Les marqueurs cardiaques dans les syndromes coronariens aigus (SCA)

Les marqueurs cardiaques dans les syndromes coronariens aigus (SCA)


Rappels
Définition
Les SCA regroupent l’angor instable et l’infarctus du myocarde (IdM).
L’angor stable n’appartient pas à ce groupe. Les SCA résultent d’une thrombose aigue d’une artère coronaire entraînant une ischémie myocardique et la mort des myocytes ou « nécrose ».

Classification
L’ECG, en association avec les marqueurs cardiaques, permet de définir trois situations cliniques.

ECG
Marqueurs cardiaques
Situations cliniques
Thérapeutique
SCA  ST+
-Inutile pour le diagnostic
-Evaluation de l’efficacité de la reperfusion
IdM avec onde Q (en général)
Thrombolyse, angioplastie en urgence
SCA  ST-
Supérieurs au seuil d’IdM
IdM sans onde Q (en général)
Pas de désobstruction en urgence
SCA  ST-
Inférieurs au seuil d’IdM
Anciennement appelé « angor instable »
Pas de désobstruction en urgence

ST+ : avec décalage du segment ST
ST- : sans décalage du segment ST.

Marqueurs cardiaques actuels
  • Les différents marqueurs cardiaques sont aujourd’hui plus sensibles (donc plus précoces) et plus spécifiques que la CK, les LDH, et l’ASAT. Actuellement, la myoglobine (MB) et la troponine I cardiaque (TNIc) sont les marqueurs à privilégier. La CKMB (masse) reste utile lorsque la TNIc ne peut être utilisée.


Mb
CK
CKMB
TNIc
ASAT
LDH
Début de l’augmentation sanguine
2h
3-4h
3-4h
4h
6h
10h
Pic
10-12h
24h
20-24h
12h
36h
48-72h
Retour à la normale
1j
4j
2,5j
9-14j
5-6j
15j
Cinétique des différents marqueurs cardiaques

Myoglobine
Définition
  • Protéine de faible poids moléculaire, de forte affinité pour l’O2, localisée dans le cytosol des cellules musculaires squelettiques et cardiaques.

Valeurs normales
  • Grande variabilité selon les automates. Environ N : < 70-90 μg/ml.
—›marqueurs sensible mais peu spécifique :

Myoglobine
< 2 heures
2-4 heures
4-6 heures
Sensibilité (%)
38
63
83
Spécificité (%)
71
64
50

Utilisation dans l’IDM
  • La Mb est utilisé comme marqueur de l’IdM depuis 1975 :
-         marqueur d’occlusion dans les 12 heures suivant la douleur ;
-         évaluation de la reperfusion : un pic est observé à 70 minutes (au lieu de 360 minutes) en cas de thrombolyse réussie, avec une concentration x 4-5

Limites
  • La Mb est augmentée dans de nombreuses situations pathologiques : insuffisance rénale, embolie pulmonaire, brûlures, myopathie, rhabdomyolyse.

CK-MB
Caractéristiques
  • Isoforme de la créatinine kinase (CK). Dans le sérum, 95% de la CK sont de la CKMM alors que 5% de la CKBB est indétectable
  • La CKMB est présente dans le cytosol (principalement) des cellules des muscles squelettiques et cardiaques.

Valeurs normales
  •       Seuil décisionnel de l’IdM : entre 5-10 μg/L selon les techniques (CK-MB masse).

Utilisation dans l’IDM
  •     Marqueurs de l’IdM, plus sensible que la CK mais moins cardiospécifique que la TNIc.
  •   Evaluation de la reperfusion possible.

Limites
  • Augmentée dans de nombreuses situations pathologiques : insuffisance rénale, embolie pulmonaire, brûlures, myopathie, rhabdomyolyse.

Troponine I cardiaque (TNIc)

Définition
  • La troponine est un complexe protéique des myofibrilles, régulant la contraction musculaire par l’interaction actine/ myosine dans le muscle strié squelettique et le muscle cardiaque.
  • Elle est composée de trois sous-unités I, T, C, de rôles différents.
  • Il existe différentes isoformes de troponine I selon le type de muscle (strié à action rapide/strié à action lente/cœur)
—› la troponine I cardiaque (TNIc) est spécifique du cœur.

Valeurs normales
  • Variables selon les techniques.
  • N < 0,03 ng/ml ou <0,1 ng/ml.
  • Seuil décisionnel de l’IdM : > 0,5 ng/ml ou > 1ng/ml.
  • A 6 heures après la douleur, spécificité env. 95% et sensibilité env. 95%.
Utilisation dans l’IdM

Diagnostic
  • TNIc > seuil décisionnel d’IdM —› SCA de type IdM avec ou sans onde Q.
  • Normal < TNIc < seuil décisionnel d’IdM —› souffrance myocardique : dosage à renouveler dans quelques heures.
  • IdM per/périopératoire (≠ Mb, CK-MB).
  • Diagnostic rétrospectif (jusqu’à 14 jours après l’événement).

Pronostic
  • Valeur prédictive de survenue de complications cardiaques à court ou à long terme (valeur de TNIc et vitesse de retour à la normale).

Reperfusion
  • Privilégier l’utilisation de la Mb.
  • La reperfusion et réussie si le rapport TNIc à 0 heure/ TNIc à 2 heures est supérieur à 16, ou si le rapport TNIc à 0 heure/TNIc à 90 minutes est supérieur à 6.

Limites
  • La TNIc est élevée dans d’autres circonstances physiopathologiques :
-         Atteintes cardiaques : myocardite, péricardite, chirurgie cardiaque, toxicité cardiaque.
-         Infections : bactériennes, choc septique.
BNP
Intérêt du BNP dans l’IdM

  • Augmentation du BNP :
-         1 pic (env.20 h après douleur) —› corrélé à la taille de l’IdM.
-         2 pic éventuel (env.4-5 jours) —› facteur pronostic de mortalité.

Intérêt du BNP dans les SCA sans sus-décalage de ST
  • Augmentation du BNP à J3 corrélée à l’augmentation de mortalité quel que soit le taux de TNIc.
        —› Ainsi, BNP et NT-pro-BNP sont des marqueurs prédictifs de mortalité dans les                 SCA. Associés à la TNIc et à la CRP ultrasensible, ils participent à la stratification du risque    dans les SCA.

L'efficacité et la fiabilité de  la troponine et la BNP et leur influence sur la pratique de la cardiologie

  indéniablement, ces marqueurs cardiaques ont modifié la pratique de la cardiologie, et même la nosologie puisque les définitions d'infarctus ont été modifiées avec l'apparition de ces nouveaux outils ; elles sont d'ailleurs en train de rechanger à nouveau, il devrait y avoir très prochainement une nouvelle définition, ou plus exactement des nouvelles définitions de l'infarctus du myocarde.  

la troponine et le BNP.   nous ne pouvons que se réjouit des apports dans la pratique de la cardiologie de ces nouveaux outils qui sont devenus des instruments "de routine pour les médecins". Cependant, l'utilisation abusive et inconsidérée de ces tests de taux sanguins, parfois onéreux  doivent,   s'inscrire dans une orientation clinique initiale clairement définie.
Utilisation   fiabilité  de la BNP et la troponine, pour le diagnostic des pathologies cardiaques 
  Ces marqueurs sont devenus des outils   de la routine clinique.    malheureusement, il faut reconnaître qu'ils ne sont pas toujours utilisés à bon escient.  'il peut y avoir un certain degré de gaspillage dans les ressources publiques en employant ces marqueurs dans des situations où leur pertinence n'est pas évidente.  
  il faut avoir conscience que ce type d'abus peut se retrouver chez tout le monde, y compris chez les cardiologues. Il n'y a pas d'exclusivité de l'utilisation inconsidérée des examens.
Mais pour revenir à l'emploi à mauvais escient des marqueurs cardiaques, il faut comprendre que ces outils, comme toujours et comme pour tous les examens paracliniques quels qu'ils soient, n'ont de sens que s'ils sont utilisés en fonction d'une orientation clinique réelle et bien définie. Il ne s'agit pas de mesurer des taux sanguins à tout bout de champ comme on peut le constater parfois dans certains services d'urgences ou même en ville. Par exemple, on voit des gens qui se présentent avec le moindre semblant de douleur n'importe où dans le tronc, je ne parle même pas de douleurs thoraciques, et qui se retrouvent à devoir se soumettre à des mesures de taux de troponine, voire de BNP. C'est une attitude qui n'est pas du tout raisonnable. Ces marqueurs doivent être utilisés en fonction de l'examen clinique initial, sinon, comme d'habitude, les médecins se retrouvent face à des faux positifs. En effet, quand on fait des dosages de troponine à un nombre élevé de personnes dans la population générale, il y a forcément une partie des gens testés qui présenteront des résultats avec un taux inapproprié ou sans signification particulière de ce complexe protéique. Ces mauvaises pratiques ont plusieurs conséquences : elles coûtent cher, sont parfois inutiles et créent des sources de complication en tout genre pour la suite du traitement.
  Fiabilité de   la troponine  
  troponines : elles sont essentiellement utilisées comme détecteur de la nécrose myocardique en cas de suspicion d'infarctus. Ainsi, elles sont particulièrement utiles quand on a affaire à des patients qui ont des douleurs thoraciques ou parfois extrathoraciques authentiquement suspectes d'être des douleurs angineuses ou des douleurs d'ischémies myocardiques. En revanche, quand on n'a pas affaire à un infarctus caricatural avec sus-décalage du segment ST, il n'est pas nécessaire de réaliser ce dosage pour faire le diagnostic. Cependant, il faut reconnaître que les troponines sont quand même faites, en général, juste pour confirmer le diagnostic et, d'une certaine manière, le quantifier.
Quand on est en dehors de cette situation et que l'électrocardiogramme n'est pas concluant en lui-même, les troponines sont tout à fait utiles. Elles sont de très bons repères en matière de risques du syndrome coronaire aigu, en différenciant ce qui est un infarctus sans sus-décalage de ST de ce qui est un angor instable sans élévation de la troponine, et donc sans infarctus myocardique.
En fonction de cette classification, extrêmement simple  , le médecin peut facilement définir l'orientation sur les stratégies optimales de traitement.
Dans le premier cas, si les marqueurs sont élevés, on va avoir recours à une stratégie relativement agressive en matière de médicaments. Ainsi, nous allons utiliser des antithrombotiques puissants, à la fois anticoagulants et antiagrégants plaquettaires, comme par exemple des fortes doses de clopidogrel ou d'anti-GPIIbIIIa?
Par la suite, nous réalisons une coronographie dans l'optique de faire une dilatation coronaire ou un pontage coronaire, donc une revascularisation myocardique. Si, au contraire, les marqueurs ne sont pas élevés, le cardiologue a davantage le temps de se retourner et va pouvoir attendre de voir ce qui se passe sur le plan clinique, et notamment vérifier, bien sûr, si les douleurs ne se répètent pas. Si elles ne réapparaissent pas, nous nous tournons, en général, vers des bilans non invasifs ; c'est-à-dire des épreuves et des imageries d'efforts ou de stress. Alors, en fonction des résultats de ces techniques, nous nous orientons éventuellement alors vers la coronographie et les techniques de revascularisation myocardique.
  intérêt à continuer le dosage de la troponine après un diagnostic établi pour suivre l'évolution de l'état du patient ?
Le suivi peut être intéressant dans le cas où l'on a une suspicion de récidive des événements cardiaques. Lorsqu'un patient fait un infarctus, puis souffre de nouveau dans les heures ou les jours qui suivent, refaire un dosage peut être intéressant. Mais il y a des limites, la troponine n'est pas alors forcément le meilleur marqueur pour cela, notamment à cause de sa cinétique très lente. Dans ce type de situation, peut-être que les CK-MB sont plus pertinents pour juger d'un risque de récidive d'infarctus. En dehors de cette situation particulière, la mesure du taux de troponine après l'établissement d'un diagnostic n'est pas forcément des plus pertinentes.
En revanche, ce qui mérite d'être dit, c'est que la mesure du taux de troponines ne devrait pas être faite en ville, ou, pour être plus précis, on ne devrait pas en avoir besoin en ville. La raison en est assez simple : lorsqu'un médecin de ville voit son patient et qu'il détecte suffisamment d'éléments pour suspecter la présence d'un angor instable ou d'un infarctus sans sus-décallage du sagement ST, son réflexe ne doit pas être de demander des troponines pour confirmer éventuellement ce diagnostic. Sa première démarche doit être d'envoyer son patient très rapidement dans une institution avec une unité de soins intensifs de cardiologie. En effet, c'est véritablement dans les premières heures que le risque est maximum.
si le médecin pense vraiment qu'il a affaire à un syndrome coronaire aigu, il faut absolument hospitaliser le malade sans tarder.
C'est ensuite, en arrivant à l'hôpital ou à la clinique, qu'il faudra mesurer la troponine.

  CPK   CPK-MB  troponines :
 La troponines a permis de détecter d'authentiques nécroses myocardiques qui passaient parfaitement inaperçues auparavant. C'est le cas par exemple des patients qui ont, ce que l'on appelait auparavant, des angors instables. Ils n'avaient pas d'élévation des CPK ou des CPK-MB, mais, chez ces malades, nous constatons aujourd'hui des élévations de troponines. Dans ce type de cas, ce ne sont quasiment jamais des élévations très importantes, mais cela traduit quand même une réelle nécrose cellulaire même si celle-ci n'est pas quantitativement très importante. Et nous savons que ces pathologies avec nécroses cellulaires, même relativement minimes, sont des formes à évolutions plus graves à brèves échéances ou à plus long terme que les formes sans nécrose myocardique du tout. Du coup, concrètement, des patients, que l'on aurait mis dans des unités de cardiologie classiques il y a quelques années, se retrouvent maintenant dans des unités de soins intensifs. Et même dans certains hôpitaux   on a créé une unité de douleurs thoraciques spécifique pour essayer de faire le tri de ces cas et, bien sûr, le dosage de la troponine y est particulièrement utile.

  pour le BNP :
  Pour le BNP, ce marqueur est utilisé essentiellement pour l'insuffisance cardiaque.    En effet, l'insuffisance cardiaque touche souvent des personnes âgées qui ont des polypathologies. Ainsi, les troubles sont parfois intriqués avec des problèmes infectieux ou pulmonaires.   Le BNP est le test  biologique de certitude d’une insuffisance cardiaque authentique.
   chez les insuffisantes cardiaques chroniques, c'est un moyen de surveillance des formes les plus sérieuses et avancées de la maladie, dans le but d’équilibrer correctement le traitement  .
Par ailleurs, il y a beaucoup de littérature en ce moment sur l'intérêt de l'utilisation du BNP dans lessyndromes coronaires aigus en complément de la troponine.  à l'heure actuelle, cela reste largement dans le domaine de la recherche clinique. Il semble, qu'effectivement, l'élévation du BNP puisse être un élément pronostique prédictif d'événements graves, indépendamment ou en plus de l'élévation de la troponine. En pratique, c'est très probablement vrai, mais l'utilité clinique de ce complément est, au final, relativement modeste. Donc, en l'état actuel des connaissances, il n'y a pas de véritables indications à faire des dosages du BNP dans les syndromes coronaires aigus
  le BNP ou le NT-proBNP.   ces deux formes du marqueur sont utilisées et chacune présente ses avantages et inconvénients propres.  
  NT-proBNP   offre une stabilité plus grande, ainsi les dosages sont probablement plus fiables. Mais, au final, l'information fournie est à peu près du même ordre pour les deux.                                      
  Chefik  Gahbiche

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