Pancréatite aiguë nécrosante






Résumé. – Les pancréatites aiguës nécrosantes ou nécroticohémorragiques représentent 10 à 25 % de toutes les formes de pancréatites aiguës.
Elles se caractérisent par une mortalité et une morbidité élevées pour deux raisons essentielles : l’apparition d’un syndrome de défaillance multiviscérale et la surinfection de la nécrose.
Les étiologies sont nombreuses mais dominées par les lithiases biliaires (45 %) et les intoxications éthyliques (35 %). Les mécanismes physiopathologiques qui aboutissent à une pancréatite aiguë nécrosante sont obscurs. Ils reposent sur deux théories, sans doute associées : la théorie canalaire et la théorie acineuse. Elles aboutissent à une cascade d’événements responsables d’une libération massive d’enzymes protéolytiques activées. La démarche diagnostique a trois buts : faire le diagnostic positif (amylasémie, lipasémie, exploration radiologique), évaluer la gravité initiale (scores clinicobiologiques et scores radiologiques), rechercher une ou des complications (locales, locorégionales, systémiques). La surinfection de la nécrose survient dans 40 à 60 % des pancréatites aiguës nécrosantes. Son diagnostic doit être évoqué d’emblée et devant toute dégradation du tableau clinique. Il est confirmé par des ponctions percutanées guidées par la tomodensitométrie.
 La prise en charge thérapeutique est avant tout symptomatique car il n’existe aucun traitement spécifique.
Parmi toutes les mesures, certaines sont l’objet de controverses : la chirurgie de la nécrose stérile, les indications de la chirurgie biliaire et de la cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique, le traitement antibiotique prophylactique précoce et la décontamination digestive sélective, le support nutritionnel (alimentation parentérale versus alimentation entérale).Actuellement, aucune règle précise n’existe et aucune stratégie n’a pu montrer un avantage significatif.
 En définitive, la prise en charge des pancréatites aiguës nécrosantes, qui est obligatoirement multidisciplinaire (anesthésistes-réanimateurs, chirurgiens, radiologues et microbiologistes) reste souvent une question d’école soumise aux habitudes locales. Enfin, il faut savoir que les formes les plus graves sont extrêmement consommatrices de temps et de ressources.



Introduction
Les pancréatites aiguës (PA) sont des affections fréquentes marquées par une gravité variable. À côté des formes bénignes qui guérissent le plus souvent de façon spontanée (et ce quel que soit le mode de prise en charge), il existe des formes gravissimes compliquées de défaillances multiviscérales et grevées d’une morbidité et d’une mortalité importantes.
Le type de lésions observées permet de distinguer classiquement deux formes [15] :
– les pancréatites interstitielles (ou oedémateuses), le plus souvent bénignes, sans lésions visibles des cellules acinaires et des tubules pancréatiques, ni signe capillaire ;
– les pancréatites aiguës
nécrosantes (PAN) (ou hémorragiques, ou nécroticohémorragiques), responsables des tableaux cliniques sévères. Ces PAN sont caractérisées par une nécrose des tissus glandulaires, interstitiels et de la graisse péripancréatique, qui peut s’étendre aux organes de voisinage et à l’espace rétropéritonéal. Ces zones de nécrose, plus ou moins étendues, sont associées à des lésions hémorragiques et à des phénomènes de thrombose vasculaire.
L’extrême variabilité du tableau clinique et les deux types de lésions histologiques observées sont responsables de l’impression d’hétérogénéité qui existe dès que l’on aborde le sujet des PA. Cette impression est renforcée par un certain nombre d’autres caractéristiques des PA :
– bien que l’alcool et les lithiases biliaires soient, de loin, les étiologies les plus fréquentes, de très nombreuses autres étiologies existent ;
– les mécanismes physiopathologiques restent obscurs ;
– les modalités de prise en charge sont mal codifiées et sont le centre d’un certain nombre de controverses, ceci s’expliquant par le fait que les PAN ont fait l’objet de peu d’études homogènes, prospectives, avec une bonne méthodologie. Le traitement est avant tout symptomatique et repose essentiellement sur la gravité du tableau clinique et la survenue de complications. Quant à la nature de l’étiologie, elle intervient peu dans le traitement. Enfin, il n’existe, à ce jour, aucun traitement spécifique efficace.
La gravité des PAN repose sur trois déterminants qui sont synergiques sur la mortalité et la morbidité : la nécrose, l’infection de la nécrose et les complications systémiques.
Les formes les plus graves de PAN sont responsables d’une consommation très importante de temps et de ressources humaines, médicamenteuses et techniques. Bien que mal codifiée, la prise en charge des PAN est multidisciplinaire et repose sur une étroite collaboration entre anesthésistes-réanimateurs, radiologues, chirurgiens et microbiologistes. Ce n’est que dans ces conditions que l’on peut espérer une amélioration du pronostic des formes les plus sévères.

Épidémiologie
PANCRÉATITES AIGUËS
En 1987, les PA ont été responsables, aux États-Unis, de 4 % des hospitalisations pour douleurs abdominales, de plus de 108 000 hospitalisations et de 2 251 décès [93].
En Grande-Bretagne,l’incidence a été multipliée par un facteur 10 entre 1960 et 1980, passant de 21 à 251 par million d’habitants [97].
Une étude épidémiologique écossaise [106] montre des chiffres d’incidence supérieurs : 484 par million chez les femmes et 750 par million chez les hommes. Les raisons de cette augmentation de l’incidence des PA ne sont pas très claires : augmentation de la consommation d’alcool, meilleure sensibilité diagnostique... ?
Cette incidence est plus élevée dans certaines populations et, entre autres, chez les patients sidéens où elle atteint des valeurs comprises entre 4 et 22 % [58].

PANCRÉATITES AIGUËS NÉCROSANTES
Les formes nécrosantes de pancréatites représentent 10 à 25 % de l’ensemble des PA [6, 93]. Alors que la mortalité de toutes les formes de PA confondues est de l’ordre de 10 % [93], celle des PAN est beaucoup plus importante, variant de 25 à 50 %, voire 70 % [22, 37, 70, 71].
Ces chiffres, extrêmement variables, montrent sans aucun doute l’hétérogénéité des séries publiées, mais il pose également le problème du diagnostic des PAN : en 1988, Wilson [107] montre que 42 % des PAN ayant abouti à un décès n’ont pas été reconnues avant l’autopsie.
Soixante pour cent des décès surviennent durant la première semaine d’évolution et sont surtout le fait d’une détresse respiratoire aiguë, alors que les décès tardifs sont le plus souvent la conséquence d’une surinfection de nécrose, qui au total reste cependant la cause principale des décès [6, 38, 82, 83, 108].
L’obésité semble être un facteur de risque majeur de voir se développer une forme sévère de pancréatite. Dans le travail publié par Funnel [37], parmi 19 patients obèses développant une PA, 66 % évoluent vers une forme sévère avec un taux de mortalité de 36 %, contre seulement 6 % de décès chez 80 patients non obèses.

Étiologie
D’une façon schématique, une lithiase biliaire est la cause de 45 % des PA (avec un pic de fréquence chez la femme de 50-60 ans), une intoxication alcoolique de 35 % (avec une prédominance masculine), alors qu’une autre étiologie est retrouvée dans 10 % des cas et que 10 % sont idiopathiques [93] (tableau I). Cependant, des différences importantes existent en fonction des populations et des régions étudiées : prédominance des causes biliaires (deux tiers des cas) en Europe de l’Ouest et en Asie, alors que l’alcool est responsable de deux tiers à trois quarts des cas dans certaines régions des États- Unis ou de France, et que l’ascaridiase peut représenter jusqu’à 20 % des étiologies dans certains pays tels que l’Inde [93]. Chez les patients atteints du sida (syndrome de l’immunodéficience acquise), l’incidence, comme cela a déjà été dit, est très supérieure à celle du reste de la population, de même que la répartition des étiologies est différente. En dehors d’une étiologie classique, une PA chez un patient séropositif au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) est le plus souvent due à l’effet toxique d’un traitement médicamenteux, principalement antirétroviral [58, 88] : didanosine et pentamidine.En l’absence de toxicité médicamenteuse, le bilan étiologique doit rechercher une infection opportuniste en premier lieu à cytomégalovirus (CMV) et à Mycobacterium avium intracellulare [13, 18], mais également à Cryptococcus neoformans, Mycobacterium tuberculosis,
Toxoplasma gondii, Pneumocystis carinii, Leishmania sp.
L’atteinte pancréatique directement par le VIH n’a été rapportée que de façon très exceptionnelle et uniquement au décours de la primo-infection [85].

Tableau I. – Étiologies des pancréatites aiguës (d’après Steinberg et
Tenner [93])
Obstruction des voies biliaires
- Lithiase du cholédoque ; ampullome ou tumeurs pancréatiques
- Corps étrangers obstruant la papille, ascaridiase, douve de Chine
- Pancreas divisum avec obstruction du canal pancréatique accessoire
- Diverticule duodénal périampullaire, hypertonie du sphincter d’Oddi
Toxines ou médicaments
Alcool éthylique, alcool méthylique, venin de scorpion, insecticides organophosphorés, azathioprine, mercaptopurine, acide valproïque, oestrogènes, tétracyclines, métronidazole, nitrofurantoïne, pentamidine, furosémide, sulfonamides, méthyldopa, cimétidine, ranitidine, sulindac, didanosine, acétaminophène, érythromycine, salicylé
Traumatisme
- Traumatisme fermé de l’abdomen
- Origine iatrogène : postopératoire, cathétérisme rétrograde endoscopique, sphinctérotomie endoscopique, manométrie du sphincter d’Oddi
Anomalies métaboliques
Hypertriglycéridémie, hypercalcémie (hyperparathyroïdie)
Infections
- Parasites : Ascaris, douve de Chine, paludisme
- Virus : oreillons, rubéole, hépatites, virus coxsackie B, échovirus, adénovirus, CMV, varicelle, Epstein-Barr, VIH
- Bactéries : mycoplasme, Campylobacter jejuni, Mycobacterium tuberculosis, Mycobacterium avium, Legionella sp., leptospirose
Anomalies vasculaires
- Ischémie, hypoperfusion
- Embole de cholestérol
- Maladie vasculaire (lupus érythémateux disséminé, périartérite noueuse, HTA maligne)
Divers
- Ulcère perforé, maladie de Crohn, syndrome de Reye, mucoviscidose, hypothermie
Idiopathique


Physiopathologie de pancréatite aiguë nécrosante



Lesphénomènes physiopathologiques qui conduisent à la nécrose glandulaire sont obscurs. Les données expérimentales, anatomopathologiques et les différentes étiologies permettent de proposer deux mécanismes dans le déclenchement des PA : la théorie canalaire et la théorie acineuse, voire leur association. Ces théories reposent sur des perturbations du métabolisme cellulaire et une activation enzymatique avec hyperstimulation du pancréas [93].
La présence intracanalaire, et sous pression d’un agent inducteur (bile, alcool...), est responsable d’une augmentation de la perméabilité des parois des canaux aux enzymes protéolytiques, d’oùl’existenced’undiffusionpéricanalaireversletissuinterstitiel responsable de l’oedème, d’un processus inflammatoire et d’altérations de la microcirculation. Dans un second temps, il existe une extension des lésions aux acini pour des raisons qui restent inconnues.
Lorsque les conditions d’excrétion ne sont pas normales, il existe une coalescence des granules d’enzymes inactifs avec les vacuoles lysosomiales conduisant à une activation enzymatique et à la lyse cellulaire. Il semble que l’activation de trypsine à partir du trypsinogène soit un des éléments essentiels en ayant un rôle de starter dans le déclenchement de la « cascade » [31]. Normalement, la faible production de trypsine intracellulaire est inactivée par une antitrypsine pancréatique endogène. Dans le cadre d’une poussée de pancréatite, ce mécanisme de défense est dépassé, ce qui entraîne une production en grande quantité de trypsine et une activation des autres enzymes pancréatiques. Les effets tissulaires des enzymes pancréatiques activées une fois libérées sont bien connus [93] :
– phospholipase A2 (PlA2) : altération du surfactant pulmonaire par son activité cytolytique ;
– élastase :
dégradation des fibres élastiques vasculaires et hémorragies intrapancréatiques ;
– trypsine : activation du complément et des kinines, jouant probablement un rôle dans les phénomènes de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), dans la survenue d’un choc et/ou d’une insuffisance rénale aiguë ;
– kallicréine : activée par la trypsine circulante, la kallicréine participe à l’instabilité hémodynamique par l’intermédiaire d’un relargage de bradykinine et de kallidine ;
– lipase : nécrose de la graisse et des tissus péripancréatiques.
Les phénomènes d’ischémie du pancréas sont vraisemblablement responsables de la transformation des formes peu sévères oedémateuses en pancréatites nécrosantes et/ou hémorragiques [50].
L’évolution des cellules acineuses une fois stimulée est imprévisible, l’enchaînement des événements pouvant aboutir dans tous les cas de figure d’une forme mineure localisée aux formes les plus graves avec extension de la nécrose à toute la glande et relargage systémique et péritonéal d’enzymes, de cytokines, de radicaux libres, de TNF (tumor necrosis factor)-á, avec un risque important d’évolution vers un syndrome de défaillance multiviscérale. Les données les plus récentes, si elles sont confirmées, montrent que la survenue d’une PAN pourrait être liée aux dépassements des mécanismes de défense mis en place par le pancréas après un stress [30, 46]. Il semble que les PAP (pancreatitis associated proteins) sécrétées par le pancréas au décours d’une agression aient un rôle majeur dans ces mécanismes d’autodéfense du pancréas [30].
De très nombreux travaux expérimentaux et des essais chez l’homme ont proposé l’utilisation d’inhibiteurs de la trypsine [19, 21, 94], d’anti-TNF-á [24, 42], d’interleukine (IL) 10 [103], d’antagonistes de l’IL1 [68], de différents agents immunosuppresseurs (blocage de la sécrétion d’IL8 et de la cascade des cytokines) [1, 33] ou de lexipafant (cytokine inhibant le PAF [platelet activating factor]) [49, 62, 84]. Les résultats de ces travaux, même s’ils semblent avoir fait progresser les connaissances dans le domaine des phénomènes physiopathologiques de la PA, sont souvent contradictoires. Leurs analyses ne permettent pas, le plus souvent, de tirer des « conclusions définitives », soit en raison de problèmes méthodologiques, soit parce que, dans les essais chez l’homme, ces molécules, administrées trop tardivement dans l’évolution de la pancréatite, ne peuvent plus empêcher la survenue de la cascade d’événements et participer aux mécanismes d’autodéfense du pancréas.

De nombreuses années d’intoxication éthylique sont nécessaires avant l’apparition d’une PA [91, 93] qui, le plus souvent, survient sur des lésions de pancréatites chroniques [91]. Cependant, d’autres facteurs (hypertriglycéridémie ?) interviennent probablement, étant donné que seuls 5 % des éthyliques chroniques vont développer une PA [91]. Quant aux mécanismes de la pancréatite biliaire, ils restent inconnus et toujours débattus [93] depuis la théorie proposée par Opie en 1901 [69] qui repose sur un mécanisme de reflux biliaire dans le canal de Wirsung par obstruction de l’ampoule de Vater.

Démarche diagnostique de pancréatite aiguë nécrosante



Cette démarche a trois buts principaux :
– faire le diagnostic positif ;

– évaluer la sévérité : l’évaluation de la gravité initiale, tant clinique qu’anatomique, est essentielle dans cette démarche diagnostique pour de nombreuses raisons. Tout d’abord, ce sont les formes initialement les plus sévères qui vont préférentiellement se compliquer d’infection et de défaillance d’organe [56]. Il faut donc d’emblée apprécier le risque de survenue d’une complication potentielle et rechercher des éléments prédictifs de survenue d’un SDMV. Cette évaluation initiale devrait également permettre de suivre l’évolution des patients, de comparer et de stratifier les patients entre eux, de comparer les différents traitements et les résultats publiés dans la littérature et, enfin, de sélectionner des groupes de patients « homogènes » lors des essais thérapeutiques ;
– rechercher une ou des complications qui peuvent être présentes dès l’admission (cf infra).
Cette démarche, qui est capitale dans la prise en charge des PAN, a eu comme conséquences le développement de très nombreux scores et index de gravité (cliniques, biologiques, clinicobiologiques, radiologiques) plus ou moins spécifiques et la recherche de facteurs de risques prédictifs d’infection, de morbidité et de mortalité.

SIGNES CLINIQUES ET MARQUEURS BIOLOGIQUES
Les signes cliniques de pancréatite sont peu spécifiques [56]. La douleur abdominale est le signe le plus sensible et elle est fréquemment associée à des nausées ou à des vomissements.
Le diagnostic biologique repose sur l’existence d’une hyperamylasémie, ou mieux d’une hyperlipasémie [47, 75].
L’hyperamylasémie n’est pas sensible et sa spécificité est médiocre.
 Il a été décrit des pancréatites histologiques sans élévation de l’amylasémie, alors qu’une hyperamylasémie peut être observée en l’absence de pancréatite clinique, toute ischémie même transitoire et sans conséquences sur la glande pouvant s’accompagner d’une augmentation de l’amylasémie.
Le dosage de la lipasémie est plus sensible et plus spécifique. Il se normalise plus tardivement que l’amylasémie et son augmentation est identique, quelles que soient les circonstances étiologiques, ce qui n’est pas le cas de l’amylasémie, souvent moins élevée dans les PA alcooliques. Quant aux dosages immunologiques du trypsinogène, de la lipase et des isoenzymes de l’amylase, ils ne présentent pas de supériorité sur le dosage de la lipasémie.
De nombreux marqueurs biologiques ont été testés dans le but de trouver un indicateur unique de sévérité et de pronostic [47] : CRP (C reactive protein), IL6, PAP, PlA2, élévation sérique de l’élastase des polynucléaires, TAP (trypsinogen activated peptide), néoptérine, TNF-á. Malheureusement, la sensibilité de tous ces examens est médiocre et seule la CRP est utilisable en routine [47]. Un taux supérieur à 150 mg/L suggère l’existence d’une pancréatite grave avec des valeurs prédictives positives et négatives respectivement de 66 % et 90 %.
L’intérêt du dosage est cependant limité en clinique courante par le fait que l’ascension de la CRP est souvent retardée de 48 heures par rapport au début des signes cliniques. À l’opposé, l’élévation de l’IL6 est beaucoup plus précoce, permettant de prédire la sévérité de la pancréatite dès l’admission.

Une élévation de la procalcitonine (PCT) et de IL8 peut permettre de distinguer, au sein des PAN, les formes avec infection de nécrose [81].

IMAGERIE
Ce sont les techniques d’imagerie, et plus particulièrement la tomodensitométrie (TDM), qui vont permettre de confirmer le diagnostic de PA et d’orienter le diagnostic étiologique (fig 1 à 5).

L’échographie reste la méthode de référence de l’exploration des voies biliaires et, si des gaz digestifs ne gênent pas l’examen, elle permet de faire le diagnostic de PA avec une spécificité de 100 % et une sensibilité de 67 % [67].
La TDM avec injection de produit de contraste est la méthode de choix pour explorer le pancréas. Elle permet d’identifier les zones ne prenant pas le contraste qui correspondent aux territoires nécrosés ou à risque de nécrose par altération de la microcirculation, et de mesurer l’extension extrapancréatique d’éventuelles coulées de nécrose mésentérique et rétropéritonéale [6]. La valeur prédictive positive de la pancréatographie dynamique par TDM pour le diagnostic de nécrose est de 92 % si la nécrose intéresse plus de 30 % de la glande [4].
La zone de nécrose intéresse rarement toute la glande. Elle est le plus souvent multifocale ou localisée à la périphérie, respectant le corps du pancréas. Elle apparaît rapidement après le début des symptômes et elle est généralement constituée en moins de 96 heures.
Tous les patients présentant un tableau sévère ont des images de nécrose à la TDM. Mais comme un certain nombre de patients avec un tableau clinique modéré en ont également, la valeur prédictive de la nécrose à la TDM comme signe de gravité n’est que de 59 % [93].
Les indications de la TDM devant une suspicion de PA sont résumées ci-dessous [108].

Indications de laTDMavec injection de produit iodé (d’après Wincoll [108]).
- Diagnostic clinique de PA incertain.
- Hyperamylasémie + pancréatite clinique sévère + distension abdominale + fièvre supérieure à 39 °C + hyperleucocytose.
- Score de Ranson supérieur à 3 ou APACHE II (Acute Physiology and Chronic Health Evaluation) supérieur à 8.
- Absence d’amélioration après 72 heures de traitement conservateur.
- Dégradation du tableau clinique après une amélioration initiale.


En dehors de son rôle essentiel dans le diagnostic de PA, la TDM permet également :
– d’évaluer la gravité et le pronostic par l’intermédiaire de scores scanographiques ;
– d’effectuer des prélèvements à visée microbiologique ;
– de guider la mise en place d’un drain percutané ;
– de suivre l’évolution de la maladie et de repérer d’éventuelles complications locales ou locorégionales. Cependant, un nouvel examen par TDM n’est indiqué que si l’évolution est marquée par une aggravation clinique. Cette aggravation est liée le plus souvent à une surinfection et/ou à une extension de la nécrose, au développement d’un abcès ou d’un pseudokyste, à un syndrome hémorragique ou enfin à une ischémie (voire une nécrose) du côlon, habituellement à gauche.
Ranson a élaboré un score tomodensitométrique qui classe les atteintes du pancréas en cinq stades cotés de A à E, et qui est est inférieure à 2 % chez les patients de grade A, B, C ou D, contre 57 % chez les patients de grade E. À partir de ce score, Balthazar a développé un index de sévérité basé sur l’extension de la nécrose et le degré d’ischémie pancréatique [4] (tableau III).
L’étendue de la nécrose pancréatique est divisée en trois niveaux : inférieur ou égal à 30 %, 30 à 50 % et supérieur à 50 %, et l’extension péripancréatique est représentée par les grades A à E définis initialement par Ranson. La combinaison de ces éléments permet de calculer un index de sévérité total qui est statistiquement corrélé au risque de complications et au risque de décès.
La lecture du tableau III montre que les critères de gravité sont l’existence d’une ischémie de plus de 30 % et une extension extrapancréatique correspondant aux grades D et E de Ranson.

Cependant, les résultats d’une étude rétrospective publiée en 1996 semblent montrer que le site initial de la nécrose est un meilleur indicateur prédictif que la mesure de son étendue : une nécrose localisée à la queue entraîne moins de complications et a un meilleur pronostic qu’une nécrose de tête ou qu’une nécrose diffuse. Ces résultats peuvent s’expliquer par le fait qu’une nécrose de la tête s’accompagne d’une obstruction du canal de Wirsung, responsable d’une augmentation de la pression dans les cellules acineuses,d’où une activation
et une libération massive d’enzymes protéolytiques activées. À partir de ces résultats, les auteurs proposent d’intégrer la localisation de la nécrose au score pronostique tomodensitométrique, voire aux scores d’évaluation clinicobiologique globaux [48].
Depuis 1994, il existe un doute sur l’existence d’un effet potentiellement délétère des produits de contraste, utilisés au cours de la TDM initiale, sur l’évolution des PAN. Chez le rat atteint de PAN sévère, l’injection précoce de produit de contraste augmente l’étendue de la nécrose et la mortalité précoce, sans doute en transformant des zones d’ischémie pancréatique en zone de nécrose irréversible [32] et ce, en raison d’une diminution de la microcirculation avec un effet de stase capillaire [89]. Selon les auteurs de ce modèle expérimental, les indications de la TDM précoce avec injection de produit de contraste doivent être reconsidérées.
Cependant, ce modèle animal est très éloigné des conditions cliniques humaines. À l’opposé, une autre étude animale, avec un mode de déclenchement unique de la PA et l’utilisation de produit de contraste à différentes doses entre la 48e et la 96e heure suivant l’induction de la pancréatite, conclut à l’absence d’aggravation du tableau et d’effet sur la mortalité [44]. Une seule étude existe chez l’homme : elle est rétrospective et montre que l’injection précoce de produit de contraste semble augmenter la durée clinique de la pancréatite jugée sur les douleurs abdominales et la reprise alimentaire [63]. À partir de l’ensemble de ces données, on peut raisonnablement penser qu’aucun argument sérieux ne remet en question la TDM précoce avec injection. Cependant, des travaux expérimentaux et cliniques apparaissent nécessaires pour pouvoir tirer des conclusions définitives.
Deux modèles expérimentaux de PAN montrent que les images obtenues par résonance magnétique (IRM) sont une bonne alternative à la TDM pour différencier les PAN des pancréatites oedémateuses, et pour quantifier et évaluer les lésions pancréatiques et extrapancréatiques [72, 104]. Il semble également que le produit de contraste utilisé, le gadolinium, n’ait aucun effet sur la microcirculation et n’aggrave pas les lésions des acini. Chez l’homme, l’IRM a été comparée à la TDM et à l’échographie dans le but de différencier les collections drainables des collections non drainables par voie percutanée (présence de débris ayant un diamètre inférieur ou égal, ou supérieur à 1 cm). Pour faire le diagnostic de collection, les performances de l’IRM et de la TDM sont équivalentes, et elles sont supérieures à celles de l’échographie.
Pour différencier le caractère drainable/non drainable, l’IRM est supérieure à la TDM et à l’échographie avec une sensibilité et une spécificité de 100 % (contre 25 % et 100 % pour la TDM, et 88 % et 54 % pour l’échographie) [65].

SCORES CLINICOBIOLOGIQUES
Dans le cadre de l’évaluation de la gravité des PA, de nombreux auteurs ont développé à partir de données cliniques et biologiques des indices spécifiques, alors que d’autres ont appliqué les « scores généralistes » de gravité utilisés habituellement chez les patients de réanimation. Récemment, un certain nombre de travaux ont tenté de déterminer de façon plus précise les facteurs de risque de mortalité des PAN.
Les deux scores le plus largement utilisés sont les critères de Ranson [77] et les critères de Glasgow ou score de Blamey [12]. Dans les critères de Ranson, 11 paramètres sont retenus (tableau IV). Cinq sont mesurés à l’admission et sont la traduction de l’intensité du processus inflammatoire (sauf l’âge), tandis que les six autres sont évalués durant les 48 premières heures et reflètent le retentissement systémique et général de la PA. La mortalité et la morbidité sont corrélées au nombre de paramètres présents :
– score de 1 à 2 : mortalité inférieure à 1 % (même en cas d’infection de nécrose) ;
– score de 3 à 4 : mortalité de l’ordre de 15 % ;
– score de 5 à 6 : mortalité de l’ordre de 40 % ;
– score supérieur à 6 : mortalité proche de 100 %.
Le score de Blamey (tableau IV) est une version simplifiée du score de Ranson, qui ne contient que huit paramètres recueillis dans les 48 premières heures. Bien que le délai de 2 jours ne soit plus incontournable pour calculer le score et donc pour évaluer la gravité, les performances du score de Blamey sont comparables à celles du score de Ranson, tout en étant moins sensibles (60 versus 80 %), mais plus spécifiques (90 versus 80 %) [5].
Un certain nombre de critiques ont été formulées depuis le milieu des années 1980, montrant les limites des deux scores [5] :
– l’évaluation de la gravité à 48 heures est tardive ;
– certains paramètres sont difficiles à obtenir en urgence (LDH [lacticodéshydrogénase]) ou à évaluer (séquestration liquidienne) ;
– il existe une interférence avec les traitements symptomatiques administrés (hématocrite, déficit en base, séquestration liquidienne...) ;
– les patients opérés en urgence sont exclus ;
– l’utilisation rétrospective est souvent impossible en raison des données manquantes ;
– le score de Ranson est davantage adapté aux pancréatites éthyliques, d’où l’existence d’un score modifié pour les étiologies biliaires (tableau IV) ;

– la valeur pronostique du score de Ranson est bonne uniquement aux extrêmes (chiffre inférieur à 2 ou supérieur à 6), alors que la grande majorité des patients se situent entre 2 et 6.
D’autres scores spécifiques d’évaluation de la gravité des PA ont depuis été développés, mais aucun d’entre eux n’a montré d’avantages décisifs [5, 93].
L’échec relatif des scores spécifiques est à l’origine d’une évolution dans deux directions différentes : définition plus précise des facteurs de risque de mortalité et utilisation des « scores généralistes » utilisés en réanimation. Pour Malcynski [55], les facteurs de risque de mortalité à l’admission sont un âge supérieur à 55 ans et une créatinémie supérieure à 177 ímol/L, alors que pendant l’hospitalisation, seule l’utilisation de drogues vasoactives et l’apparition d’une insuffisance rénale sont corrélées à la mortalité.
En revanche, tous les autres paramètres du score de Ranson, ainsi que la survenue, au cours de l’évolution, d’événements tels que l’existence d’une insuffisance respiratoire, d’une intervention chirurgicale, d’hémocultures positives, d’une thrombopénie, d’une infection de nécrose ne sont pas corrélés à la mortalité.
Dans une analyse multicentrique espagnole [29], la mortalité de 223 PAN, avec un score tomodensitométrique de Balthazar D ou E, est de 26,6 % et est corrélé avec un âge supérieur à 55 ans, l’existence d’un état de choc, d’une insuffisance respiratoire ou rénale ou d’une hémorragie gastrique. Talamini [95], dans une série de 539 PA comprenant 163 PAN dont 11 sont infectées à l’entrée en réanimation, conclut que l’existence à l’entrée en réanimation d’une créatininémie supérieure à 177 ímol/L et d’épanchements pleuraux et/ou d’une condensation parenchymateuse pulmonaire permettront d’isoler un sous-groupe présentant une évolution plus grave et un risque de décès plus important.
La performance prédictive de ces deux facteurs est comparable à celles des scores de Blamey et de Ranson.
Les scores généralistes de gravité, indice de gravité simplifié (IGS I et IGS II), APACHE II, ont été validés dans l’évaluation de la gravité des PA [5]. Ces scores ont l’avantage de pouvoir être calculés en routine à l’admission en réanimation, ce calcul pouvant être répété au cours de l’évolution. Ils permettent également une évaluation globale du patient dans les 24 premières heures sans que les mesures thérapeutiques n’aient d’influence majeure sur le score. De plus, l’APACHE II et l’IGS II donnent une prédiction de mortalité très peu différente de celle donnée par les critères de Ranson ou de Blamey. Cependant, il est important de noter que ces deux scores ont été validés pour des PA évoluant depuis 24 à 48 heures, mais qu’ils ne l’ont pas été si l’évolution dure depuis plusieurs jours, ce qui est le cas pour les transferts secondaires en réanimation.
 Van den Biezenbos [102] montre, dans une étude prospective incluant 45 PA, que la prédiction de la mortalité et de la morbidité est identique, que l’on utilise les scores tomodensitométriques (Ranson ou index de sévérité total de Balthazar) ou l’IGS II. En revanche, les performances des deux scores radiologiques sont supérieures en termes de prédiction d’une évolution favorable.
Au total, il apparaît qu’aucun score clinicobiologique et radiologique, ni aucun marqueur biologique (cf supra) ne sont très performants dans l’évaluation de la gravité initiale des PA. Les scores généralistes de gravité peuvent sans doute avantageusement remplacer les scores clinicobiologiques spécifiques. Quant à l’avenir, il repose sans doute sur l’association de plusieurs scores (spécifique, radiologique, défaillances d’organes...) qui permettra une stratification des patients atteints de PAN et facilitera l’analyse et la comparaison des résultats.

Complications de pancréatite aiguë nécrosante



Les complications des PAN peuvent être classées arbitrairement de plusieurs façons : médicales et chirurgicales, locales et systémiques, ou précoces et tardives (tableaux V, VI).
 La libération systémique des enzymes pancréatiques activées et la cascade physiopathologique qu’elles déclenchent sont responsables des défaillances viscérales que l’on observe la première semaine (circulatoire, pulmonaire, rénale, voire CIVD). Quant aux complications chirurgicales précoces, elles sont liées à l’extension de la nécrose aux organes de voisinage.
Il est donc de règle, devant l’apparition d’une défaillance d’organe, de rechercher une complication chirurgicale. Au-delà de la première semaine, les complications sont essentiellement liées au retentissement de la nécrose sur les tissus de voisinage et surtout à la surinfection de la nécrose. Mais d’autres complications peuvent survenir au contact des coulées de nécrose, en particulier coliques (nécrose ou fistulisation du côlon gauche ou du sigmoïde), spléniques (rupture de rate ou hématomes intraspléniques), vasculaires (hémorragie par érosion des parois vasculaires, thrombose), rénales (nécrose de l’uretère droit ou urétérohydronéphrose) [22, 83, 93].Enfin, dans 8 % des PAN, des pseudokystes peuvent apparaître vers le deuxième ou troisième mois d’évolution [93]. Ils sont dus à une extravasation de liquide pancréatique (parfois, ils sont alimentés directement par un canal pancréatique) et contiennent des débris cellulaires. Ils peuvent se surinfecter, même très à distance de la poussée initiale.

PANCRÉATITES AIGUËS NÉCROSANTES ET SYNDROME DE DÉFAILLANCE MULTIVISCÉRALE
C’est l’apparition de défaillances d’organes et surtout l’évolution vers un SDMV qui font toute la gravité des PAN. Classiquement, un SDMV précoce (inférieur à 7 jours d’évolution) est d’origine toxique, alors que passé la première semaine, il est en rapport avec un problème infectieux. Cependant, la réalité clinique est moins schématique, la nécrose pouvant se surinfecter de façon précoce durant la première semaine d’évolution. Pour Tenner [96], une défaillance viscérale survient dans une PAN sur deux, la nécrose étant stérile dans 50 % des cas et infectée dans les 50 autres. Ces chiffres sont en contradiction avec ceux de Beger [9] qui montrent que la survenue d’une hypoxémie, d’un choc, d’une insuffisance rénale ou d’une hémorragie digestive est statistiquement plus élevée en cas de surinfection de la nécrose. En pratique, la survenue d’une ou plusieurs défaillances d’organes dès le début de l’évolution d’une PAN impose la recherche systématique d’une surinfection de nécrose et d’une complication chirurgicale.

Tableau V. – Complications chirurgicales des pancréatites aiguës (PA) (d’après Steinberg et Tenner [93]).
Complications
Physiopathologie
Traitement
Nécrose tissulaire Ischémie microvasculaire
- Intrapéritonéale
Côlon, estomac, épiploon, rate, pédicule
vasculaire (splénique et hépatique)
Cf prise en charge chirurgicale (controverse+++)
- Rétropéritonéale
Rein, uretère, graisse, veine cave, aorte
Ischémie microvasculaire
Cf prise en charge chirurgicale (controverse+++)
Infection
Surinfection de la nécrose Antibiotiques - chirurgie
Abcès
Surinfection bactérienne


Antibiotiques – chirurgie
Antibiotiques - drainage/chirurgie
Pseudokyste
Extravasation de liquide pancréatique dans l’espace péripancréatique

Hémorragie gastro-intestinale
Ulcération
Varices gastriques
Rupture de pseudoanévrisme
Ulcération des pédicules vasculaires


Stress, ischémie
Thrombose veine splénique
Nécrose vasculaire
Nécrose vasculaire


Pansement/antisécrétoires
Sclérothérapie/chirurgie
Embolisation/chirurgie
Chirurgie d’hémostase
Rupture et hématome spléniques
Extension de la nécrose et de l’inflammation à la rate
Chirurgie d’hémostase/surveillance
Hydronéphrose du rein droit
Extension de la nécrose et de l’inflammation à l’espace périrénal
Surveillance

Tableau VI. – Complications médicales des pancréatites aiguës (PA) (d’après Steinberg et Tenner [93]).
Complications
Physiopathologie
Traitement
Choc Hypovolémique
Septique
Séquestration
liquidienne/hémorragie
Symptomatique
Coagulopathie
Protéase circulante
Symptomatique
Insuffisance rénale aiguë
Fonctionnelle/nécrose
tubulaire aiguë
Symptomatique
Insuffisance respiratoire aiguë SDRA
Surinfection bactérienne
Atélectasie
Altération du surfactant, relargage de cytokines
Symptomatique
Hyperglycémie
Hypo-insulinisme, hypersécrétion de glucagon
Symptomatique
Hypocalcémie
Hypoalbuminémie, fixation dans la nécrose
Symptomatique
Atteintes cutanées
Nécrose graisseuse métastatique
Aucun
Rétinopathie
Thrombose de l’artère de la rétine
Aucun
Encéphalopathie pancréatique
Hypoperfusion cérébrale, démyélinisation
Aucun


DÉFINITION ET CLASSIFICATION DES LÉSIONS DES PANCRÉATITES AIGUËS NÉCROSANTES
Il existe un polymorphisme des lésions observées au cours des PAN. Ces différentes lésions (nécrose pancréatique et péripancréatique, collections, phlegmons, abcès, ascite, pseudokystes) n’ont pas les mêmes implications pronostiques et thérapeutiques, alors même qu’il existe dans la littérature une confusion terminologique, ces lésions n’ayant pas toujours la même définition (quand elles sont définies). Par exemple, les abcès et les phlegmons peuvent être des lésions stériles ou infectées ! De plus, les études incluent souvent différentes lésions de gravité variable pour étudier un même traitement (pseudokystes, abcès, nécrose...). Cette confusion et cet amalgame rendent les résultats de la littérature difficiles à interpréter, voire ininterprétables.
 Une conférence d’experts réunis à Atlanta en 1992 a donné des définitions précises de ces lésions [15] :
– nécrose : zone diffuse ou focale de parenchyme pancréatique non viable pouvant s’étendre aux espaces extrapancréatiques (fig 1 à 4) ;

– abcès : collection purulente à proximité du pancréas ne contenant pas ou peu de nécrose pancréatique (fig 5) ;
– pseudokyste : formation liquidienne constituée de suc pancréatique, bien collectée au sein d’une paroi fibreuse. Il est la conséquence soit d’un traumatisme, soit d’une pancréatite aiguë ou chronique (fig 6, 7).
En pratique, la nécrose est le plus souvent mal liquéfiée et mal délimitée et survient dans les trois premières semaines d’évolution.
L’abcès est par définition infecté. Il contient un liquide plus ou moins épais, il est bien délimité par un tissu fibreux et apparaît au moins après 2 semaines d’évolution. Le pseudokyste est beaucoup plus tardif, il est liquidien, bien limité par une capsule et stérile ou infecté.


SURINFECTION DE LA NÉCROSE
La prévalence des surinfections de la nécrose est difficile à déterminer car la plupart des études proviennent de centres hospitalo-universitaires ou d’hôpitaux de référence qui, de par leur recrutement, sont à l’origine d’une probable surestimation [105]. On peut cependant penser que 40 à 60 % des PAN s’infectent [6, 38, 93, 105, 108]. Il s’agit d’une infection diffuse des zones pancréatiques et/ou péripancréatiques nécrosées ou inflammatoires. Comme cela a déjà été dit, elle est la principale cause de décès des PAN (70 à 80 %), mais surtout après la première semaine d’évolution. Trois localisations, souvent associées, sont possibles : la nécrose pancréatique proprement dite, les coulées extrapancréatiques et l’ascite réactionnelle.
Les modalités de contamination sont nombreuses [54, 86, 108] et se font par voie hématogène et biliaire, par la veine porte et le foie, par translocation bactérienne depuis le côlon et les lymphatiques pancréatiques, voire par contiguïté depuis le tube digestif ischémique ou nécrosé. Enfin, la surinfection de la nécrose est fréquente après une intervention chirurgicale. Le diagnostic d’infection repose sur la TDM. En effet, les signes cliniques et l’hyperleucocytose n’ont aucune spécificité. La ponction percutanée sous contrôle TDM permet de faire le diagnostic d’infection de nécrose dans 94 % des cas. Si toutes les collections visibles sont ponctionnées, la sensibilité du diagnostic est de 100 % et la spécificité de 98 % [38]. La ponction sous échographie, avec une sensibilité et une spécificité respectivement de 90 et 88 %, peut être une alternative facilement réalisable au lit de patients difficiles à transporter. Elle a également l’avantage de pouvoir être répétée à intervalles rapprochés pour un coût moindre que celui de la TDM [79].
Étant donné que 50 % des surinfections surviennent dans les 15 premiers jours et 20 % dans les 7 premiers [79, 105] et que les complications de la ponction sous TDM semblent être exceptionnelles [38], il faut systématiquement effectuer une ponction dès l’admission s’il existe une défaillance d’organes, et en cours d’évolution si le tableau clinique s’aggrave.
L’analyse de la littérature montre que la nature des germes retrouvés est très variable d’une série à l’autre [54, 74, 79, 86, 105] :
– si l’infection semble être le plus souvent monomicrobienne, cela est loin d’être une règle puisque les infections polymicrobiennes sont retrouvées dans 13 à 60 % des cas. Cependant, le caractère polymicrobien est plus fréquent dans les abcès que dans les infections de nécrose ;
– les germes les plus fréquents sont les bacilles à Gram négatif de type entérobactéries avec une nette prédominance d’Escherichia coli (30 à 50 % de tous les germes) ;
– le taux d’anaérobies reste relativement bas, de l’ordre de 4 à 15%, probablement à cause de leur grande fragilité (transport et culture microbiologique) ;
– les infections à Candida sp. sont rares : 4 à 19%;
– Staphylococcus sp. est retrouvé dans 2 à 57% des cas et Enterococcus sp. dans 5 à 40% (le plus souvent il s’agit d’une infection polymicrobienne) ;
– quant à Pseudomonas sp., il est présent dans 0 à 20% des prélèvements.
Ces chiffres extrêmement variables s’expliquent en grande partie par le fait que les séries publiées sont souvent inhomogènes et difficilement comparables entre elles : ponction sous TDM, découverte opératoire, infection après chirurgie d’une nécrose initialement stérile, patients ayant déjà été traités par des antibiotiques... Et il est plus que probable que l’écologie soit différente si la surinfection est postopératoire ou en cas de traitement antibiotique antérieur ou concomitant.
Il est également possible que l’utilisation d’une « antibiothérapie prophylactique », qui est un sujet de controverses, s’accompagne d’une augmentation de la prévalence des infections à Candida sp., à cocci à Gram positif, voire à bacilles à Gram négatif multirésistants.

Traitement de pancréatite aiguë nécrosante



Le traitement des PAN est avant tout symptomatique et vise à :
– mettre au repos le pancréas ;
– pallier l’insuffisance pancréatique ;
– corriger les désordres métaboliques et hydroélectrolytiques ;
– assurer l’analgésie ;
– prévenir et traiter les défaillances d’organes (défaillance respiratoire, hémodynamique, choc, CIVD, insuffisance rénale...) ;
– diagnostiquer et traiter les complications (infection de nécrose +++).
Il existe de très nombreuses stratégies. À titre d’exemple, plus de 20 articles différents ont été publiés entre 1996 et 1999, uniquement sur la stratégie chirurgicale ! Étant donné le caractère très hétérogène des PAN, aucune stratégie n’a montré de bénéfice statistiquement significatif, d’autant plus que très peu d’études évaluent les différents traitements et les différentes stratégies de façon prospective sur des groupes de patients homogènes et comparables.
À l’heure actuelle, il persiste des controverses sur plusieurs points :
– l’antibioprophylaxie et la décontamination digestive sélective (DDS) ;
– la place et les indications de la chirurgie de la nécrose stérile ;
– les indications de la chirurgie biliaire et de la cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (CPRE) ;
– l’intérêt des traitements médicamenteux spécifiques ;
– l’intérêt et les risques de l’alimentation entérale (AE) précoce.

SONDE GASTRIQUE
Elle est indiquée s’il existe une intolérance digestive ou des troubles du transit et pourrait avoir un rôle analgésique.
En revanche, l’aspiration digestive et le jeûne ne semblent avoir aucune influence sur le pronostic [93].

PRISE EN CHARGE DE L’ANALGÉSIE
L’analgésie est un problème difficile. La réfrigération externe de l’abdomen par vessie de glace est un moyen simple, mais efficace.
La lidocaïne en perfusion peut être utilisée pour son effet antalgique modéré et pour son action anti-inflammatoire. Le paracétamol est également largement prescrit. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont contre-indiqués dans ce contexte à haut risque hémorragique. Les morphiniques sont souvent nécessaires malgré les risques de dépression respiratoire, d’iléus digestif et d’augmentation du tonus du sphincter d’Oddi. Il est cependant certain que l’utilisation d’une analgésie contrôlée par le patient (ACP) est indiquée chez les patients hyperalgiques.

INTÉRÊT DES TRAITEMENTS MÉDICAMENTEUX
Antisécrétoires
Leur but théorique est de limiter les lésions des acini par l’intermédiaire d’une diminution de la pression intracanalaire.
Aucun des traitements utilisés n’a fait la preuve d’un effet bénéfique ou d’une efficacité susceptible de modifier l’évolution d’une PA [93, 108], que ce soit la cimétidine ou la ranitidine, les antihistaminiques, la calcitonine ou le glucagon. La plupart des travaux les ont évalués sur des collectifs très faibles et ont généralement inclus des PA peu graves. De plus, il est probable que les sécrétions pancréatiques sont déjà diminuées au cours des PA.Enfin, les antisécrétoires pourraient, par accumulation de zymogène dans les cellules acineuses, aggraver la destruction enzymatique du pancréas.
Somatostatine et octréotide
La somatostatine (SMS) et ses analogues semblent avoir un effet bénéfique sur les modèles expérimentaux de PAN [108].Cet effet s’explique par une puissante inhibition des sécrétions du pancréas, mais également par un effet cytoprotecteur, une stimulation des cellules phagocytaires et une diminution de production par les monocytes périphériques de TNF-á et d’interféron (INF)-ç (effet intervenant dans la modulation du choc et du SDRA [syndrome de détresse respiratoire aiguë]) [108]. Mais, dans la plupart des modèles expérimentaux, l’effet de la SMS ne semble exister que si elle est administrée avant le déclenchement de la PA ou au tout début de son évolution, ce qui est très différent des conditions rencontrées en clinique. D’autre part, son effet vasoconstricteur pourrait, théoriquement, augmenter l’ischémie du pancréas. Une méta-analyse [20] comprenant 400 PA suggère une amélioration pronostique globale, mais les six études retenues incluent des formes peu graves de la maladie (mortalité globale de 10 %). Dans les formes plus graves, aucune étude clinique randomisée n’a prouvé l’effet bénéfique de la SMS ou de l’octréotide [61, 73]. Il n’existe donc aucun argument en faveur de leur utilisation dans les PAN et, si un effet bénéfique existe, il n’a que très peu d’impact clinique.
Inhibiteurs des protéases (aprotinine, gabexate mésilate)
Aucune étude clinique n’a montré l’intérêt de leur utilisation. Ils n’apportent aucun bénéfice ni sur l’évolution, ni sur la morbidité et la mortalité, probablement parce qu’ils sont utilisés après le déclenchement de la cascade physiopathologique [19, 21]. Seule l’étude de Takada [94] montre une diminution de la mortalité lors de l’utilisation de gabexate mésilate en perfusion intra-artérielle régionale continue pendant 7 jours. Mais, ici encore, très peu de malades ont été inclus. Il s’agit de PAN peu graves et, surtout, on a associé de l’imipénème au traitement inhibiteur par la même voie.
Au total, il n’existe aucune donnée suffisante pour recommander leur utilisation, quelle que soit la voie d’administration (intraveineuse, intra-artérielle ou péritonéale).
Inhibiteur du facteur de l’activation plaquettaire
Le PAF est une cytokine qui est responsable d’une activation de l’agrégation plaquettaire, d’une
augmentation de l’activité des neutrophiles et des monocytes, et d’une augmentation de la perméabilité vasculaire. Alors que deux études expérimentales montrent des résultats contradictoires [49, 84], l’utilisation d’un inhibiteur du PAF, le lexipafant, dans une étude clinique prospective randomisée incluant 50 PA de gravité modérée, s’accompagne d’une diminution significative du nombre de défaillances d’organes et d’une tendance à la baisse de la mortalité [62].
Avant de recommander son utilisation dans les PAN, il est nécessaire de disposer des résultats d’études avec des effectifs plus importants et mieux classés en terme de gravité.

ANTIBIOTHÉRAPIE ET PANCRÉATITES AIGUËS NÉCROSANTES
L’efficacité d’une antibiothérapie, quelle soit curative ou « prophylactique » va dépendre de l’écologie des micro-organismes habituellement responsables des surinfections de nécrose (cf supra) et des concentrations des antibiotiques dans les lésions des PAN.
Ces concentrations sont différentes suivant le type de lésion (tissu inflammatoire, nécrose, ascite, abcès, pseudokyste) et a fortiori très différentes de celles existant dans un pancréas sain. D’autre part, comme dans toute infection grave, les conditions cinétiques et dynamiques sont fortement modifiées par l’existence d’une hypovolémie, d’un troisième secteur, d’une hypoprotidémie ou d’une insuffisance rénale, et par les conditions locales (pH, présence de débris cellulaires, coque fibreuse...).
Foitzik [34], dans un modèle expérimental chez le rat, montre que, durant l’évolution d’une PA, les concentrations pancréatiques des antibiotiques peuvent varier dans le temps en fonction des modifications morphologiques des tissus pancréatiques (oedème, inflammation, nécrose) et de celles de la microcirculation. Par exemple, les concentrations importantes d’imipénème au début d’une PA vont diminuer en même temps que l’oedème alors que la nécrose apparaît. À l’inverse, les concentrations de céfotaxime basses en phase d’oedème tendent à augmenter avec la normalisation de la microcirculation et de l’oedème.
À partir des données expérimentales et cliniques récentes de la littérature [8, 11, 74, 92, 98], il est possible de distinguer trois groupes d’antibiotiques selon leur pénétration dans les lésions de PAN (tableau VII).
Une antibiothérapie prophylactique est-elle justifiée de façon précoce ? Cette question repose sur la relation qui existe entre surinfection de nécrose et mortalité, l’utilisation d’une antibiothérapie prophylactique devant en théorie réduire la mortalité et la morbidité des PAN. Les études initiales, qui utilisaient de l’ampicilline ou de l’amoxicilline, n’ont montré aucun effet bénéfique [74, 108], ce qui n’est pas étonnant puisque les aminopénicillines diffusent mal dans les lésions pancréatiques [98]. Mais les modèles expérimentaux récents [74, 108] et cinq études cliniques publiées depuis 1993 ont relancé le débat et sont à l’origine de l’existence d’une controverse :
– Pederzoli [70], dans une étude multicentrique randomisée ouverte, inclut 74 PAN sévères (critère de Ranson moyen : 3,7 nécrose prouvée par TDM), qui sont randomisées en deux groupes : imipénème 500 mg/8 heures pendant 14 jours versus absence d’antibiothérapie initiale.
Dans le groupe contrôle, 30 % des patients développent une surinfection de nécrose contre 12 % dans le groupe imipénème (p < 0,001).Mais l’analyse des résultats montre que les deux groupes ne sont pas de gravité identique, que dans le groupe contrôle, certains patients reçoivent des antibiotiques pour des infections nosocomiales « non pancréatiques », et qu’enfin il n’existe pas de différence en termes de mortalité ni de survenue de défaillances d’organes ;
– Sainio [87],
dans une étude prospective randomisée, compare l’absence d’antibiothérapie précoce à l’utilisation de céfuroxime (1,5 g/8 heures jusqu’à guérison, avec un maximum de 14 jours de traitement). Il existe une diminution significative de la mortalité et du nombre total d’épisodes infectieux (mais il s’agit essentiellement d’infections urinaires ou sur cathéter) dans le groupe céfuroxime.
En revanche, il n’existe aucune différence sur le pourcentage d’infection de nécrose et les deux groupes sont comparables quant à la durée de séjour et au nombre d’indications opératoires ou de drainages percutanés. De plus, les 60 patients inclus sont de gravité variable et, entre le sixième et le neuvième jour, 20 patients dans le groupe céfuroxime, ainsi que 23 patients dans le groupe contrôle reçoivent une antibiothérapie, soit pour une infection intercurrente, soit en raison d’un tableau évolutif avec des signes infectieux.
Et, en l’absence de prélèvements microbiologiques positifs, le traitement probabiliste associe une antibiothérapie à très large spectre :
 vancomycine, imipénème et fluconazole 
– Schwarz [90] compare de façon prospective 20 PAN randomisées en un groupe contrôle et un groupe recevant l’association ofloxacine (200 mg/12 heures) et métronidazole (500 mg/12 heures). Il n’existe pas de différence entre les deux groupes ni sur la mortalité, ni sur le pourcentage d’infection de nécrose. En revanche, l’amélioration clinique est significativement plus rapide dans le groupe recevant des antibiotiques (modification de l’APACHE II entre j1, j5 et j10) ;
– Delcenserie [23], dans une étude prospective randomisée qui inclut 23 PAN alcooliques (score TDM supérieur ou égal au stade D), montre que l’association ceftazidime-amikacine-métronidazole pendant 10 jours s’accompagne d’une tendance à la diminution du nombre de décès et d’une baisse significative du nombre d’infections de nécrose et du nombre de chocs septiques ;
– Ho [41] analyse dans une étude rétrospective trois périodes différentes : pas d’antibiothérapie (50 PAN), antibiothérapie variable sans protocole (55 PAN), imipénème 500 mg/8 heures pendant 4 semaines (75 PAN). Les taux d’infection de nécrose diminuent progressivement de 76 % à 45 % (p = 0,03), puis à 27 % (p = 0,04). En revanche, il n’existe aucune modification significative de la mortalité.
Tous ces travaux présentent des biais méthodologiques : pas d’étude en double aveugle, effectifs trop faibles (d’où l’impossibilité de mettre en évidence des différences significatives par manque de puissance statistique), critères d’inclusion ne permettant pas d’avoir des séries homogènes en termes de gravité, et même si ces résultats suggèrent qu’une antibiothérapie prophylactique est indiquée dans les PAN les plus graves [6, 74, 108], ils paraissent insuffisants pour en faire un standard de traitement [7, 36]. De nouvelles études prospectives randomisées en double aveugle sont nécessaires pour pouvoir trancher. Il est également indispensable de définir le degré minimal de sévérité où un gain réel de la prophylaxie existe. Pour cela, d’autres critères de jugement que la mortalité et les indications de la chirurgie et des drainages devront sans doute être validés (par exemple, l’apparition de défaillances d’organes...). Il faudra également déterminer si les baisses de la mortalité et de la morbidité sont attribuables à la diminution des infections de nécrose ou à celle des infections extrapancréatiques, évaluer le risque écologique d’une antibioprophylaxie prolongée et vérifier si, à gravité égale, le risque infectieux est le même pour les pancréatites alcooliques et les pancréatites biliaires. Si une décision d’antibioprophylaxie est prise, il est probable que l’imipénème (malgré son coût) ou l’association fluoroquinolonemétronidazole (malgré son absence d’action sur Enterococcus sp. et les streptocoques) soient les mieux adaptés.
Il n’est cependant pas certain que les entérocoques doivent être pris en compte [36, 74]. La durée de la prophylaxie n’est également pas clairement définie. Il semble cependant que l’antibiothérapie doive être précoce et poursuivie pendant 3 à 4 semaines, puisque le risque de surinfection existe dès le début et que le risque cumulé augmente avec le temps pour devenir stable après la troisième ou la quatrième semaine [38, 79, 83, 105].
La DDS peut-elle être une alternative ? Étant donné le rôle joué par le tube digestif dans les surinfections de nécrose [54, 86, 108], il est logique de penser qu’une DDS puisse en diminuer l’incidence, surtout qu’il semble qu’une colonisation intestinale par les bacilles à Gram négatif (Escherichia coli excepté) soit un facteur de risque majeur d’infection de nécrose et de mortalité [53]. De plus, plusieurs modèles expérimentaux de PA montrent un bénéfice de la DDS : diminution du nombre de bactéries retrouvées dans le pancréas et/ou diminution de la mortalité [7, 36, 74, 108].

Chez l’homme, une seule étude clinique prospective et randomisée a été effectuée. Elle montre que la DDS (colistine, norfloxacine et amphotéricine B) diminue l’incidence des infections de nécrose, le nombre de laparotomies et la mortalité secondaire (supérieure à 15 jours) et qu’en analyse multivariée, la DDS est un facteur de bon pronostic [54]. Cependant, deux biais existent dans ce travail. D’une part, de la céfotaxime est administrée en intraveineuse dans le groupe DDS. Et d’autre part, la différence sur la mortalité ne devient significative que dans un sous-groupe « PAN graves » qui a été défini a posteriori.
D’une façon plus générale, il faut rappeler que les programmes de DDS en réanimation sont associés à l’émergence de cocci à Gram positif, et en particulier de Staphylococcus aureus résistant à la méticilline, et que les protocoles de DDS sont très astreignants pour l’équipe soignante, si bien que la plupart des équipes de réanimation ne les utilisent pas.

Tableau VII. – Classification des antibiotiques selon leur pénétration dans la nécrose pancréatique et les concentrations minimales inhibitrices (CMI) de la plupart des germes isolés dans la nécrose pancréatique.
Groupe A
Concentrations basses < CMI
- Aminosides
- Aminopénicillines
- Céphalosporines de première génération
Groupe B
Concentrations individuelles variables, imprévisibles
- Mezlocilline
- Pipéracilline
- Céphalosporines de troisième génération (céfotaxime+++)
Groupe C
Concentrations élevées > CMI
- Imipénème
- Quinolones (péfloxacine, ciprofloxacine+++)
- Imidazolés
- Céfopérazone


SUPPORT NUTRITIONNEL
La nutrition précoce fait partie intégrante de la prise en charge de ces patients qui deviennent rapidement dénutris. Classiquement, la NE est contre-indiquée et la nutrition parentérale totale (NPT) est le standard de traitement. En fait, cette attitude thérapeutique s’appuie sur le principe de la mise au repos du pancréas, alors que les fonctions pancréatiques n’ont jamais été explorées au cours des PAN. Il semble même que la NPT n’ait aucun effet sur la mortalité ni sur l’incidence et la sévérité des défaillances d’organes au cours des PAN [108], alors que ses effets indésirables sont bien connus chez les patients de réanimation (augmentation de la translocation bactérienne à partir du tube digestif, effets immunosuppresseurs, augmentation des complications infectieuses et des sepsis liés aux cathéters, augmentation importante des coûts...). Pour toutes ces raisons, il existe une tendance, depuis plus de 10 ans, à utiliser de façon préférentielle la NE précoce chez tous les patients de réanimation.
Dans le cadre des PA modérées ou peu sévères, il est classique d’utiliser une NE soit par jéjunostomie (après l’angle de Treitz, ce qui théoriquement n’a aucune influence sur le volume des sécrétions pancréatiques exocrines), soit par l’intermédiaire d’une sonde lestée gastrique ou transpylorique (ces dernières permettant une alimentation malgré l’existence d’une gastroparésie) [108]. En revanche, il n’existe que deux études prospectives randomisées qui ont comparé la NPT et la NE dans des PAN sévères :
– Kalfarentzos [45] montre que la NE précoce (avant la 48e heure), par un tube nasojéjunal, avec une diète semi-élémentaire, a moins d’effets indésirables que la NPT (besoins en insuline, inflation hydrosodée, infections liées aux cathéters...).
Mais surtout, le groupe NE présente moins de complications septiques pancréatiques et extrapancréatiques ;
– pour Windsor [109], la NE à la phase aiguë des PAN semble moduler de façon bénéfique les réponses inflammatoires, alors que les capacités antioxydatives diminuent dans le groupe NPT. Les critères de jugement sont l’APACHE II et le dosage plasmatique de la CRP qui diminuent plus vite et de façon plus marquée dans le groupe NE.
Ces résultats, qui plaident en faveur de la NE précoce, doivent être pondérés par ceux d’une étude portant sur la reprise de l’alimentation orale. Dans un collectif de 116 patients ayant présenté une PA depuis moins de 30 jours, 21 % d’entre eux ont présenté une récidive douloureuse lors de la réalimentation (dans les 2 premiers jours pour la moitié d’entre eux), alors qu’une récidive de PA avec rechute symptomatique et morphologique est survenue dans 4 %des cas. L’analyse multivariée permet de retenir trois facteurs de risque indépendants : un score de Balthazar supérieur ou égal à D, l’existence d’un syndrome douloureux initial de plus de 11 jours et une lipasémie supérieure à trois fois la normale dans les 48 heures précédant la réalimentation [52].
Au total, sur les données de la littérature, on peut conclure que la NE n’est pas plus délétère que la NPT et semble même présenter des avantages.
On peut faire les recommandations suivantes :
– PA modérée, non compliquée : pas de support alimentaire, reprise d’une alimentation orale précoce ;
– en cas d’intervention chirurgicale : mise en place peropératoire d’une jéjunostomie ou, mieux, d’un tube nasojéjunal ;
– si score de Ranson supérieur à 3 : mise en route d’un support nutritionnel à j2 ou j3, de préférence par NE (augmentation très progressive des apports +++), avec relais par NPT en cas d’intolérance.

DIALYSE PÉRITONÉALE ET DRAINAGE DU CANAL THORACIQUE
Le principe de la dialyse péritonéale repose sur l’épuration des enzymes protéolytiques et lipolytiques, des prostaglandines, des peptides vasoactifs libérés dans l’abdomen, qui contient le plus souvent de l’ascite.
La dialyse péritonéale entraîne une amélioration clinique rapide avec disparition du syndrome douloureux, une correction de l’état de choc et une amélioration du tableau respiratoire. En revanche, il ne semble pas que la dialyse péritonéale ait une influence sur la morbidité et la mortalité des PA [43, 59]. Pour Ranson, si le lavage est poursuivi plus de 1 semaine, il semble exister une diminution très marquée de la mortalité attribuable aux surinfections de nécrose et aux abcès (0 % versus 20 % dans le groupe contrôle). Mais ces résultats sont sujets à caution, les patients du groupe contrôle ayant bénéficié d’un lavage péritonéal dans les 48 premières heures [76].
En fait, à l’heure actuelle, la dialyse péritonéale est abandonnée par la plupart des équipes et il n’existe aucune étude contrôlée, randomisée, permettant de conclure à l’existence d’un éventuel bénéfice de la technique.
Le drainage du canal thoracique a été proposé, dans les tableaux de PAN sévère avec SDRA, afin d’éliminer les « agents toxiques » avant leur passage dans la circulation systémique. Même s’il semble exister une amélioration passagère de l’oxygénation et de l’instabilité hémodynamique [25], cette technique ne présente aucun bénéfice prouvé et ne modifie pas l’incidence des complications tardives.
De plus, elle est responsable d’une perte protidique massive et d’un risque de déplétion lymphocytaire majeure si le drainage est prolongé [10].

Prise en charge et stratégies chirurgicales



Le rôle et les indications de la chirurgie restent difficiles à appréhender, car le plus souvent les indications sont soumises aux habitudes des différentes équipes. L’interprétation des résultats de la littérature est souvent difficile, voire impossible, en raison de leur inhomogénéité :
– gravité des patients différente d’une série à l’autre, voire dans la même série, ou tout simplement non définie ;
– utilisation de la même procédure sur différents types de lésions (ou vice versa) souvent à des dates différentes par rapport au début de l’évolution ;
– mélange de lésions infectées et stériles.
Pour toutes ces raisons et par manque d’études prospectives et randomisées, aucune stratégie n’a démontré sa supériorité et de nombreuses controverses persistent. Cependant, depuis une quinzaine d’années, il existe une tendance à restreindre les indications aux patients qui ne survivraient pas sans chirurgie et aux procédures qui ont un bénéfice réel (tableau VIII) [60].

CHIRURGIE ET NÉCROSE STÉRILE
 De réalisation difficile et présentant des risques hémorragiques,
 infectieux ou mécaniques, la chirurgie précoce des coulées de nécrose stérile ne semble pas s’accompagner d’un bénéfice certain et pourrait au contraire aggraver le pronostic [3, 17, 78]. En raison d’une frontière très mal délimitée, en début d’évolution, entre la nécrose et le pancréas sain, la nécrosectomie précoce est souvent soit trop importante avec pancréatectomie associée, soit insuffisante et, dans ce cas, les coulées de nécrose se reconstituent rapidement, d’où lanécessité d’une chirurgie itérative [3, 60] avec donc un risque majeur de surinfection.
Ces arguments peu favorables à la nécrosectomie précoce sont renforcés par le fait que l’évolution des coulées de nécrose se fait spontanément vers la résolution, si elles necommuniquent pas avec un canal pancréatique [3, 101].
Cette notion est confirmée par Bradley [17] qui montre que les patients qui ne s’infectent pas ont une évolution favorable, même s’il existe à l’entrée une défaillance pulmonaire ou rénale. Malgré tous ces arguments qui vont à l’encontre d’une attitude agressive, certains auteurs préconisent une nécrosectomie de principe [78, 80]. Actuellement, il n’existe aucune donnée scientifique permettant de trancher en faveur de l’une ou l’autre des attitudes [6, 60, 80, 108]. Il semble cependant que la majorité des équipes ait abandonné la nécrosectomie précoce de principe en l’absence de surinfection. Cette attitude prudente est toutefois remise en question s’il persiste ou s’il apparaît des défaillances d’organes mal contrôlées par la réanimation [60], ce qui rend pour certains l’indication opératoire impérative [80]. En conclusion, tous les auteurs insistent sur la nécessité urgente de réaliser des études prospectives randomisées dans le but de préciser les indications du traitement conservateur et celles de la chirurgie en cas de nécrose stérile. Elles devraient également permettre de déterminer le rôle de la chirurgie dans la survenue d’une surinfection de nécrose.

CHIRURGIE BILIAIRE ET PANCRÉATITES AIGUËS BILIAIRES
Dans les PA biliaires peu et moyennement sévères, les indications de la chirurgie biliaire sont connues et admises par tous. Le traitement de la lithiase doit être fait pendant l’hospitalisation, mais après normalisation du bilan biologique, toute chirurgie différée exposant au risque de récidive de PA.
En revanche, dans les PAN, les indications et la date de la chirurgie restent très controversées. Plus la chirurgie est réalisée précocement, plus il est fréquent de retrouver des calculs dans le cholédoque, alors qu’à partir du cinquième jour d’évolution, on ne retrouve des calculs que chez 5 % des patients [51]. Il semble en fait que la morbidité (infection de nécrose +++) et la mortalité soient augmentées par la chirurgie biliaire précoce (par laparotomie ou par coelioscopie), surtout pour les PAN les plus sévères [26].
La CPRE est une alternative à la chirurgie permettant de détecter des lithiases dans le cholédoque. Elle est éventuellement associée à une sphinctérotomie et à l’extraction de lithiases [51].
Trois études prospectives comparant la CPRE précoce avec un traitement conservateur montrent que l’incidence des complications, dont la principale est l’angiocholite associée à la PA, reste inchangée dans les formes peu graves, alors qu’elle diminue dans les PAN sévères [28, 35, 66]. En revanche, il n’existe aucune modification de la mortalité et la technique possède sa propre morbidité : hémorragies des voies biliaires, perforation digestive, voire aggravation de la pancréatite dans 1 à 2% des cas [66]. D’autre part, les tentatives de canulation, même entre des mains expertes, ont un taux d’échec de l’ordre de 15 à 20 % en raison de l’oedème duodénal [35, 66]. Il semble recommandable, sur ces données, de réserver les indications de la CPRE avec sphinctérotomie aux formes sévères de PAN dont l’étiologie biliaire est prouvée, alors que dans les PA moins graves,les risques propres à la technique sont sans doute supérieurs au bénéfice attendu. De toute façon, le geste doit être confié à un opérateur entraîné.

CHIRURGIE ET NÉCROSE INFECTÉE
Pour tous les auteurs, la présence d’une nécrose ou d’une collection infectée équivaut à une indication chirurgicale obligatoire et urgente : le débridement chirurgical des zones de nécrose infectées.
Mais, plus que dans tous les autres domaines de la prise en charge  des PA, les techniques et les stratégies chirurgicales sont à ce jour restées des questions d’école. De nombreuses stratégies associent diverses procédures, soit à la demande de façon itérative, soit avec des réinterventions programmées. On peut les regrouper en trois grandes catégories qui associent à la nécrosectomie ou au débridement soit une irrigation-lavage (technique semi-close), soit un drainage clos, soit un packing avec réinterventions itératives programmées. Des techniques de marsupialisation du pancréas [57] et l’utilisation de fermetures éclair [100] ont également été décrites.
Dans toutes les stratégies, sauf les techniques closes, de multiples réinterventions sont le plus souvent nécessaires pour pouvoir éliminer l’ensemble de la nécrose [82]. En raison des nombreuses combinaisons possibles et de leur utilisation à différents moments de l’évolution sur des lésions variées, il est quasiment impossible de déterminer si une stratégie est meilleure qu’une autre. La mortalité est excessivement variable de 10 à 60 %, difficile à interpréter, toujours pour les mêmes raisons d’inhomogénéité des effectifs : gravité variable, indications et date du geste mal définies, voire non définies. De plus, certaines séries mélangent des nécroses infectées et des nécroses stériles !
Pour tenter de faire le point, D’Egidio [22], à partir de données de la littérature parues entre 1975 et 1990, a défini trois groupes de patients en fonction de la stratégie utilisée : nécrosectomie + drainage (n = 516), nécrosectomie + irrigation-lavage (n = 216) et nécrosectomie + reprises chirurgicales programmées (n = 188).
Dans le premier groupe, il existe une surmortalité, alors que c’est dans le troisième qu’il existe le plus de complications abdominales : hémorragies, fistules pancréatiques, lésions du tube digestif... Si on individualise un sous-groupe composé par les nécroses surinfectées, les résultats restent identiques. Cependant, ce travail ne permet pas de préconiser une stratégie plutôt qu’une autre, toujours par manque d’homogénéité dans les effectifs des trois groupes.La fréquence élevée des réinterventions est responsable d’un taux important de complications hémorragiques et de fistules postopératoires du côlon, du grêle, du pancréas, voire de l’estomac [82]. Ces fistules surviennent dans 20 à 40 % des cas et doivent souvent être fermées par voie chirurgicale, dans un second temps [6, 16, 60, 93, 99].


Tableau VIII. – Indications de la chirurgie dans les pancréatites aiguës nécrosantes (d’après McFadden et Redder [60]).
Indications admises
Indications controversées
Diagnostic différentiel Nécrose stérile> 50 %
Pancréatite biliaire persistante Nécrose stable et persistante
Nécrose pancréatique infectée Aggravation du tableau clinique
Abcès pancréatique Existence d’un SDMV
Pseudokyste infecté
Nécrose stérile > 50 %
Pancréatite biliaire persistante Nécrose stable et persistante
Nécrose pancréatique infectée Aggravation du tableau clinique
Abcès pancréatique Existence d’un SDMV
Pseudokyste infecté Chirurgie biliaire précoce
Indication de la CPRE


CHOIX DE LA VOIE D’ABORD
La plupart des auteurs choisissent une voie péritonéale bi-souscostale qui permet une vision globale des lésions tout en respectant l’étage sous-mésocolique [16, 60, 78, 80, 82]. Un abord rétropéritonéal souscostal gauche permet également une bonne exploration [27], mais il ne permet pas d’évacuer une coulée périrénale droite dans 7,5 % des cas, et l’existence d’une hémorragie ou d’une nécrose colique gauche nécessite de transformer l’abord en voie antérieure dans 12,5 % des cas [27].
Aucune étude prospective randomisée n’a étudié l’influence de la voie d’abord sur la mortalité et la morbidité, mais il semble cependant qu’il y ait moins de hernies et de fistules digestives (bien que la fréquence des fistules coliques reste élevée, de l’ordre de 10 à 20 %), dans les abords rétropéritonéaux [16, 99].

D’autre part, à l’inverse d’une voie antérieure, un abord rétropéritonéal peut être répété sans entraîner une perte de substance de la paroi abdominale, qui est le plus souvent suivie d’une éventration [99].

DRAINAGE PERCUTANÉ ET ENDOSCOPIQUE
Aucune étude à ce jour n’a utilisé la classification d’Atlanta [15] qui donne une définition précise aux différentes lésions rencontrées au cours des PAN, si bien que la grande majorité des séries de drainage percutané mélangent abcès, nécroses infectées et pseudokystes, d’où des taux d’échec variables de 20 à 80 % [2, 40]. Comme ces échecs sont suivis d’un geste chirurgical, il est également impossible d’évaluer l’influence du drainage percutané sur la mortalité et la morbidité.
Dans le cas de la nécrose, stérile ou infectée, l’utilisation des drains de petit calibre (12 ou 14F) s’accompagne d’un taux d’échec proche de 80 %, d’où la nécessité d’un geste chirurgical secondaire, alors que l’utilisation de drains de gros calibre (24 ou 28F) associée à une irrigation-lavage continue de 2 à 3 L/24 heures, en permettant plus facilement l’évacuation des débris nécrotiques, entraîne un taux de succès de l’ordre de 50 à 70 % [6, 40]. Mais, en contrepartie, le nombre de fistules digestives augmente de façon importante (près d’un patient sur deux), ainsi que la durée de séjour [40].
En revanche, des taux de succès beaucoup plus importants, de l’ordre de 70 à 80 %, existent quand les indications sont limitées aux abcès et aux pseudokystes tels qu’ils sont définis dans la classification d’Atlanta [2, 39].
Enfin, il faut rappeler que le drainage percutané d’une lésion stérile s’accompagne d’un risque de surinfection important, qui est proportionnel à la durée du drainage.
Des techniques de drainage endoscopique par voie transgastrique ou transduodénale, ont été récemment proposées sur des abcès et des pseudokystes (infectés ou stériles) avec un taux de succès de 80 % [6], la majorité des échecs étant liée à des hémorragies ou à des perforations digestives nécessitant une intervention chirurgicale secondaire. En pratique, la prise en charge thérapeutique des PAN repose sur une évaluation individuelle, patient par patient (fig 8), qui dépend essentiellement de la gravité du tableau clinique et du caractère infecté ou stérile des lésions. Mais la définition de la meilleure stratégie possible se heurte à un manque de preuves scientifiques, si bien que de nombreuses décisions restent des questions d’école.
Cette approche thérapeutique doit absolument être multidisciplinaire.

Évolution à moyen et long termes de pancréatite aiguë nécrosante




La majorité des patients présentent un déficit de la fonction exocrine dans les suites immédiates de la phase aiguë [64]. La fonction endocrine est également anormale chez un certain nombre de patients qui sortent des services de réanimation avec un traitement par insuline. La morbidité à long terme reste élevée. Pour Bozkurt [14], la fonction exocrine, évaluée 12 à 18 mois après une PAN, est normale dans seulement 16 % des cas, alors qu’il existe une insuffisance exocrine sévère chez 6 % des patients. Cette prévalence très élevée s’explique par le fait que le pancréas exocrine a été exploré par des tests spécifiques très sensibles. Si, en revanche, on ne considère que les signes cliniques d’insuffisance exocrine, il semble que un quart des patients présentent une stéatorrhée ou des douleurs abdominales après un repas riche en graisses [99].
La morbidité à long terme sur la fonction endocrine est également élevée. Les chiffres retrouvés dans la littérature sont cependant très différents d’une série à l’autre, la prévalence du diabète variant de 13 à 50 % et celle de l’intolérance au glucose de 11 à 60 % [99].

Après une PAN, le risque d’évolution vers une insuffisance pancréatique semble être corrélé avec un score APACHE II supérieur à 14 à l’admission et avec l’étendue initiale de la nécrose. Le risque de voir apparaître un diabète, une stéatorrhée ou l’association des deux est associé à une nécrose de respectivement 52 %, 66 % et 67 % de la totalité du parenchyme pancréatique [99]. Cette notion qui relie l’importance de la nécrose à l’insuffisance pancréatique explique sans doute les variations importantes de la prévalence du diabète après une PAN.
Les insuffisances exocrines ont tendance à s’améliorer dans le temps, avec une diminution de la stéatorrhée et la disparition des douleurs abdominales après l’absorption de graisse, alors que l’évolution du diabète se fait généralement vers une aggravation progressive [99].

Points essentiels.
- Les pancréatites aiguës nécrosantes (PAN) ou nécroticohémorragiques représentent 10 à 25 %de toutes les formes de PA. Leur taux de mortalité est élevé, variant entre 25 et 70 %.
- Les étiologies sont multiples mais largement dominées par les lithiases biliaires (45 %) et les intoxications éthyliques (35 %).
- Les mécanismes physiopathologiques restent obscurs et reposent sur deux théories probablement associées : la théorie canalaire et la théorie acineuse, qui aboutissent à une cascade d’événements responsables d’une libération massive d’enzymes protéolytiques activées. Des phénomènes d’ischémie du pancréas sont vraisemblablement responsables du passage des formes oedémateuses aux formes nécrosantes.
- Leur prise en charge doit être multidisciplinaire.
- La démarche diagnostique a trois buts principaux étroitement intriqués : faire le diagnostic positif, évaluer la sévérité, rechercher une ou des complications qui peuvent être présentes dès l’admission.
- C’est l’apparition de défaillances d’organes et surtout l’évolution vers un SDMV qui font toute la gravité des PAN.
- La surinfection de la nécrose survient dans 40 à 60 % des PAN. Son diagnostic repose sur des ponctions percutanées guidées par la TDM.
· La prise en charge est avant tout symptomatique car il n’existe aucun traitement spécifique. Aucune stratégie thérapeutique n’a à ce jour montré un avantage significatif.
- Malgré un certain nombre de controverses et l’existence de stratégies reposant sur des habitudes d’écoles, il est possible de dégager quelques grands principes :
– il n’existe pas encore de consensus sur l’antibiothérapie prophylactique au long cours, d’autant plus qu’une telle décision doit tenir compte des impératifs cinétiques de diffusion dans le pancréas et les différents types de lésion ;
– la nutrition entérale précoce doit être débutée dès j2-j3, avec une augmentation progressive des apports et relais par une nutrition parentérale uniquement en cas d’intolérance ;
– la chirurgie n’a pas d’indications si la nécrose est stérile, alors que l’existence d’une nécrose ou d’une collection infectée a des indications chirurgicales urgentes. Le traitement de la lithiase biliaire doit être fait après normalisation du tableau clinique, à distance de toute complication. La CPRE, éventuellement associée à une sphinctérotomie, est réservée aux formes les plus sévères de PAN dont l’étiologie biliaire est prouvée. Elle doit alors être précoce et confiée à un opérateur entraîné.
- L’évolution à moyen et long termes est marquée par un déficit de la fonction exocrine qui a tendance à s’améliorer dans le temps et par des anomalies de la fonction endocrine dont l’évolution se fait habituellement vers une aggravation progressive du diabète.


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