Les différents états de choc





Définition

Le choc est un état d’insuffisance de perfusion des organes vitaux, à l’origine d’une inégalité entre la demande et l’apport d’oxygène.

En fonction de leur pathogénie, cinq groupes principaux de choc sont distingués :
  • Choc hypovolémique
  • Choc cardiogénique
  • Choc anaphylactique
  • Choc septique
  • Choc neurogénique
 
Diagnostic instrumental général

Dans toutes les formes de choc, les paramètres diagnostiques élémentaires suivants sont à déterminer :

  • Pression artérielle systolique (PAS), pression artérielle moyenne (PAM) et pression artérielle diastolique (PAD), déterminées par des mesures ascillométriques rapprochées (à défaut mesure de la pression artérielle par méthode auscultatoire ou détermination approximative de la PAS par palpation du pouls).

  • Surveillance ECG continue.


  • Détermination de la fréquence cardiaque, si possible à partir de l’activité mécanique du cœur par oxymétrie de pouls).

  • Mesure de la SpO2 par oxymétrie de pouls. En cas de SpO2 < 90% (correspondant à une PaO2 d’environ 60 mmHg), la FiO2 doit être immédiatement augmentée par l’apport d’oxygène, le cas échéant par recours à la ventilation contrôlée.


  • Chez le patient ventilé, surveillance de la PETCO2 par capnographie.


                              Choc hypovolémique



Pathogénie et physiopathologie

Le choc hypovolémique se caractérise par une précharge cardiaque fortement diminuée et peut être subdivisé en quatre formes pathogéniques :

  • Choc hémorragique suite à une perte sanguine aigue, du fait d’une hémorragie aigue externe (par exemple : plaie par piqûre ou coupure) ou interne (par exemple : hémorragie gastro-intestinale, rupture d’anévrysme aortique) sans lésion tissulaire majeure.
  • Choc hypovolémique au sens strict (déshydratation), suite à une diminution brutale du volume plasmatique circulant sans hémorragie, du fait de pertes liquidiennes externes ou internes (par exemple : diarrhées profuses, vomissements persistants, diabète insipide, 3 éme secteur en cas d’occlusion) ou d’apport liquidien inadapté (par exemple : vieillards ne percevant pas la sensation de soif). L’hématocrite est augmenté.
  • Choc traumatique-hémorragique, lié à une hémorragie aigue avec des lésions tissulaires étendues et libération de médiateurs, du fait d’agents pathologiques physiques ou chimiques extérieurs et traumatisme direct des parties molles, organes et os (polytraumatisme).
  • Choc traumatique-hypovolémique suite à une réduction sévère du volume plasmatique circulant sans perte sanguine, associée à des lésions tissulaires étendues et à une libération conséquente de médiateurs, du fait de brûlures ou d’érosions et de plaies cutanées étendues. L’hématocrite est augmenté.

La diminution de la pression artérielle et du débit cardiaque activent principalement le sympatho-adrénergique. La libération accrue de noradrénaline postganglionnaire stimule les récepteurs alpha adrénergiques, à l’origine d’une vasoconstriction périphérique avec phénomène de « centralisation » de la circulation et état de bas débit, en particulier au niveau de la peau, des muscles, du territoire splanchnique et des reins. Parallèlement, la libération d’adrénaline par la médullo-surrénale stimule lesβ-récepteurs, à l’origine d’une élévation de la contractilité et de la fréquence cardiaques. Cette réaction préserve autant que possible la perfusion du SNC et du myocarde.
Si les mécanismes de compensation sont dépassés, cela conduit à une perturbation de la microcirculation, induisant une hypoxie tissulaire avec activation des facteurs de coagulation, de la fibrinolyse, du complément et du système Kinine-Kallikréine, associée à la libération de nombreux médiateurs (leucotriènes, thrombaoxane, cytokines telles TNFalpha, IL-6 et IL-8, etc.) qui lèsent l’endothélium capillaire et susceptibles, en fin de compte, de provoquer un SIRS avec défaillance polyviscérale (MODS), etc.
Diagnostic
      Symptomatologie générale et examen clinique
  • Etat d’agitation et le cas échéant, troubles de la conscience du fait d’une hypoxie cérébrale.
  • Pâleur cutanée avec sueurs froides du fait de la vasoconstriction ; le cas échéant, cyanose par épuisement des réserves d’oxygène.
  • Tachypnée et hyperventilation, suite à l’hypoxie et l’acidose métabolique.
  • Hypotension et tachycardie, liées à l’hypovolémie et l’activation sympatho-adrénergique.
  • Oligurie, témoin du bas débit rénal.

Diagnostic de base

Chez tout patient suspect de choc hémorragique ou traumatique-hémorragique, la recherche de sources de saignement s’impose.
Cette recherche comporte un examen corporel systématique. Le tableau clinique, associé aux paramètres diagnostiques de base envisagés plus haut (en particulier l’importance de l’hypotension et de la tachycardie, ainsi que le rapport de ces grandeurs dans l’index de choc), permet une évaluation clinique d’orientation du choc hypovolémique. De plus, des facteurs individuels tels que l’âge, les maladies associées et le traitement en cours sont aussi à prendre en compte.

En principe, une PAS <90 mmHg, associée à une tachycardie et une perte sanguine ou volumique constatée ou supposée, est un signe caractéristique de l’état de choc.

     Diagnostic avancé
Il repose sur les éléments suivants :
  • Mise en place d’un KTC de gros calibre, pour optimiser la compensation volumique, mesurer la PVC et les gaz du sang veineux central (valeur normal : 70-75%).
  • Mesure invasive de la PA, en vue de la surveillance continue de l’état circulatoire et de la détermination des gaz du sang artériel.
  • Mesure de la concentration d’Hb, pour l’évaluation de la perte sanguine visible et occulte. Au stade initial du choc hémorragique et traumatique-hémorragique, la concentration d’Hb reste d’abord normale (la perte érythrocytaire et plasmatique étant équivalente), alors que dans le choc hypovolémique au sens strict, ainsi que dans le choc traumatique-hypovolémique, la concentration d’Hb et l’Ht sont augmentés.
  • Bilan de la coagulation, avec numération plaquettaire, temps de prothrombine (INR, temps de Quick), TCA, PTT, AT III et fibrinogène.
  • Mesure de la concentration plasmatique de lactate, pour évaluer le degré de perturbation de la microcirculation.
  • Détermination de la concentration plasmatique de CPK pour l’évaluation des dégâts musculaires (crush syndrome), ainsi que de la lipase plasmatique à la recherche d’une éventuelle atteinte pancréatique.
  • Mise en place d’une sonde vésicale à demeure pour la mesure de la diurèse horaire (limite inférieur de la normale : 0,5 ml/kg/h).
  • Mesure continue de la température corporelle centrale (une température < 35° C altère la coagulation).

En fonction de la situation, le diagnostic est complété par une échographie, des investigation radiologiques (avec TDM et angiographie), ainsi qu’une endoscopie d’urgence. Un diagnostic hémodynamique spécialisé au moyen d’une analyse continue du contour de l’onde de pouls artériel ou d’un KTAP n’est indiqué qu’en cas de choc hypovolémique prolongé et dont le traitement requiert l’administration de catécholamines. Dans ce cas particulier, l’échocardiographie permet aussi une évaluation semi-quantitative de la volémie.  
Traitement
Bases fondamentales

Le but initial du traitement est le rétablissement d’une normovolémie avec des solutions colloïdes et cristalloïdes, au prix d’une dilution des composés sanguins restant, imposant quelquefois la substitution sélective par des dérivés sanguins.

Les mesures thérapeutiques générales comportent les éléments suivants :
  • Mise en place d’au moins deux accès veineux de gros calibre (pli du coude, avant-bras, veine jugulaire externe).
  • En principe, si la mise en place d’un cathéter veineux central n’est pas indiquée au stade préhospitalier, elle s’impose de façon urgente lors de la prise en charge initiale en milieu hospitalier. Le recours à des cathéters adaptés (par exemple à trois lumières, 2 x 12 G et 1 x 16 G) permet des débits élevés et la mesure simultanée de la PVC (valeur cible : 10 mmHg).
  • Pour prévenir toute hypoxie, les patients sont ventilés initialement avec une FiO2 de 1,0 et une PEEP de 5 mmHg.
  • L’abaissement de la température centrale est à prévenir, du fait de ses effets négatifs sur la coagulation et le déclenchement de troubles du rythme.

Une élévation de la FiO2 de 0,21 à 1,0 (par augmentation de la quantité d’O2 dissout de 0,3 à 2,3 ml/dl) équivalent à une élévation de la concentration d’Hb de 1,5 g/dl, ce qui correspond, chez un adulte de poids normal, à l’administration d’environ deux concentré de globules rouges (CGR).

Compensation volumique
                                                 
Bases fondamentales
L’eau corporelle totale correspond à environ 60% du poids corporelle (PC). Elle se répartit en EIC (40% du PC) et en EEC (20% du PC), lui-même subdivisé en eau interstitielle (16% du PC) et plasmatique (4 % du PC). Le volume sanguin représente 7 – 8% du PC, dont 45% constituent l’Ht. Le volume intravasculaire est maintenu par la pression colloïde -osmotique (PCO ; ou pression oncotique) des protéines plasmatiques.

Compte tenu du grand éventail de compensation de l’offre d’oxygène, ainsi que de la coagulation plasmatique et cellulaire, des pertes atteignant jusqu’à 30% du volume sanguin peuvent être compensées par le seul apport de solutés colloïdes et cristalloïdes.

Solutés de remplissage vasculaire
Les solutés cristalloïdes, étant dépourvus de molécules dotées d’une activité oncotique, donc de PCO, se distribuent de ce fait rapidement entre le compartiment intravasculaire et interstitiel. Comme seulement 25 % de ces solutés restent en intravasculaire, il faut en administrer quatre fois plus que des solutés colloïdes pour compenser un même déficit, et répéter leur apport. Du fait de la diminution de la PCO intravasculaire par la dilution et l’inflation hydrique interstitielle résultante, la compensation volumique par les seuls solutés cristalloïdes peut altérer les échanges gazeux pulmonaires, la perfusion intestinale et l’oxygénation tissulaire générale.
La solution de Ringer-Lactate, dont la fraction lactate a pour but d’éviter l’acidose de dilution, augmente la consommation d’oxygène de l’organisme, suite au catabolisme oxydatif hépatique du lactate, et fausse de pouls le taux plasmatique de lactate utilisé en tant que marqueur de l’hypoxie.

Parmi les solutés cristalloïdes, les solutions électrolytiques complètes sont à préférer à la solution de Ringer –Lactate.

  • Les solutés colloïdes contiennent des macro-molécules dotées d’un pouvoir oncotique et restent préférentiellement dans le compartiment intravasculaire du fait de leur PCO intrinsèque. Compte tenu de leur coût élevé, la solution d’albumine humaine et les solutions de protéines plasmatiques ne sont pas indiquées pour le remplissage vasculaire, et sont remplacées par des solutions colloïdales artificielles (HEA et GEL), dont les effets sont caractérisés de la manière suivante :
  • Effet volumique maximal (EVM) : effet volumique initial maximal en % du volume administré.
  • Durée de l’effet volumique (DEV) : durée pendant laquelle le volume administré a une efficacité intravasculaire d’au moins 100%.
  • Demi-vie de l’effet volumique : durée pendant laquelle le volume administré a une efficacité intravasculaire d’au moins 50%.

Les colloïdes artificiels sont des mélanges polydispersés de molécules de tailles différentes.
Les solutions comportent pour cette raison en plus de l’indication de leur concentration, celui du PM moyen en kDa (kilodalton) des colloïdes qui les composent (par exemple : GEL à 4 % -30) ; les HEA sont en plus qualifiés par leur degré de substitution (par exemple : HEA à 10 % - 200/ 0,5).
Tous les colloïdes artificiels peuvent donner lieu à des réactions d’intolérance, sans qu’il existe des différence significatives entre eux en cas ce qui concerne la fréquence de leur survenue. D’autres effets indésirables sont l’altération tubulaire rénale et de la coagulation. Compte tenu de ces inconvénients et de l’obligation d’une prophylaxie par une haptène, les solutions de Dextran ne sont quasiment plus utilisées. Par rapport aux solutions de Dextran et d’HEA, les gélatines (par exemple GEL à 4% -30, Gélofusine) se caractérisent par une grande neutralité vis-à-vis de la coagulation et l’absence de néphrotoxicité.

Les gélatines sont particulièrement indiquées comme substituts volumiques en cas de menace d’atteinte de la fonction rénale et de la coagulation. Les solutions hyperoncotiques d’HEA à 10% -200/0,5 sont particulièrement indiquées en cas d’hypovolémie sévère, sachant que l’administration doit être suivie de l’apport de solutés électrolytiques complets pour compenser le déficit interstitiel.

Comme le choc hypovolémique se caractérise non seulement par une diminution du volume sanguin, mais s’accompagne aussi d’un transfert d’eau interstitielle dans le compartiment intravasculaire, le remplissage vasculaire urgent débuté à l’aide de solutions colloïdales seules doit être poursuivi en associant des solutions électrolytiques complètes dans un rapport d’environ 1 :1.
Le principe d’action des solutions décrites comme Small volume resuscitation, solutions hyperosmolaires (SH) ou hyperosmolaires-hyperoncotiques (SHH)(NaCl à 7,2 % avec HEA à 6%-200/0,5 ou NaCl à 7,9% avec Dextran 70 à 6%) est la mobilisation de l’eau interstitielle, intra-érythrocytaire et intra-endothéliale vasculaire par constitution rapide d’un important gradient osmotique ou osmotique = oncotique, sous réserve de la     présence d’un volume d’eau mobilisable. L’amélioration initiale de la micro et de la macro circulation doit être maintenue par substitution immédiate du volume mobilisé et poursuite de la compensation volumique.

Les SH/SHH (posologie : 4ml/kg ou 250 ml) sont adaptées au traitement initial du choc hémorragique ou traumatique- hémorragique, particulièrement grave, de patients disposant d’un volume mobilisable suffisant. Elles ne sont pas indiquées en cas de choc hypovolémique au sens strict, ni de choc traumatique- hypovolémique.

Produits sanguins labiles
Concentrés de globules rouges – CGR

 Le seuil au-dessous duquel l’apport de transporteurs d’oxygène sous forme de CGR est indiqué dépend en particulier de l’âge et des maladies associées (insuffisance coronarienne, BPCO etc.), ainsi que de la situation clinique (saignement occulte ou non maîtrisé), sous réserve du rétablissement préalable de la volémie par l’apport de solutions colloïdes ou cristalloïdes.

  • Chez les patients sans atteinte cardiaque et cérébrale, en situation clinique stable avec normovolémie, normoxie et normothermie, une concentration d’Hb de 7 g/dl n’est pas une indication de transfusion.
  • Au-dessus d’une valeur de 7 g/dl, une transfusion ne s’impose qu’en cas de signes d’hypoxie (tachycardie, sous-décalage du segment ST, élévation de la concentration de lactate, base excess (BE) négatif, diminution de la SvO2 du sang veineux central ou mêlé, ou de perte sanguine persistante.

En définitive, une concentration d’Hb de 6g/dl plaide en faveur d’une « presque toujours » transfusion et une concentration de 10 g/dl pour une « presque jamais » transfusion.

Plasma frais congelé-PFC

La fonction de coagulation du plasma reste conservée tant que la concentration des facteurs se maintient à 20-30% de leur valeur normale. Ce n’est qu’après des pertes sanguines d’environ 70% qu’une substitution par du PFC s’impose. Les indicateurs potentiels de celle-ci sont un allongement du TCA ou du PTT de 1,5 par apport à la normale, un abaissement de plus de 50% du temps de Quick, de l’AT III, de la concentration de fibrinogène et du nombre de plaquettes.

En cas de perte sanguine élevée, avec coagulopathie de dilution, traitement anticoagulant préalable et tendance hémorragique manifeste, la substitution doit être débutée plus tôt. Habituellement, une unité de PFC est administrée après 4 CGR ; en cas d’hémorragie persistante le rapport est augmenté jusqu’à 1 :1.

Concentré plaquettaire – CP
L’indication d’une substitution par des CP dépend de la cause de la thrombopénie ou de la thrombopathie ainsi que de la situation clinique.

Chez les patients présentant une hémorragie ou un trouble de la coagulation manifeste, l’apport de CP s’impose quand le nombre de plaquettes est < 50 000/μl, alors qu’une concentration > 100 000/μl ne justifie pas de substitution en règle générale. Le tableau clinique (hémorragie non contrôlée, pertes sanguines prévisibles), l’administration antérieure d’antiagrégants plaquettaires et les aspects logistiques peuvent justifier une transfusion plus précoce.

Catécholamines

En présence d’un choc hypovolémique, l’administration de catécholamines n’est justifiée que pour la correction d’un état de collapsus sévère ne répondant pas au remplissage vasculaire.
 Compte tenu des recommandations de la RCP, la catécholamine de choix est l’adrénaline, du fait de son double effet simultané bêta, et alpha à dose plus élevée.

Aspects thérapeutiques particuliers
Choc hémorragique

Le choc hémorragique requiert simultanément le contrôle de l’hémorragie et une compensation volumique adaptée. Le moment de la compensation et le volume administré sont déterminés en fonction de chaque cas.

Un saignement accessible à la compression est traité le cas échéant par une hémostase mécanique provisoire et une compensation volumique suffisante (par exemple : HEA à 10% -200/0,5), avant un traitement chirurgical définitif. A l’inverse, une hémorragie abondante et non contrôlable mécaniquement, dans une grande cavité corporelle, suite à une plaie perforante ou pénétrante, est traitée par un apport volumique restreint avec une hypotension « permissive » pour ne pas accentuer le saignement avec la remontée de la pression artérielle ; en aucun cas il ne faut retarder une prise en charge chirurgicale urgente. Le seuil de tolérance précis de l’hypotension n’est pas connu. Il dépend des maladies associées (par exemple hypertension artérielle). Néanmoins, une PAM à 50 mmHg ou une PAS à 70-80 mmHg peut être considérée comme suffisante. Aussitôt après le contrôle chirurgical de l’hémorragie, la correction du déficit volumique est indispensable.

Choc hypovolémique au sens strict

Le hypovolémique au sens requiert la substitution du déficit d’eau interstitielle par l’apport de solutions électrolytiques complètes, en fonction de la durée et de la gravité de l’évolution clinique.

En cas de fonction circulatoire encore suffisante (par exemple maintient de la conscience), un déficit volumique de constitution progressive est compensé de manière progressive. Du fait des troubles électrolytique associés, des contrôles rapprochés de Na et K sont indispensables. En particulier chez le sujet âgé, avec une réserve cardiaque limitée, le risque d’une surcharge volumique est effectif. Dans tous les cas, le traitement initial d’un collapsus sévère fait appel à l’administration de solutés colloïdes. Les SH/SHH sont contre-indiquées du fait de l’existence probable d’un déficit hydrique interstitiel.

Choc traumatique –hémorragique

Lors du choc traumatique-hémorragique, l’indispensable maintien du volume intravasculaire par remplissage forcé constitue le point essentiel.

Pour prévenir l’insuffisance de remplissage vasculaire, une prise en compte minutieuse du bilan lésionnel est indispensable. Les autres éléments entrant en ligne de compte sont essentiellement la PASla FC, la diurèse et les GDS. Le traitement chirurgical peut entraîner une perte sanguine supplémentaire, dont il faut tenir compte.

Les agents de choix sont les solutés colloide, telles l’HEA à 10% -200/0,5, ainsi que les solutions électrolytiques complètes à titre de complément. Un collapsus sévère est traité initialement par une solution hyperosmolaire/solution hyperosmolaire-hyperoncotique (SH/SHH).

Environ 50% des patients en état de choc traumatique-hémorragique en relation avec un polytraumatisme ont un TC, qui détermine souvent l’évolution. Une augmentation initiale de la PC résulte presque toujours d’une hémorragie intracrânienne expansive et/ou d’une oxygénation insuffisante du SNC. Chez la majorité des patients, ce n’est que 24-96 h après le traumatisme, pour des raisons diverses que l’on observe une augmentation secondaire de la PIC. C’est pourquoi d’éventuels effets négatifs du remplissage sur la PIC à la phase initiale du TC sont peu probables.

Le premier objectif chez les patients en état de choc traumatique-hémorragique, avec TC associé, est d’assurer à côté de l’oxygénation adéquate par une normoventilation contrôlée avec initialement une FiO2 de 1,0, une PPC suffisante par le remplissage vasculaire forcé et, le cas échéant, l’apport de catécholamines.

  • Pour assurer la perfusion cérébrale, une PAM> 90mmHg (correspondant à une PAS > 120mmHg) et une PPC > 70mmHg sont des valeurs seuil recommandées.
  • La substitution volumique est assurée à l’aide de solutés colloïdes, comme l’HEA à 10% -200/0,5 et des solutions électrolytiques complètes en complément. Un collapsus sévère est traité initialement par SH/SHH.
  • En l’absence d’efficacité de ce traitement, de la noradrénaline est administrée à la dose initiale d’environ 0,05 μg/kg/min.

Choc traumatique –hypovolémique et brûlures

Le choc traumatique –hypovolémique survient essentiellement à la suite de brûlures et nécessite un traitement par un apport volumique différencié et, le cas échéant, celui de catécholamines.

La substitution liquidienne basée sur des formules sert essentiellement pour le démarrage du traitement du choc. Dans les situations de catastrophe, la formule de Parkmand, d’après Baxter, est recommandée :
  • Besoin volumique = 4 ml x kg de poids x % SCB/24h
Pour le calcul de la surface corporelle brûlée (SCB), seules les brûlures du 2 éme et 3 éme degré sont prises en compte. La moitié du volume liquidien quotidien est administré dans les huit premières heures suivant l’accident, car c’est à ce moment que l’extravasation est la plus forte.

La substitution volumique initiale repose essentiellement sur la solution de Ringer isotonique (solution électrolytique complète). Le besoin liquidien lié aux lésions associées est pris en compte à part et nécessite le cas échéant le recours aux solutés colloïdes et aux produits sanguins labiles.
 Dans la mesure du possible, les catécholamines sont à éviter car, en diminuant la circulation cutanée, elles peuvent accentuer la nécrose au niveau des zones brûlées. Le cas échéant, il est fait appel à la dobutamine ou à l’adrénaline car ces agents augmentent le débit sanguin cardiaque (DC), essentiellement par amélioration de la contractilité, tout en amplifiant moins la vasoconstriction.


                                                      Choc cardiogénique




Pathogénie et physiopathologie

Le choc cardiogénique se caractérise par une réduction critique primaire de la performance de la pompe cardiaque.
Le terme de choc « cardiogénique » ne concerne au sens plein du terme que la perturbation cardiaque primaire. Sur le plan de la pathogénie, on distingue les causes myogènes, mécaniques et rythmogènes.
                                                
Par ailleurs une dépression myocardique peut aussi s’observer lors du choc hypovolémique sévère, ainsi que lors du choc septique ou anaphylactique.
La perturbation de la fonction systolique avec capacité d’éjection diminuée, et la perturbation de la fonction diastolique avec remplissage ventriculaire réduit, activent le système sympatho- adrénergique (tonus vasomoteur et RVS augmentés, centralisation de la circulation), ainsi que les mécanismes vasorégulateurs neurohumoraux, rénaux et locaux. Le but de cette régulation est le rétablissement et le maintien d’un DC adapté avec une perfusion suffisante.

Diagnostic
Symptomatologie générale et examen clinique
Les signes cliniques relèvent de la centralisation de la circulation, avec :
-         Etat d’agitation ou troubles de la conscience,
-         Peau pâle, froide, couverte de sueurs et oligurie.

Sur le plan hémodynamique :
-         PAS< 90 mmHg et IC < 2,2 l/min/mètres carré de SC.

Les paramètres diagnostiques de base, PAS, PAM, et FC, associés aux manifestations cliniques, permettent l’établissement d’un bilan d’orientation. Ultérieurement, en milieu hospitalier, une surveillance invasive s’impose de principe.

Une valeur –seuil de la FC n’est pas connue ; elle dépend de chaque cas particulier (neuropathie diabétique, troubles de la conduction, prise de bêtabloquants, etc.). Des causes de choc d’orientation non cardiaque, telles que l’hypovolémie et le sepsis sont toujours à exclure.

Diagnostic de base
L’anamnèse et l’examen clinique, tous deux indispensable, comportent en particulier les éléments suivants :
-         Relevé des antécédents (affections cardiovasculaires, angioplastie percutanée et intervention chirurgicale), ainsi que de l’anamnèse actuelle et des médications en cours.
-         Evaluation de l’EG (état général) et de l(état de conscience (torpeur), inspection à la recherche de cicatrices opératoires (thoracotomie, prélèvement de greffons veineux).
-         Evaluation des signes cliniques de bas débit, avec examen de la circulation et de la coloration cutanées (peau fraîche à froide – couverte de sueurs, pâle à marbrée), ainsi que l’appréciation par palpation de la qualité du pouls et du rythme cardiaque (tachycardie/bradycardie, rythme régulier/irrégulier, absence de pouls périphérique).
-         Recherche de signes d’obstacle au retour veineux, tels qu’une turgescence des veines du cou (la partie supérieur du corps étant surélevée de 15 – 30°), des oedèmes, une hépatomégalie et de l’ascite.
-         Auscultation et percussion pulmonaire (œdème pulmonaire, épanchements pleuraux).
-         Auscultation cardiaque (souffle systolique, en particulier en cas d’insuffisance mitrale, de rétrécissement aortique ou de communication interventriculaire ; souffle diastolique, en particulier en cas d’insuffisance aortique et de sténose mitrale).
En complément des paramètres diagnostiques de base, les examens suivants sont requis :
-         Radiographie standard du thorax de face, pour l’évaluation de la taille et de la forme du cœur et du médiastin, de la perfusion pulmonaire et d’épanchements pleuraux, etc.
-         Pose d’une sonde vésicale à demeure pour la mesure de la diurèse horaire (valeur du seuil inférieur de la normale : 0,5 ml/kg/h).
-         Détermination de la température corporelle centrale.

Un ECG à 12 dérivations, à la recherche d’un infarctus aigu ou ancien, d’une ischémie myocardique et de troubles du rythme est indispensable.

L’analyse d’une arythmie et du segment ST permet de reconnaître précocement 0des troubles du rythme et une ischémie myocardique cliniquement muette.
Diagnostic avancé 
Le diagnostic avancé repose sur les éléments suivants :
-         Mesure invasive de la pression artérielle.
-         Mise en place d’un KTC multilumières, en évitant, en cas de thrombolyse, le recours à la veine sous- clavière et la veine jugulaire interne, compte tenu du risque hémorragique, et en abordant préférentiellement la veine jugulaire externe, basilique, céphalique ou fémorale.
-         Détermination des paramètres biologiques usuels : Hb, Na, K, Ca, Mg, créatinine et urée.
-         Détermination de la concentration sanguine de lactates.
-         Surveillance de la coagulation, par le dosage du TCA, du PTT, du taux de prothrombine (INR, temps de Quick), de la concentration de fibrinogène et de la numération plaquettaire.

Les marqueurs biochimiques d’une lésion myocardique ont une importance fondamentale pour le diagnostic positif et différentiel, le traitement et l’évaluation du risque :
-         Une élévation de la troponine cardiaque T et I (TnTc, TnIc) s’observe environ 2 h après la survenue de la lésion myocardique.
-         Une augmentation de la CPK-MB (normale jusqu’à 10% des CPK totales) ne s’observe qu’après 4 -6 h.
-         Le diagnostic avancé repose sur l’échocardiographie, ainsi que l’exploration hémodynamique invasive à l’aide du KTAP ou de l’analyse de contour de l’onde de pouls artériel.


Traitement 
Bases fondamentales
Le traitement vise à supprimer, dans la mesure du possible, les causes du dysfonctionnement myocardique et à rétablir l’état hémodynamique, en optimisant la précharge, la contractilité et la postcharge.

Les patients en état de choc cardiaque doivent bénéficier sans délai d’un cathétérisme cardiaque avec possibilité de recours à une Angioplastie coronaire percutanée (PCI).

Le délai jusqu’à une angioplastie devrait être le plus court possible. Il n’existe cependant pas de valeur- limite de temps. En cas d’angor persistant, une PCI est indiquée même après un intervalle prolongé, car on peut supposer la persistance de tissus encore viables.

Mesures thérapeutiques générales
Elles comportent les éléments suivants :
-         Oxygénothérapie immédiate par masque ou sonde nasale.
-         Intubation précoce avec ventilation contrôlée et analgo- sédation, pour diminuer le travail respiratoire et garantir une oxygénation de bonne qualité.
-         Mise en place préhospitalière de deux accès veineux de gros calibre, pour un apport séparé de catécholamines.
-         En règle générale, la mise en place préhospitalière d’un KTC n’est pas indiquée. Elle est par contre obligatoire dès la prise en charge initiale hospitalière (attention en cas de thrombolyse)
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Analgésie et sédation

Une analgésie et une sédation suffisantes diminuent l’hyperactivité sympathique, la consommation d’oxygène, ainsi que la pré et la postcharge.

Chez le patient en ventilation spontanée, la morphine et le midazolam (Hypnovel) sont les agents de choix.
Troubles électrolytiques et acidose
Les anomalies de la concentration de K et de Mg sont à corriger sans délai, car les valeurs basses, en particulier, favorisent la survenue de troubles du rythme. L’acidose métabolique souvent présente diminue la sensibilité des récepteurs adrénergiques et a un effet inotrope négatif.

Dans des conditions de normoxie et de normocapnie, avec un BE < -10 mmol/l (soit un pH<7,25) un tamponnement avec du bicarbonate de Na, à la dose initiale de 1 mmol/kg est indiqué.

Troubles du rythme cardiaque

De principe on vise un contrôle de la fréquence cardiaque avec un rythme sinusal.

Une bradycardie sinusale, efficace d’un point de vue circulatoire mais ne répondant pas au traitement médicamenteux (par exemple injection IV de 0,5 à 3 mg d’atropine) requiert d’abord une stimulation cardiaque transcutanée sous analgo-sédation.
Les tachycardies supraventriculaires peuvent être à complexes fins ou à complexes larges, en cas de bloc de conduction intraventiculaire. Les tachycardies ventriculaires, par contre, se caractérisent toujours par des complexes larges.
En cas de choc cardiogénique, une cardioversion asservie aux ondes R est indiquée de préférence au recours à un essai thérapeutique par l’amiodarone (Cordarone).

Augmentation de la précharge
Une hypovolémie chez un patient en choc cardiogénique impose un traitement immédiat.

Les signes cliniques sont la sécheresse des muqueuses et la persistance du pli cutané. Sur le plan hémodynamique, une pression veineuse centrale (PVC) < 10mmHg est une indication de remplissage vasculaire.
En présence d’une hypovolémie majeure (par exemple PVC < 5 mmHg), un premier geste consiste en un remplissage titré de l’EIV par des solutés colloïdes iso- oncotique, comme la GEL à 4 % -30, l’HEA à 6% -130/0,4 ou l’HEA à 6% -200/0,5.
Les solutions électrolytiques complètes sont données à titre de complément pour corriger le déficit interstitiel.

Agents inotropes positifs

Catécholamines sur les récepteurs adrénergiques


1
2
1
2
DA1
DA2
Dopamine
0-3 g·kg-1·min-1
0
+
0
0
+++
+++
3-10 g·kg-1·min-1
+
+
++
+
++
++
> 10 g·kg-1·min-1
++
++
++
+
+
+
Dobutamine
+
0
+++
++
0
0
Adrénaline
+++
+++
++
+++
0
0
Noradrénaline
+++
+++
++
+
0
0

Les agents inotropes positifs et vasoconstricteurs sont indiqués dans l’éventualité où la PAM reste < 60 mmHg, malgré l’optimalisation du pré et de la postcharge, ainsi que de la FC.
Leur dose doit être la plus faible et leur durée d’administration la plus courte possible.

Quand l’hypotension est modérée (PAS > 80 mmHg), la dobutamine (dobutex) est la catécholamine de choix.

La dobutamine est un agoniste relativement sélectif des récepteurs β1- adrénergiques, qui, à doses plus élevées, supérieures à environ 7,5μg/kg/min, stimule simultanément les récepteurs alpha 1 et bêta 2. Des doses entre 2,5 – 15 μg/kg/min augmentent essentiellement la contractilité myocardique, alors que la FC et les RVS restent largement inchangées. Il en résulte une augmentation du DC et de la perfusion coronarienne.
Les doses dépassant 15 μg/kg/min augmentent nettement la consommation myocardique d’oxygène, la FC, les RVS et sont obsolètes.

La noradrénaline est indiquée en cas de collapsus résistant à la dobutamine.

La noradrénaline a des effets alpha adrénergiques prédominants : l’augmentation de la PAM devrait aussi entraîner celle de la perfusion coronarienne et cérébrale. Les doses initiales sont habituellement de l’ordre de 0,05 μg/kg/min.

L’adrénaline est indiquée comme ultime recours, quand les autres agents sont incapables d’augmenter la contractilité.

L’adrénaline stimule les récepteurs bêta 1, bêta 2 et alpha adrénergiques de façon dose- dépendante. A faible dose (0,03 – 0,1 μg/kg/min), elle augmente la contractilité myocardique et le DC par une bêta stimulation prédominante. A dose moyenne (0,1 – 0,2 μg/kg/min), elle stimule simultanément les récepteurs alpha et bêta, augmentant ainsi simultanément la postcharge et la contractilité.
A dose élevée (>0,2 μg/kg/min), la vasoconstriction par effet alpha est prédominante.
La dopamine stimule de façon dose- dépendante les récepteurs dopaminergiques et adrénergiques. De plus, elle libère de la noradrénaline au niveau des synapses sympathiques terminales ; du fait de ces effets non sélectifs, difficiles à prévoir, cet agent n’est plus recommandé.
La milrinone (Corotrope) est un inhibiteur de la phosphodiestérase avec un effet inotrope positif et un effet vasodilatateur, susceptibles de limiter le recours aux catécholamines en présence d’une contractilité insuffisante et d’une postcharge élevée (« inodilatateur »).

Réduction de la postcharge
En présence de certains causes de choc cardiogénique (par exemple insuffisance mitrale ou aortique), un abaissement de la postcharge est susceptible d’augmenter le VS ; un tel geste nécessite cependant une grande prudence, compte tenu du risque de collapsus réfractaire.

Le nitroprussiate de sodium, vasodilatateur pré et post-capillaire, est particulièrement puissant, facile à manier, du fait d’une demi-vie très courte, de l’ordre d’environ 1 min. la perfusion, débutée à la dose de 0,2 – 0,5 μg/kg/min, est progressivement augmentée et titrée, sous couvert d’une surveillance hémodynamique invasive.





                                        Choc anaphylactique
    


Pathogénie et physiopathologie

Le choc anaphylactique résulte d’une perturbation aigue de la réparation de la masse sanguine, sous forme d’un choc distributif, déclenché soit par des réactions d’hypersensibilité anaphylactiques classiques de type I, IgE- dépendantes, soit des réactions d’hypersensibilité anaphylactoide non IgE- dépendantes, sous l’effet de facteurs physiques, chimiques ou osmotiques.

Les réactions anaphylactiques et anaphylactoides ne peuvent pas être distinguées sur le plan clinique. L’effet cumulatif des médiateurs qu’elles libèrent (essentiellement de l’histamine et des leucotriènes) détermine essentiellement :
-         Une perméabilité vasculaire augmentée
-         Une vasodilatation prononcée et un bronchospasme.

l’embolie amniotique entre dans le cadre des réactions anaphylactoides ; de ce fait, elle est souvent décrite par l’expression «  syndrome anaphylactoide de la grossesse ».

Diagnostic

Les symptômes majeurs sont :
-         Les manifestations cutanées (prurit, flush, érythème ; dans les formes sévères, urticaire et angio-œdème),
-         Chute de la pression artérielle et le cas échéant tachycardie,
-         Obstruction des voies aériennes (œdème pharyngé et laryngé avec stridor, obstruction bronchique)
-          Symptômes gastro-intestinaux (nausées, vomissements, diarrhée, coliques, besoin d’uriner et de déféquer ou incontinence).

Le tableau clinique varie en fonction de la porte d’entrée de l’antigène, de sa vitesse d’absorption, et du degré de sensibilisation. Compte tenu de l’absence de signes cliniques typiques évocateurs du diagnostic, l’élément déterminant est le fait « d’y penser ».

Au départ, des manifestations cutanées, des symptômes abdominaux ou des troubles respiratoires peuvent être au premier plan. Dans les cas graves, en particulier quand l’antigène a été administré par voie IV, le tableau clinique peut débuter d’emblée par un état de choc sans manifestations cutanées ou abdominales.
L’intervalle libre peut aller de quelques minutes à quelques heures ; dans la majorité des cas, les symptômes se déclarent néanmoins dans l’heure qui suit l’exposition à l’antigène.

Traitement
                                          
Mesures initiales

Les mesures d’urgence suivantes s’imposent :
-         L’agent déclenchant (par exemple : le dard d’un insecte) est immédiatement enlevé. Quand l’agent a été administré par voie IV, le cathéter est laissé en place, seules la ligne de perfusion ou la seringue d’injection est changée.
-         En l’absence d’accès veineux, celui- ci est immédiatement mis en place, si possible avec un cathéter de gros calibre, et l’apport de solutions électrolytiques complètes à débit élevé est débuté.
-         La FiO2 est augmentée sans délai, par l’administration d’oxygène à l’aide d’un masque ou d’une sonde nasale (à un débit d’au moins 5l/min).
-         En présence d’un état de choc sévère, d’une hypoxie avec cyanose, ainsi que d’une dyspnée aigue avec obstruction croissante des voies aériennes supérieures ou de l’arbre bronchique, l’intubation et la ventilation artificielle (FiO2 à 1) s’imposent.

Un œdème des voies aériennes supérieures (en particulier l’œdème du larynx), peut empêcher l’intubation. En pareil cas, cricothyroidotmie constitue l’ultime ressource. L’œdème laryngé est la cause de mort la plus fréquente.

Tous les patients présentant une réaction anaphylactique, en particulier quand celle –ci est déclenchée par un agent à effet retard, doivent être hospitalisées et surveillés. Ceci reste valable après un traitement initial efficace, car des réactions tardives avec troubles du rythme, ischémie myocardique ou insuffisance respiratoire peuvent encore survenir jusqu’à 12 heures après l’évènement initial.

Traitement médicamenteux
Remplissage vasculaire

l’hypovolémie relative est traitée par la perfusion à haut débit d’une solution électrolytique complète (valeur cible de la PVC : environ 10 mmHg).
Cette conduite évite le risque théorique d’une réaction d’intolérance (additionnelle) aux colloïdes artificiels, sous réserve que l’effet volumique initial de la solution électrolytique complète suffise pour assurer le remplissage de l’EIV.
Recours aux catécholamines

Le traitement médicamenteux repose essentiellement sur l’adrénaline.

En stimulant les récepteurs bêta 1 et bêta 2 adrénergiques, l’adrénaline exerce un effet bronchodilatateur, inotrope et chronotrope positifs. A doses plus élevées, s’y ajoute une vasoconstriction par effet alpha mimétique avec augmentation des RVS et effet anti-œdème.
  Par principe, l’adrénaline est administrée par voie IV. Une injection IM n’entre en ligne de compte qu’à titre d’automédication en cas d’atopie connue. L’administration par inhalation est essentiellement indiquée en cas d’œdème laryngé gravissime (dans un but anti-œdème), ou (à titre de complément) en cas d’obstruction bronchique.
-         En présence d’une symptomatologie de choc marquée ou d’obstruction bronchique massive, l’adrénaline est administrée par voie IV lente, à faibles doses, pouvant aller jusqu’à 100μg/min, sous couvert d’un contrôle du pouls, de la pression artérielle, et si possible, d’une surveillance ECG continue.
-         Dans ce but, le contenu d’une ampoule de 1 mg d’adrénaline est dilué avec du NaCl à 0,9% jusqu’à 10 ml (1 ml = 100μg).
-         En l’absence d’accès veineux, l’adrénaline peut être administrée chez le patient intubé par voie endotrachéale, à posologie trois fois supérieure (dose unitaire de 300 μg).

Dans la mesure du possible, chaque dose est diluée, préférentiellement avec de l’eau distillée, à 10 ml, pour permettre une dispersion suffisante.
L’effet est plus durable qu’après injection IV.

En présence d’un collapsus sévère, réfractaire à l’adrénaline, la noradrénaline lui est associée pour obtenir une vasoconstriction.

-         La noradrénaline est administrée par voie IV, initialement à des doses de
      50 – 100 μg, le cas échéant à répéter.
-         Dans ce but, 1 ml d’une ampoule de noradrénaline est dilué avec du NaCl à 0,9% jusqu’à 20 ml (1 ml = 100 μg).

En dernier recours, un essai thérapeutique avec la vasopressine (1 x 40 UI par voie IV) est justifié.

Glucocorticoïdes

Les glucocorticoïdes sont particulièrement indiqués en cas bronchospasme sévère et en cas de symptomatologie retardée progressivement croissante.

-         Une dose unique de 500 – 1000 mg de méthylprednisolone (Solu- Medrol) est administrée par voie IV.
-         Le mécanisme de « l’effet stabilisateur de membrane », débutant après 10 – 30 min, reste obscur.
-         Les effets anti-inflammatoires résultent d’une modification de l’expression des gènes et requièrent 1 -2 heures pour se manifester.

Antihistaminiques

Les antihistaminiques ne sont administrés qu’à titre de complément, pour réduire en particulier la vasodilatation et la bronchoconstructeur induites par l’histamine (cette pratique très courante en Allemagne reste marginale en France).

-         Les antagonistes H1 et H2 sont toujours administrés ensemble, par exemple 50 mg d’hydroxyzine (Atarax) et 50 mg de ranitidine (Azantac) par voie IV.
-         Du fait de leur effet plus rapide, seul les antagonistes H1 à effet sédatif sont indiqués (anti- H1 de première génération).

Théophylline
La théophylline (Aminophylline) peut être associée, en cas de bronchospasme sévère.
Mais compte tenu de sa faible marge thérapeutique, cet agent est de moins en moins utilisé. La dose initiale est de 5 mg/kg.


 
Choc septique
 log
Pathogénie et physiopathologie

Le choc septique correspond à un trouble de la répartition de la masse sanguine circulante, induit par une infection, de type choc distributif. Il est déterminé par la pénétration de germes pathogènes ou de leurs toxines et s’accompagne (malgré un remplissage volumique adéquat) d’une PAS < 90 mmHg, ainsi que de signes cliniques de défaillance d’organes.

Un grand nombre d’agents infectieux (germes) ou nocifs non infectieux (traumatisme) peuvent déclencher une réaction inflammatoire affectant l’ensemble de l’organisme, dénommée, en fonction de son degré et de sa cause, SIRS, sepsis, sepsis grave ou choc septique. Au cours du processus septique, la stimulation du système immunitaire et endocrinien active des médiateurs humoraux et cellulaires à l’origine de perturbations de la vasomotricité et de la fonction endothéliale, déterminant à leur tour des troubles de la distribution dans la macro et la microcirculation.
L’extraction d’oxygène est aussi perturbée, entraînant une hypoxie d’organe isolé ou de plusieurs organes. Les troubles rhéologiques ainsi qu’une perméabilité capillaire accrue avec séquestration de liquide dans l’espace interstitiel, conduisent à la formation d’œdème interstitiel et à la diminution du volume intravasculaire, constituant les éléments essentiels du processus ; par ailleurs, la contractilité myocardique est diminuée.

Points essentiels du diagnostic

Les signes cliniques généraux sont les troubles de la vigilance, la fièvre (rarement une hypothermie) et les frissions. La peau est chaude et rouge, plus rarement froide et pâle.
  Les réactions circulatoires sont caractérisées par une tachycardie et des variations initiales de la pression artérielle ; par la suite, les RVS et la pression artérielle s’abaissent. La centralisation caractéristique des autres formes de choc n’apparaît ici qu’au stade de décompensation.
A côté de l’insuffisance circulatoire qui occupe l’avant de la scène, le fonctionnement d’autres organes peut être perturbé, réalisant le tableau du syndrome de défaillance polyviscérale (MODS pour multi organ dysfunction syndrom). Celui-ci inclut essentiellement :
-         Une encéphalopathie septique avec syndrome confusionnel et/ou diminution progressive de la vigilance allant jusqu’au coma,
-         Des troubles des échanges gazeux pulmonaires avec dyspnée et hypoxémie artérielle,
-         Une oligurie,
-         Une coagulopathie avec thrombopénie.

L’anamnèse et l’examen somatique indispensables comportent :
-         Le relevé des antécédents et de l’histoire actuelle
-         L’évaluation de l’ECG, de la conscience et la recherche de signes d’irritation méningée
-         La recherche de signes cliniques d’hypoperfusion, avec appréciation de la circulation et de la couleur cutanées
-         L’inspection complète du corps, avec, le cas échéant, la palpation, etc. a la recherche de foyers infectieux (sinus nasal compris)
-         L’auscultation et la percussion pulmonaires,
-         L’auscultation cardiaque
-         La palpation et l’auscultation abdominales

Après le relevé des paramètres diagnostiques de base, les gestes suivants s’imposent :
-         Insertion d’un KTC multilumière permettant des débits élevés
-         Mesure invasive de la pression artérielle
-         Radiographie standard du thorax de face
-         Contrôle de la diurèse (limite inférieure de la normale : 0,5 ml/kg/h)
-         Mesure de la température corporelle centrale.

Pour le diagnostic avancé, les éléments suivants, brièvement énumérés, sont pris en compte :
-         Paramètres biologiques généraux
-         GDS artériel, veineux central ou veineux mêlé (valeur normale : 70 – 75 %),
-         Concentration de lactate dans le plasma,
-         Autres examens d’imagerie diagnostique (TDM et le cas échéant échographie),
-         Détermination des paramètres biochimiques et autres de spsis, tels que les leucocytes, la CRP et la procalcitonine
-         Diagnostic microbiologique d’infection,
-         Détermination du débit cardiaque et des paramètres associés (analyse du contour de l’onde de pouls artériel, KTAP).

Points essentiels du traitement

Bases fondamentales
Le traitement s’effectue obligatoirement dans un service de réanimation équipé pour le diagnostic et la surveillance non invasive et invasive.

Le traitement comprend le traitement étiologique (évacuation chirurgicale du foyer infectieux et antibiothérapie adaptée), le traitement spécifique de l’état de choc (soutien des fonctions vitales), ainsi que des traitements adjuvants. Seules les bases du traitement spécifique de l’état de choc sont envisagées ici.

Mesures thérapeutiques générales
-         Intubation précoce et ventilation contrôlée, car l’analgo- sédation et la ventilation contrôlée abaissent la consommation d’oxygène dans une proportion pouvant atteindre 25%.
-         Eventuellement mise en route de l’alimentation entérale, si possible dans les 12 premières heures, ou au minimum apport liquidien entéral pour protéger la fonction de barrière de la muqueuse du tractus gastro- intestinal et prévenir la translocation de bactéries et de toxines.
-         Insulinothérapie (valeur- cible de la glycèmie : 0,8-1, 10g/l)

Compensation volumique et produits sanguins labiles
Le remplissage vasculaire précoce et rapide permet de rétablir dans un premier temps une volémie suffisante pour assurer un retour veineux suffisant et un débit cardiaque adéquat.

Les besoins volumiques sont souvent sous-estimés. Du fait de la perméabilité vasculaire accrue, le déficit peut atteindre plusieurs litres à la phase aigue :
-         En cas de fuite liquidienne transcapillaire cliniquement manifeste, le remplissage s’effectue essentiellement avec des solutions électrolytiques complètes.
-         En cas de collapsus sévère, la compensation volumique fait aussi appel aux gélatines ou aux HEA, et aux SH/SHH.
-         Du fait d’une meilleure élimination des molécules et d’un moindre effet sur les reins et la coagulation, les gélatines peuvent être avantageuses par apport aux HEA.

Une valeur de concentration optimale d’Hb n’est pas connue. Elle dépend essentiellement de l’âge, des maladies associées et de l’état clinique, sous réserve qu’une normovolémie optimale, par apport de solutions cristalloïdes et colloïdes, soit assurée.

-         En cas d’infection sévère, la concentration d’Hb ne doit pas être inférieure à 7 – 8 g/dl.
-         En cas de choc septique manifeste, elle ne doit pas être inférieure à 9-10g/dl, en particulier quand la SvO2 du sang veineux central ou mêlé est < 70 % et qu’il existe une acidose lactique manifeste.

Recours aux catécholamines 
Les agents vasoconstricteurs et inotropes positifs ne sont administrés qu’à partir du moment où la PAM reste < 65 mmHg, en dépit d’une optimalisation de la précharge, en s’adaptant néanmoins à la situation clinique d’ensemble (maladies associées,etc.).

-         La noradrénaline est le vasopresseur de premiers choix. La posologie initiale est de 0,1 – 0,2 μg/kg/min, adaptée en fonction des données de la surveillance invasive de l’état circulatoire.
-         En cas de choc persistant, en dépit d’un remplissage correct et de l’apport de noradrénaline, la contractilité myocardique est augmentée par l’adjonction de dobutamine (dobutrex).
-         L’adrénaline est l’ultime recours, en présence d’une contractilité ne répandant pas au traitement précédent.



                                                       Choc neurogénique




Pathogénie et physiopathologie

Le choc neurogénique est un choc distributif en relation avec une vasodilatation généraliste et étendue, induisant une hypovolémie relative, du fait d’un déséquilibre entre la régulation sympathique et parasympathique de l’activité de la musculature lisse des vaisseaux.
                                       

Les causes en sont :
-         Une lésion ischémique des centres vasomoteurs centraux, par exemple en cas d’HSA ou de PIC augmentée.
-         Une lésion ou une interruption des voies efférentes des centres vasomoteurs, par exemple en cas de traumatisme ou d’ischémie médullaire.
-         Une perturbation de l’arrivé ou du traitement des influx au niveau des centres vasomoteurs, par exemple lors de la syncope neurocardiaque, du syndrome du sinus carotidien ou de réflexe vagaux.

En définitive, la régulation sympathique de la vasomotricité est interrompue ou perturbée. Il en résulte une hypotension artérielle, en l’absence de causes habituelles d’état de choc (comme une perte sanguine majeure)

Diagnostic

Symptômes généraux et examen somatique
Ils comportent :
-         Une chute soudaine de la pression artérielle,
-         Une bradycardie
-         Un pouls lent, « bondissant »
-         Le cas échéant une perte de connaissance,
-         Une peau pâle, chaude et sèche
-         Une abolition des réflexes médullaires et de la sensibilité en cas de lésion médullaire haute.

Diagnostic de base
En complément des paramètres diagnostiques élémentaires, sont requis :
-         Une évaluation clinique de l’EG et de l’état de la volémie.
-         La mise en place d’un KTC pour la mesure de la PVC.
-         En présence d’un choc prolongé, mesure de la pression artérielle par voie invasive.
-         La mise en place d’une sonde vésicale à demeure pour la mesure de la diurèse horaire (seuil inférieur de la normale : 0,5 ml/kg/h)
-         La détermination de la température corporelle centrale.
-         La détermination de la concentration d’Hb, ainsi que des concentrations plasmatiques d’électrolytes, de lactate et de glucose.

Diagnostic avancé
Le diagnostic avancé comporte les éléments suivants :
-         Relevé de l’anamnèse neurologique.
-         Détermination du niveau de vigilance à l’aide du GCS.
-         Examen neurologique, en particulier rechercher de signes méningés, de troubles de la motricité pupillaire, de mouvements spontanés et de défense, de signes d’atteinte pyramidale et de l’état de la motricité et sensibilité segmentaires.
-         En cas de choc prolongé imposant l’administration de catécholamines, surveillance hémodynamique élargie avec analyse du contour de l’onde de pouls artériel ou KTAP.
-         TDM, analyse du LCR, EEG, Doppler,etc.

Traitement

Mesures thérapeutiques générales
Les mesures générales comportent :
-         Une augmentation de la FiO2 par administration d’oxygène à l’aide d’un masque ou d’une sonde nasale ; en cas d’insuffisance circulatoire ou respiratoire grave : intubation et ventilation contrôlée.
-         Mise en place d’au moins deux accès veineux périphériques performants pour le remplissage vasculaire et éventuellement l’administration séparée de catécholamines.
-         Pose d’un KTC pour la mesure de la PVC et l’administration de médicaments.
-         Compensation rapide de l’hypovolémie relative à l’aide de solutions colloïdes et cristalloïdes jusqu’à l’optimalisation de la PAS, de la FC et de la PVC,  le cas échéant du débit cardiaque.
-         En cas de choc persistant, élévation des RVS par la noradrénaline à une dose initiale de 0,05μg/kg/min.
-         En cas de dysfonctionnement ventriculaire, augmentation de la contractilité par la dobutamine (Dobutrex), à la dose de 2,5-15 μg/kg/min (ou, le cas échéant, par l’adrénaline).

Mesures thérapeutiques spécifiques
-         Les agents osmotiques (par exemple perfusion de 250 ml de mannitol à 20%) sont indiqués en cas d’élévation aigue de la pression intracrânienne, en attendant la décompensation chirurgicale.
-         La décompensation du tronc cérébral est à envisager en cas de saignement dans le cervelet avec formation d’infarctus expansifs.
La thrombose du tronc basilaire est une indication de thrombolyse artérielle, dans la mesure où (en règle générale) la symptomatologie existe depuis moins de 6 h.

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