Autres effets des anesthésiques halogénés

Effets sur les fibres musculaires
Les agents halogénés potentialisent les curares par un effet 
direct musculaire. L’effet du N2O éventuellement associé est  
mineur par comparaison à celui des agents halogénés. La  
potentialisation des curares est variable avec l’agent halogéné et  
le type de curare utilisé. Les résultats des différentes études  
publiées sont souvent contradictoires. C’est le cas par exemple  
du rocuronium et de l’isoflurane pour lesquels certains retrouvent  
une potentialisation de 60 % et d’autres aucune, alors que  
la majorité des auteurs observe une potentialisation des curares  
plus marquée pour l’isoflurane par comparaison à l’halothane et  
à l’enflurane. [133, 155, 156] Le desflurane et le sévoflurane euxmêmes  
potentialisent de façon plus importante que l’isoflurane 
la curarisation induite par le cisatracurium et le  
rocuronium. [154-156] La cinétique très lente des gaz dans le  
compartiment musculaire pourrait expliquer ces discordances de  
résultats entre halogénés, et entre les études pour un même  
halogéné. Cette potentialisation se traduit par une diminution  
ou un espacement des doses administrées en bolus ou en  
perfusion continue pour maintenir constant un niveau donné  
de relâchement musculaire. Cette réduction peut atteindre 40 à  
50 %, notamment avec l’isoflurane et le sévoflurane. La grande  
variabilité des résultats publiés ne peut que faire recommander  
une adaptation des doses en fonction d’un monitorage strict de  
la curarisation. De même, l’allongement de la durée d’action des  
curares après bolus unique ou à l’arrêt de la perfusion est très  
variable selon les sources. Là encore, le monitorage de la  
curarisation est requis, notamment pour décider ou pas de 
réinjecter les curares ou de les antagoniser en fin d’intervention.
En fin d’intervention, la néostigmine agit au bout d’un délai 
deux fois supérieur en présence d’agent halogéné comme le  
sévoflurane et l’isoflurane. [123]
Les agents halogénés participent à l’immobilité chirurgicale 
en déprimant l’activité des neurones moteurs spinaux. [122] Cet  
effet des agents halogénés limite la survenue de mouvements  
pendant l’intervention, notamment chez les patients pour  
lesquels la curarisation doit être limitée comme ceux souffrant  
de myasthénie.
Tous les agents anesthésiques halogénés peuvent déclencher 
une crise d’hyperthermie maligne chez les patients dits « HMS »  
porteurs du gène de l’hyperthermie maligne, comme chez ceux  
souffrant de myopathie comme le central core disease ou la  
maladie de Duchenne de Boulogne (ainsi qu’un grand nombre  
de maladies musculaires héréditaires). La crise peut survenir de  
façon retardée. Ainsi, un délai de 180 minutes a-t-il été retrouvé 
lors d’une anesthésie au desflurane. [64] Chez ces patients, tous  
les agents halogénés sont formellement contre-indiqués.
Tous les agents halogénés relâchent la musculature lisse 
utérine de façon proportionnelle à leur concentration. À  
concentration modérée (< 2 CAM), cet effet est similaire entre  
les différents halogénés, y compris avec le sévoflurane. Les fortes  
concentrations obtenues après une induction par inhalation  
peuvent induire un défaut de rétraction utérine favorisant le 
saignement. [108]
Le relâchement de la musculature lisse de l’oeil participe, avec 
la réduction de production d’humeur aqueuse, à la diminution  
de pression intraoculaire observée avec tous les halogénés.
Lorsque 8 % de sévoflurane sont utilisés pour l’induction, 
l’élévation de pression intraoculaire liée à l’intubation peut être  
supprimée par l’association d’une petite dose de morphiniques.  
[32, 47]

Effets émétisants
Tous les agents halogénés sont émétisants. Après administration de sévoflurane et de desflurane, l’incidence des nausées et des vomissements postopératoires est plus élevée qu’après celle de propofol, qui a des propriétés antiémétiques, mais moindre qu’après celle d’’isoflurane ou d’halothane, probablement pour des raisons cinétiques. [98] L’utilisation des halogénés augmenterait le risque émétique. Ainsi, selon une méta-analyse, l’incidence des vomissements postopératoires augmente de 20 à 40 % (celle des nausées de 9 à 20 %) lorsque du sévoflurane est utilisé pour l’induction de l’anesthésie par comparaison au propofol. [69] Lors de la chirurgie ambulatoire, l’incidence des nausées et des vomissements postopératoires est plus fréquente 30 minutes après une anesthésie induite et entretenue avec du sévoflurane par comparaison au propofol, mais au bout de 90 minutes la différence disparaît. [28] Lorsque l’agent halogéné est seulement utilisé pour l’entretien de l’anesthésie, l’incidence des nausées et des vomissements est extrêmement variable et atteint de 10 à 67 % des patients. [8, 73] Par comparaison avec le propofol, l’augmentation d’incidence des nausées et des vomissements après administration d’agents halogénés est transitoire et disparaît après 2 à 4 heures car l’effet antiémétique du propofol est concentration-dépendant. [5]
Dans une étude prospective chez 1 180 patients, Apfel et al. ne retrouvent pas de différence d’incidence de risque émétique entre l’isoflurane, l’enflurane ou le sévoflurane. [5] Dans cette étude, l’incidence des nausées-vomissements précoces est proportionnelle à la durée d’administration des agents volatils. Les antiémétiques comme le dropéridol, les inhibiteurs de la 5-hydroxytryptamine ou les corticoïdes à faibles doses permettent, seuls ou en association, une réduction de 50 à 98 % de l’incidence de cet effet secondaire qui dépend aussi du type de chirurgie, du terrain et de l’administration de morphiniques. Le faible coût et l’efficacité du dropéridol permettent en pratique d’utiliser les agents halogénés seuls ou associés à du N2O (y compris en cas d’antécédents émétiques postopératoires) et de ne pas privilégier l’utilisation du propofol dans cette indication.

Coagulation
Contrairement à l’isoflurane, l’halothane et le sévoflurane inhibent in vitro l’agrégation plaquettaire et inhibent la synthèse de thromboxane A2 plaquettaire. Les conséquences en termes de risque hémorragique périopératoire n’ont été ni démontrées, ni évaluées.
Dose-test, anesthésie péridurale et anesthésiques halogénés

Lors de la réalisation d’anesthésie locorégionale sous anesthésie générale avec du sévoflurane chez l’adulte ou chez l’enfant, le passage intravasculaire de l’anesthésique local doit être dépisté par la diminution d’amplitude de l’onde T. Une réduction de 25 % de l’onde T a en effet une meilleure sensibilité et spécificité que l’élévation de fréquence cardiaque ou de pression artérielle. 



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