d’assurer un niveau « chirurgical » d’anesthésie chez un patient souffrant de tels troubles impose là encore l’intubation endotrachéale. Si celle-ci présente des difficultés techniques majeures (patient opéré ou irradié pour cancer ORL par exemple, et non trachéotomisé), la gastrostomie doit être envisagée dans un environnement favorable, tel le bloc opératoire d’ORL, l’anesthésie étant assurée par un praticien rompu aux techniques d’intubation chez de tels patients. Il s’agit néanmoins de cas peu fréquents : la mise en place d’une gastrostomie concerne le plus souvent des patients dysphagiques chez qui l’endoscopie est impossible.



Cathétérisme rétrograde des voies biliaires et coloscopie 

Cathétérisme rétrograde des voies biliaires 

La cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (CPRE) est une endoscopie haute à la fois diagnostique et thérapeutique qui permet l’opacification des voies biliaires et du canal de Wirsung, la pose de drains nasobiliaires et la mise en place de prothèses biliaires lors des compressions ou sténoses des voies biliaires, ainsi que le traitement de la lithiase de la voie biliaire principale (extraction des calculs, sphinctérotomie) chez les cholécystectomisés, lors d’une pancréatite aiguë biliaire ou d’une angiocholite.

L’ANESTHÉSIE EST-ELLE NÉCESSAIRE ?
Pratiquée le plus souvent en décubitus latéral, voire ventral, sous contrôle radioscopique, la CPRE est un geste délicat qui exige du patient une grande immobilité. C’est la raison pour laquelle une anesthésie est le plus souvent pratiquée, et donne des résultats plus constamment satisfaisants qu’une sédation sans perte de connaissance [31].

L’INTUBATION EST-ELLE TOUJOURS NÉCESSAIRE ?
Les CPRE se font le plus souvent en décubitus ventral ou semiventral et s’il n’intube pas le patient, l’anesthésiste se prive de la surveillance capnographique, et en cas d’apnées ou de désaturation, ne peut pas assister simplement la ventilation au ballon, mais doit d’abord remettre le patient sur le dos. Il semble donc évident, dans ce cas, qu’une intubation endotrachéale s’impose. Néanmoins, dans cette situation, la sonde d’intubation, qu’elle soit nasale ou orale, est sur le trajet de l’endoscope. Or les tentatives de cathétérisme de la papille se traduisent par un mouvement de va-et-vient de l’appareil qui mobilise à tout instant cette sonde, créant une stimulation permanente qui impose des plans d’anesthésie beaucoup plus profonds que ne le voudrait l’endoscopie elle-même, avec ou sans un acte « chirurgical » associé, telle la sphinctérotomie. Par ailleurs, une anesthésie locale de la glotte et de la trachée n’est pas indiquée, car sa durée d’action excède celle de l’acte endoscopique et peut par conséquent induire une dépression prolongée des réflexes glottiques.

De plus, une extubation accidentelle est toujours à craindre. C’est la raison pour laquelle certains anesthésistes préfèrent ne pas intuber ces patients en administrant de l’oxygène par voie nasale ou en ajutage latéral sur le cale-dents de l’endoscope, une technique rendue possible par la surveillance constante de la saturation enoxygène par l’oxymétrie de pouls et l’usage d’agents anesthésiques en perfusion continue pour éviter les bolus générateurs d’apnées. Il faut pourtant avoir vérifié au préalable qu’en cas de nécessité, l’assistance ventilatoire du patient au masque ne présente pas de difficultés particulières. Cette technique, proposée au cas par cas, exige une parfaite coopération entre anesthésiste et endoscopiste.

QUEL PROTOCOLE ANESTHÉSIQUE ?
En cas d’intubation endotrachéale, tous les agents sont à la disposition de l’anesthésiste, et le seul impératif est celui de respecter les règles de l’anesthésie ambulatoire, dans la mesure où, même s’il est hospitalisé, le patient, au sortir de la salle de réveil, retourne fréquemment dans un service de médecine peu rompu à la surveillance des patients après une anesthésie.

Si le patient n’est pas intubé, le choix se restreint en pratique à la diazanalgésie [42] ou à la perfusion continue d’agents intraveineux tel le propofol, dont l’efficacité clinique semble supérieure avec une récupération plus rapide à la fin de l’acte [68]. Le souci premier dans ces situations étant de prévenir les apnées, la perfusion continue à débit variable d’agents anesthésiques, sans injection rapide (bolus) associée, est la plus sûre. Les perfusions à objectif de concentration ont trouvé là une de leurs bonnes indications.

Au cours de la CPRE, de nombreuses équipes utilisent par voie intraveineuse des agents visant à ralentir la motricité intestinale. Si le phloroglucinol (Spasfont) est à peu près inoffensif, il n’en est pas de même du bromure de N-butylhyoscine (Buscopant) qui est un atropinique et a donc les mêmes effets et les mêmes contreindications, en particulier cardiovasculaires, que l’atropine. Le glucagon, quant à lui, est d’abord une hormone hyperglycémiante dont l’usage doit être prudent chez le diabétique. À fortes doses, il a un effet chronotrope et inotrope positif tel qu’il a pu être exploité dans le traitement de certaines défaillances cardiaques majeures.

QUAND RECOURIR AU FLUMAZÉNIL ?
Injecté à la fin de l’examen, le flumazénil diminue significativement la sédation résiduelle chez des patients qui ont reçu du diazépam ou du midazolam [36, 52]. La différence entre patients traités ou non par le flumazénil s’estompe progressivement pour disparaître à la deuxième heure. Certains patients qui avaient reçu du flumazénil se sont même rendormis secondairement chez eux [36]. Ces observations sont en accord avec les données de la littérature, selon lesquelles la durée d’action du flumazénil est inférieure à celle des benzodiazépines qu’il antagonise. L’administration d’une dose unique de flumazénil ne peut donc pas prévenir une récurrence tardive de la sédation, lorsque des doses importantes ou répétées de midazolam ont été employées. Par conséquent, l’existence du flumazénil ne doit pas conduire à une augmentation inconsidéréedes doses au cours des endoscopies difficiles, et son administration systématique n’est pas justifiée et peut même être dangereuse.

Cependant, en cas d’accident de surdosage absolu ou relatif en benzodiazépine pendant l’endoscopie, la présence de flumazénil dans la salle d’endoscopie peut être une utile précaution, après que les voies aériennes aient été libérées et le patient oxygéné. Le patient victime d’un tel incident doit être surveillé très attentivement et n’être autorisé à rentrer chez lui que lorsque les effets propres des benzodiazépines ont disparu. Cette situation ne peut être qu’exceptionnelle.

De même, si un patient se trouve à la fin d’une endoscopie pour laquelle il a reçu une benzodiazépine dans un état de somnolence excessive, l’administration de flumazénil peut permettre d’améliorer la situation. Cependant, de la même façon, un tel patient ne doit être autorisé à rentrer chez lui que lorsque les effets propres des benzodiazépines ont disparu, et la surveillance ne doit donc en aucun cas être raccourcie.

SOINS PÉRIOPÉRATOIRES
Les deux principales complications de la CPRE sont la pancréatite aiguë et les complications septiques dominées par l’angiocholite, voire le choc septique. Si la prévention de la pancréatite aiguë reste difficile, on évite cependant de stimuler la sécrétion pancréatique pendant au moins 24 heures en laissant le patient à jeun, et une mesure de l’amylasémie à la 24e heure est pratiquée avant d’autoriser la reprise de l’alimentation. Il ne faut pas manipuler des voies biliaires contenant de la bile infectée sans qu’une antibiothérapie curative adaptée dans toute la mesure du possible aux micro-organismes en cause ait été instituée. En cas d’obstacle sur les voies biliaires, la CPRE est précédée, par exemple [69], de l’administration intraveineuse de pipéracilline, 4 g par exemple [69], traitement poursuivi jusqu’à ce que la désobstruction des voies biliaires soit avérée.

 

Coloscopie

GÉNÉRALITÉS
L’intérêt principal de la coloscopie est la prévention et le diagnostic des cancers rectocoliques (25 000 nouveaux cas par an). Pour cela, elle doit être totale et permettre d’emblée tout acte biopsique ou thérapeutique local. En dépit d’une technique éprouvée, cet examen n’est pas dénué de complications : hors polypectomie, la fréquence des hémorragies est d’environ 0,05 %, celle des perforations de 0,1 %, et la mortalité est estimée à 0,02 % [33, 39, 62]. L’anesthésie, si elle n’accroît pas la fréquence des perforations [40], peut en retarder le diagnostic, et donc le traitement. Néanmoins, cet acte, qui peut être douloureux (dolichocôlon, brides péritonéales après chirurgie sousmésocolique) est constamment vécu comme très déplaisant par les patients, et l’anesthésiste est souvent sollicité pour améliorer la tolérance d’une coloscopie totale. À l’heure actuelle, environ 900 000 coloscopies sont pratiquées chaque année en France, la plupart sous anesthésie. Il faut savoir cependant qu’il ne s’agit pas là d’un dogme absolu, et que des études ont montré qu’une coloscopie totale était possible dans des conditions satisfaisantes pour les patients sans sédation associée [21, 35].

JEÛNE PRÉOPÉRATOIRE ET PRÉPARATION COLIQUE
La préparation colique avant une coloscopie comporte le plus souvent l’absorption de plusieurs litres (4 L) de polyéthylène glycol (PEG) dans la nuit qui précède l’examen [15]. Ce fait exclut l’usage d’un somnifère en prémédication la veille de l’endoscopie. Le PEG est un tampon. Il favorise par ailleurs la vidange gastrique. En dehors de toute pathologie ralentissant celle-ci, si le dernier verre de PEG a été absorbé plus de 2 heures avant l’endoscopie, le patient peut être considéré comme ayant l’estomac vide [56]. Ceci est d’ailleurs en accord avec les derniers travaux de la littérature concernant le jeûne préopératoire, qui s’accordent pour démontrer l’innocuité de l’absorption d’un verre de liquide clair 2 heures avant l’induction de l’anesthésie. Le PEG réalisant un lavage intestinal isotonique n’a pas de conséquence sur l’état hydroélectrolytique des patients. Il n’en est pas toujours de même des préparations hypertoniques qui réapparaissent de nos jours sous forme de phosphate de sodium administré per os [49]. Ces préparations peuvent induire une hypovolémie aiguë particulièrement délétère chez les sujets âgés ou cardiopathes, et aggraver une insuffisance rénale préexistante [22]. Une telle préparation avant l’administration d’un agent vasodilatateur comme le propofol ou le midazolam doit rendre extrêmement prudent et faire éventuellement précéder l’induction anesthésique d’un remplissage approprié.

SIMPLICITÉ DE L’ACTE D’ANESTHÉSIE
L’anesthésie pour coloscopie est un acte simple dans la mesure où le patient est laissé en décubitus dorsal et où l’anesthésiste a accès à la tête sans partage. Les protocoles possibles sont donc nombreux et restent à l’appréciation du médecin anesthésiste. Les impératifs et la spécificité de cet acte sont les suivants :
– il s’agit d’un acte ambulatoire, soumis en tant que tel à des règles précises ;
– la stimulation nociceptive, réelle, reste cependant sans commune
mesure avec celle d’un acte chirurgical. La profondeur de l’anesthésie doit être en rapport. Si le côlon est bien vidé de son air lors du retrait de l’endoscope, l’inconfort postopératoire est minime et ne requiert pas de médication particulière ;
– l’insufflation du côlon, jointe à des manoeuvres de compression abdominale pour favoriser la progression de l’endoscope, et en particulier le franchissement de l’angle colique gauche, parfois aidé par une compression externe vigoureuse de la région épigastrique, peut provoquer une régurgitation du contenu gastrique. Ce risque n’a pas été estimé dans la littérature. Il semble faible et grandement fonction des conditions locales (certains endoscopistes et leurs assistants sont plus brutaux que d’autres, certains patients obèses ont une morphologie qui rend le guidage de l’endoscope plus difficile que chez d’autres...). Il peut parfois conduire à protéger les voies aériennes, surtout si le patient appartient à un groupe à risque d’inhalation du contenu gastrique.

Aujourd’hui, les deux techniques les plus utilisées sont la diazanalgésie (qui associe le midazolam à un morphinique, le plus souvent du fentanyl ou de l’alfentanil, voire du rémifentanil), et la perfusion continue de propofol, complétée ou non par de faibles doses de morphinique (fentanyl ou alfentanil). Si ces techniques n’ont jamais été comparées dans la littérature pour la coloscopie, les données obtenues dans des situations similaires (dentisterie, radiologie interventionnelle...) [26, 34, 47, 59] permettent de penser que leurs résultats sont probablement proches avec, dans certaines études, une meilleure maniabilité et une récupération plus rapide des fonctions supérieures lorsque le propofol est choisi. Il convient à ce propos de rappeler que, pour éviter tout risque de contamination bactérienne ou virale, une seringue de propofol doit être réservée à un seul patient. Le fait qu’actuellement en France le propofol destiné à l’anesthésie intraveineuse à objectif de concentration (AIVOC) ne soit disponible qu’en seringues préremplies de 500 mg est d’ailleurs un frein à l’utilisation de cette technique au cours des coloscopies, alors que les résultats cliniques y sont meilleurs que lorsque le propofol est administré en débit massique [65].

ANTIBIOPROPHYLAXIE
Le côlon est le siège d’une pullulation microbienne où prédominent les entérobactéries et les germes anaérobies. La coloscopie, surtout lorsqu’elle s’accompagne d’une effraction de la muqueuse colique (biopsie, polypectomie), peut induire une bactériémie. Il ne semble pas licite de chercher à prévenir cette bactériémie chez tous les patients, dans la mesure où les gestes les plus usuels de la vie quotidienne peuvent également être source de bactériémies sans conséquences pathologiques. La Société américaine d’endoscopie digestive a donc dégagé une attitude consensuelle vis-à-vis de l’antibioprophylaxie au cours des coloscopies : l’antibioprophylaxie est recommandée pour protéger certains patients particulièrement à risque d’endocardite, tels ceux qui ont des valves cardiaques remaniées par une endocardite antérieure, des valves prothétiques ou des shunts droits-gauches chirurgicaux [3].

Dans les autres situations (prothèses autres que cardiaques par exemple), la décision d’administrer une antibioprophylaxie est laissée à l’appréciation du praticien. S’il est décidé de recourir à une antibioprophylaxie, il est nécessaire d’administrer une dose d’antibiotiques 1 heure avant l’endoscopie. En revanche, la poursuite postopératoire de l’antibioprophylaxie n’a pas fait la preuve de son efficacité, et cette dose unique est donc a priori suffisante. Les produits choisis doivent être actifs sur les bacilles à Gram négatif et sur le streptocoque, ce qui explique l’usage très répandu de l’association amoxicillineaminoside.

En revanche, les endocardites à anaérobies restent exceptionnelles et ne justifient pas une protection spécifique. Ces recommandations recoupent les travaux de la conférence de consensus de la Société de réanimation de langue française (SRLF) sur l’antibioprophylaxie en milieu chirurgical chez l’adulte [5].



Entéroscopie par voies haute et basse


Depuis une dizaine d’années, l’exploration endoscopique de l’intestin grêle est devenue possible grâce à la mise au point d’entéroscopes spécifiques [67]. Ces endoscopies permettent de visualiser et éventuellement de biopsier des tumeurs du grêle, de retrouver la cause de saignements digestifs inexpliqués et d’explorer plus complètement des maladies coeliaques et autres syndromes de malabsorption. Leur indication reste rare. Leur seule spécificité pour l’anesthésiste est leur durée, qui peut amener, pour être dans de meilleures conditions de sécurité chez les patients et simplifier les problèmes d’oxygénation, à proposer une intubation endotrachéale.

Conclusion
L’anesthésie, dans le contexte de l’endoscopie digestive, est le sujet actuel d’un vaste débat qui dépasse le cadre strict de la technique anesthésique : l’augmentation importante du nombre de ces endoscopies impose une réflexion sur le surcoût induit par l’anesthésie dans ce contexte. La nécessité de suivre les règles de sécurité contraignantes de l’anesthésie ambulatoire induit, chez certains endoscopistes, la tentation d’administrer eux-mêmes les agents de sédation, et l’opportunité de ce transfert de technologie (et de compétences), mais aussi de responsabilité, est l’objet d’un débat au sein même de la communauté des anesthésistes. En tout cas, un tel transfert, s’il est discuté, ne remet pas en cause les règles fondamentales de sécurité du patient.

Sur le plan de la technique anesthésique, les endoscopies digestives permettent d’aborder plusieurs thèmes de réflexion très actuels, tels l’anesthésie ambulatoire, le jeûne préopératoire ou le contrôle des voies aériennes au cours de l’anesthésie générale. Leur confort a été considérablement amélioré par l’introduction de l’oxymétrie de pouls et la mise sur le marché des agents anesthésiques intraveineux d’action rapide et brève. Là, peut-être plus qu’ailleurs, la sécurité du patient dépend d’une excellente coopération entre anesthésiste et endoscopiste.

Points importants à retenir en pratique.
– L’anesthésie pour endoscopie digestive doit se conformer au décret sur la sécurité anesthésique et aux recommandations de la SFAR concernant l’anesthésie du patient ambulatoire.
– L’anesthésie pour endoscopie digestive concerne chaque année en France plus d’un million de patients.
– On distingue les endoscopies hautes (oeso-gastroduodénoscopies, échoendoscopies, endoscopies des voies biliaires) et les coloscopies.
– Il est possible de ne pas intuber les endoscopies des voies biliaires à condition qu’il existe une entente parfaite entre l’endoscopiste et l’anesthésiste. Cette décision est prise au cas par cas.
– L’anesthésie pour coloscopie est un acte simple dans la mesure où l’anesthésiste a accès sans partage à la tête du patient.
– Les agents le plus souvent utilisés sont le midazolam et le propofol.
– Les perfusions à objectif de concentration sont intéressantes dans les endoscopies longues (échoendoscopies, endoscopies des voies biliaires, coloscopies).
– L’utilisation de flumazénil pour traiter une somnolence résiduelle ne permet pas de raccourcir le séjour en SSPI.
– En dehors de cas particuliers, le contrôle des voies aériennes n’est pas indispensable, mais le risque principal est la dépression respiratoire, source d’hypoxémie, qui est dépistée par une surveillance clinique attentive et l’oxymétrie de pouls.
– L’administration d’oxygène s’impose souvent.

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